Carole Minker
Les remèdes de la médecine ayurvédique sont composés, dans 90 % des cas, de plantes. L’ensemble de la pharmacopée ayurvédique comprend 1 250 plantes utilisées depuis plusieurs millénaires, tantôt consommées seules, tantôt en mélanges. Parmi ceux-ci, nous avons choisi de vous présenter quatre remèdes ayurvédiques que vous pouvez trouver en France sous forme de poudre, de gélules ou de comprimés, soit dans les magasins de santé naturelle, soit sur les sites spécialisés en ligne.
Conseillé pour la digestion et l’élimination intestinale, le triphala est composé de trois types de baies :
○ le myrobolan noir, ou haritaki (Terminalia chebula) ;
○ le myrobolan bâtard, ou bibhitaki (Terminalia bellerica) ;
○ l’amla, ou amalaki (Emblica officinalis).
En ayurvéda, ce remède est considéré comme " l’un des mélanges à base de plantes les plus précieux du monde ", réputé comme tonique physique et psychique de l’organisme, antioxydant, anti-inflammatoire, anti-fièvre, analgésique, antibactérien, antidiabétique, antistress et même adaptogène ! En ce qui concerne ses vertus sur le système digestif, l’ayurvéda le préconise comme nettoyant du foie et du sang, un peu laxatif par stimulation du flux biliaire et du transit intestinal.
Plusieurs études ont été menées, confirmant certains usages traditionnels : chez l’animal, il est effectivement anti-inflammatoire (soulageant l’arthrite) et adaptogène (réduisant les effets néfastes du stress sur l’organisme). Dans le domaine métabolique et cardio-vasculaire, il abaisse l’excès de cholestérol chez l’animal présentant un taux sanguin trop élevé. Il a réduit significativement les taux de cholestérol total, LDL et VLDL (cholestérol associé à des lipoprotéines de basse et très basse densités, considérées comme du " mauvais " cholestérol). Chez l’être humain (749 patients cumulés sur 12 études), il améliore les taux de lipides sanguins (cholestérol LDL et total, triglycérides), et réduit le poids corporel, l’IMC, ainsi que le tour de taille et, chez les diabétiques, la glycémie à jeun.
Le remède triphala est riche en prébiotiques (fibres alimentant les bonnes bactéries intestinales) qui nourrissent favorablement le microbiote. Il permet d’augmenter la bénéfique bactérie Akkermansia muciniphila et de réduire le ratio bactérien Firmicutes/Bacteroidetes. Ce ratio est un marqueur du déséquilibre du microbiote intestinal présent en cas d’obésité et de maladies inflammatoires chroniques de l’intestin (Mici), mais il est aussi impacté par l’âge. En modifiant le microbiote d’individus obèses, le triphala a permis de changer leur métabolisme énergétique, ce qui laisse présager d’un espoir dans le traitement de l’obésité. D’après une découverte récente sur un modèle animal de la maladie d’Alzheimer, le triphala pourrait moduler l’axe intestin-cerveau dans les deux sens, améliorant leurs capacités cognitives. Dans ces études, aucun effet secondaire majeur n’a été révélé suite à la prise du remède.
[lireaussi:9086]
Ce régulateur du métabolisme des sucres et des lipides est composé de :
○ feuilles de gymnéma, ou gurmar (Gymnema sylvestris) ;
○ graines de fenugrec, ou methi (Trigonella foenum-graecum).
Il existe peu d’études dédiées au remède trimada, mais une récente (2023) montre des effets confirmant l’usage traditionnel. Elle explore le potentiel antidiabétique de ces plantes sous forme d’extraits aqueux chez l’animal et montre une action réductrice de la glycémie à jeun, et une augmentation de la sécrétion d’insuline similairement à un médicament de prescription (metformine). Une meilleure normalisation des taux sanguins d’urée, de créatinine et d’enzymes hépatiques a même été obtenue avec ces deux plantes, en comparaison avec la metformine. Les auteurs de l’étude estiment que le trimada pourrait constituer une alternative pour la prise en charge du diabète.
D’après les études cliniques, l’un des effets intéressants du gymnéma est qu’il permet de réduire, dès quatorze jours de prise, les pulsions alimentaires pour les friandises sucrées. Les personnes habituées à manger beaucoup de sucre présentaient une plus grande réduction du plaisir à manger du chocolat, et du désir d’en manger davantage, comparativement aux personnes moins attirées par le sucre par nature. Il aide au retour à la normale du métabolisme du sucre, et améliore la sensibilité à l’insuline chez des personnes diabétiques ou prédiabétiques.
[lireaussi:9042]
Il existe, pour un certain nombre de mélanges ayurvédiques, leurs variantes qui incorporent le guggul : le triphala devient par exemple le triphala guggul. Dans ces remèdes, le guggul est ajouté pour améliorer l’absorption et l’efficacité du remède, mais aussi pour ses effets polyvalents avec de multiples mécanismes d’action hypoglycémiants, hypolipémiants, anti-inflammatoires, protecteurs hépatique et cardiaque, antimicrobiens, anti-obésité, anticancéreux, stimulatrice de la thyroïde, etc. Des études précliniques et cliniques restent néanmoins à mener sur cette panacée.
Cette synergie de trois épices destinée à stimuler la digestion est composée de :
○ rhizomes de gingembre, ou sunti (Zingiber officinale) ;
○ fruits de poivre noir, ou marich (Piper nigrum) ;
○ fruits de poivre long, ou pippali (Piper longum).
Cette formulation (aussi appelée trikatu churna), considérée comme " miraculeuse " par certains Indiens, est prescrite en médecine ayurvédique contre la perte du goût, les troubles digestifs, les maladies ORL (rhinite, sinusite), mais aussi les maladies de peau, l’obésité et l’asthme, entre autres.
Les études ont révélé ses propriétés anti-nausées, antivirales, antihyperlipidémiques (réduction du cholestérol LDL et des triglycérides), réductrices des gaz intestinaux et protectrices hépatiques, allant dans le sens de l’utilisation traditionnelle. De nouveaux effets ont aussi été attestés par la science : ses actions anti-inflammatoires et stabilisatrices de l’immunité. Celles-ci ont permis de soulager, chez l’animal, les symptômes de maladies inflammatoires auto-immunes comme la polyarthrite rhumatoïde. Les chercheurs ont montré que les molécules de l’inflammation dosées dans le sang (TNF-α ou interleukine-1β…), étaient significativement réduites après traitement avec le trikatu. Par ailleurs, ce remède a été recommandé par les autorités indiennes pour les cas de Covid-19 aux symptômes modérés. Une revue de la littérature scientifique montre que le trikatu peut en effet être utilisé pour combattre les syndromes grippaux comme ceux liés au Covid-19.
Une précaution s’impose toutefois : les études ont mis au jour sa capacité à augmenter la biodisponibilité de divers médicaments végétaux ou allopathiques, dont il peut convenir de modifier la posologie le cas échéant. Cette action s’explique par la présence forte de la pipérine, connue pour modifier la perméabilité intestinale, et que l’on évitera en cas de maladies intestinales chroniques ou de perméabilité intestinale.
[lireaussi:8147]
Conçu pour réguler l’appétit et perdre du poids, ce remède est composé de :
○ résine de guggul, ou guggulu (Commiphora mukul) ;
○ rhizome de souchet rond, ou musta (Cyperus rotundus) ;
○ graines de faux poivre noir, ou vidanga (Embelia ribes).
Si aucune recherche n’a pour l’instant été consacrée au trivana en tant que tel, des études existent sur chacun de ses composants, confirmant l’utilisation traditionnelle du mélange. Le souchet rond est antidiabétique, diurétique, antispasmodique, anti-flatulences, stimulant digestif, anti-inflammatoire, énergisant physique et psychique et antiparasitaire, tandis que le faux poivre noir est protecteur hépatique, anti-infectieux, cicatrisant, analgésique, antihyperlipidémique et antihyperglycémique. Ces deux plantes entrent en synergie avec le troisième constituant : le guggul (lire encadré ci-dessus).
Les investigations cliniques ont confirmé les utilisations traditionnelles de ces deux plantes, prises séparément. La guggulstérone issue du guggul est mise en avant par les chercheurs pour son potentiel dans la lutte contre la flambée de l’obésité, par ses effets réducteurs du cholestérol en excès, régulateurs de l’appétit et modulateurs de l’immunité. En ce qui concerne le faux poivre noir, il semble que cela soit l’embeline qui permette, dans les études animales, de lutter contre l’obésité en réduisant le stress oxydant et l’inflammation. Chez les animaux testés, la plante a permis une baisse du poids corporel, une réduction des lipides sanguins et une amélioration de la sensibilité à l’insuline et à la leptine, une hormone qui contrôle l’appétit et amène la sensation de satiété.
Les plantes ayurvédiques apportent des bienfaits indéniables, et il convient de mieux les connaître pour bien les utiliser. De plus en plus présentes en Occident, elles existent souvent sous forme de mélanges synergiques tels ceux décrits dans cet article.
Cette combinaison de huit plantes constitue elle aussi un remède. Elle englobe le triphala, ainsi que deux constituants du trivana et deux autres du trikatu. Plusieurs études ont été menées sur la sphère urinaire, en accord avec les utilisations traditionnelles. Des études cliniques ont aussi montré des bénéfices en cas de calculs rénaux (moins de mictions douloureuses, de difficulté à uriner et de douleurs abdominales) et une réduction de la taille de la prostate en cas d’hyperplasie bénigne de la prostate.
[lireaussi:5524]