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"Contre la maladie cœliaque, les diététiciens sont les plus armés", Véronique Liesse

Quelles sont les grandes erreurs qui empêchent de maigrir ? Quels aliments faut-il privilégier pour stimuler sa libido ou réduire son stress ? Véronique Liesse, diététicienne et nutritionniste, propose des menus spéciaux pour travailleurs pressés, une assiette type pour nourrir son énergie émotionnelle.

Lucile de la Reberdiere

Alternative Santé. Vous accompagnez les personnes qui veulent perdre du poids, stimuler leur énergie au travail ou encore préserver leur fertilité : comment la nourriture peut-elle répondre à des objectifs aussi précis, quand on sait que la nutrition n’a rien d’une science exacte ?

Véronique Liesse. Elle n’est pas une science exacte en effet. On en apprend chaque jour un peu plus. Par exemple, prenez les acides gras. On a dit, pendant des années, que les graisses saturées étaient mauvaises et que les graisses polyinsaturées étaient bonnes. Aujourd’hui, on sait que tout cela est faux. On y a apporté des nuances. On sait désormais que seuls certains acides gras saturés posent problème. Il y a aussi la composante personnelle qui intervient dans le sens où chacun a des besoins différents en fonction de son mode de vie et de sa façon d’assimiler les nutriments. Donc, c’est compliqué de faire des généralités. Cependant, il existe une série de repères concordants comme l’importance des oméga-3, indispensables, quels que soient les objectifs. Heureusement, il n’y a pas une bonne façon de manger pour avoir des enfants qui serait différente de la bonne façon de manger pour avoir de bons résultats sportifs ou pour se préserver de la maladie d’Alzheimer. Nous possédons aujourd’hui des repères alimentaires auxquels les gens peuvent se fier. Il en va de même avec l’équilibre de la glycémie. Je ne connais pas une pathologie dans laquelle il serait intéressant d’être insulinorésistant.

Quand on présente des troubles digestifs, faut-il d’abord consulter un gastro-entérologue ?

Cela dépend des cas. J’aime respecter certaines précautions. Il serait dommageable de soulager des symptômes et d’occulter une éventuelle pathologie. Si la personne qui vient me voir souffre de ­ballonnements ou de petits renvois, je peux lui proposer un suivi. Mais je dirige beaucoup les patients vers les gastro-entérologues. Inversement, ils sont nombreux à avoir compris leurs limites en termes de conseils nutritionnels et à envoyer leurs patients vers les diététiciens et diététiciennes. Malheureusement, nous ne sommes pas toujours formés pour répondre à ce type de demande. Les problèmes de candidose, de maladie de SIBO (Small Intestinal Bacterial Owergroth) ­ ­ – pullulation bactérienne de l’intestin grêle en français – ou d’intestin irritable n’étaient pas enseignés à mon époque et ça ne l’est toujours pas aujourd’hui. Par contre, une intolérance au lactose oui, la maladie cœliaque aussi. D’ailleurs, sur ces troubles, je pense que les diététiciens sont probablement plus qualifiés que les naturopathes.

Comment faire la différence entre la maladie de SIBO et le syndrome de l’intestin irritable ?

En premier lieu, par la localisation. Le SIBO concerne l’intestin grêle donc, la gêne se situe dans la partie supérieure du tube digestif. Dans le cas du syndrome de l’intestin irritable, c’est plutôt la partie basse. Dans un SIBO, on aura des ballonnements dans la partie haute assez rapidement après un repas tandis que, pour le syndrome, ça sera un peu plus tardif. Le syndrome est très lié à l’aliment, tandis que le SIBO survient avec n’importe quel aliment absorbé. La mécanique n’est pas la même. Le syndrome cache un déficit enzymatique qui affecte la façon dont on digère l’aliment, alors que le SIBO est un problème bactérien.

De nouveaux livres sur ­l’alimentation santé paraissent tous les jours. Pourquoi acheter vos livres ? Comment faites-vous la différence ?

D’abord, je m’appuie sur des études scientifiques de manière simple, compréhensible et pratique. Dans Le grand livre de l’alimentation « spécial énergie », la première partie reprend les dix principes de base d’une alimentation de santé. J’ai aussi voulu montrer que de nombreux maux du quotidien peuvent se régler dans l’assiette. Bien sûr, il n’y a pas de conseils pour des pathologies lourdes, mais des prescriptions pour une trentaine de petits tracas comme les maux de tête, les troubles digestifs, les douleurs chroniques, le stress… Je ne recommande pas l’automédication, mais face à des troubles légers de la vie de tous les jours, on peut éviter de nombreuses complications en faisant les bons repas. Avec l’assiette, on ne prend jamais de risque. Les cellules possèdent des milliers d’usines à énergie, les mitochondries. La nutri-énergie, c’est simplement de leur apporter tout ce dont elles ont besoin pour tourner.

Vous avez écrit un autre livre sur l’hormono-nutrition dans lequel vous donnez des conseils. Comment cette approche peut-elle aider à réduire la fatigue ?

Nos hormones sont centrales dans nos métabolismes énergétiques. Demandez à des femmes si elles sont au top de leur forme pendant la ménopause, ou à des personnes qui n’ont pas une thyroïde qui fonctionne à plein régime comment elles se sentent. Toutes nos hormones viennent directement ou indirectement de ce que nous ingérons. Donc oui, l’assiette est essentielle. Et c’est pour cela qu’il existe des professionnels. Il faut simplement voir que ce que l’on apporte au corps, ce sont des molécules qui sont des précurseurs de ce que lui-même fabrique naturellement. On lui donne juste un coup de pouce. La bonne démarche, c’est celle de vos lecteurs : lire des livres. Ce n’est pas simple pour le grand public de s’y retrouver. Surtout, il faut se faire accompagner pour ne pas errer sur Internet et aller à la ­rencontre de laboratoires ­inconnus. Et puis, la complémentation coûte de l’argent, c’est clair. Là aussi, la prévention est une ­décision très personnelle.

Quels aliments sont à consommer pour retrouver une bonne vitalité ?

Les épices de façon générale. Cannelle, curcuma, clou de girofle, même les piments sont des trésors antioxydants. La cannelle en cas de glycémie, c’est magnifique. Ça donne du goût et ça permet de réduire le sel.

Vous attirez l’attention du public sur les « fausses croyances », les « fausses bonnes idées » et les « erreurs fatales ». Existe-t-il tant de contre-vérités en matière ­d’alimentation ?

Plus on en sait, plus on trouve de contre-vérités. Cela semble contradictoire, mais, en réalité, plus les informations circulent, plus elles sont facilement interprétables ou transformées. De plus, la connaissance s’affine, c’est pourquoi, parfois des choses qui étaient vraies un jour ne le sont plus le lendemain. C’est bien sûr perturbant. Il faut donc rester humble et ne jamais prétendre connaître la vérité. J’essaie donc de donner les bons messages, même si je sais qu’il faut rester prudente.

Une étude affirme que le régime végétarien augmente le risque d’AVC. Comment fait-on pour rester végétarien lorsque l’on est actif ou en désir de grossesse ?

Je trouve qu’on mange trop de viande dans notre culture et j’ai un profond respect pour les personnes qui choisissent de ne pas en manger. Mais ça doit être fait au cas par cas. Quelqu’un qui a un bon stock de fer peut très bien s’en ­passer. Par contre, il est évident qu’il faut se supplémenter en ­vitamine B12. Il y a clairement des déficits potentiels. Sans poisson, les oméga-3 d’origine animale, c’est aussi un problème. Selon moi, les oméga-3 d’origine végétale ne font pas l’affaire comme l’huile de chanvre ou de lin. Nombre de végétariens pensent qu’on va transformer leur acide alphalinoléique en DHA : c’est une légende, c’est impossible. Cela se voit dans les bilans. En revanche, il existe du DHA sous forme de microalgues. Il y a toujours moyen de s’en sortir, mais il faut un suivi et une complémentation adaptée, une bonne biologie, un médecin nutritionniste qui s’intéresse vraiment au statut nutritionnel. Le zinc des végétaux c’est pareil, c’est beaucoup moins absorbé qu’avec le zinc d’origine animale. Ce n’est pas la même chose de devenir végétarien et d’arrêter de manger de la viande. Chez les personnes qui arrêtent de manger de la viande, il n’y a pas de recherche de complémentarité entre légumineuses, céréales, noix. C’est une démarche qui doit être bien réfléchie et bien mise en place. En tout cas, elle est à privilégier à l’âge adulte et à éviter chez les enfants.

Quels conseils donneriez-vous pour doper l’énergie pendant cette période parfois pesante de confinement ?

Garder de l’énergie, c’est avant tout se protéger. Prendre un complément de vitamine D me semble fondamental. Comme le dosage de la vitamine D a été déremboursé, plus personne ne sait où on en est. Donc temporairement, il n’y a pas de risque, je conseille de prendre 5000 unités par jour. Je conseille aussi de continuer à manger des crudités pour assurer des apports suffisants en vitamine C ou de se supplémenter : trois fois 200 mg par jour, c’est sans risque. Et surtout, il faut bien dormir, rire et sortir marcher !

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