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Ne leur donnez pas n'importe quelle vitamine D
La peur du rachitisme amène les pédiatres a prescrire systématiquement de la vitamine D aux nourrissons. Certaines spécialités tiennent aujourd'hui la plus grande partie du marché, c'est le cas notamment de Zyma D (synthétique, mais qui ne contient que de la vitamine D) et l'Uvestérol. Ce dernier remède couramment prescrit par les pédiatres aux enfants dont on soupçonne qu'ils pourraient être carencés en vitamine D contient, lui, une liste d'excipients longue comme le bras. Cette médication systématique a parfois des effets pervers car les parents n'hésitent pas à donner un peu plus que nécessaire. Les effets du surdosage sont parfois très handicapants.
Rachitisme et ostéomalacie
La vitamine D demeure le remède-clé contre des maladies qui semblent provenir d'un autre siècle mais qui existent encore. Les pédiatres sont très attentifs à ce sujet et il n'y a donc quasiment aucun risque pour les enfants dans les pays développés de souffrir de ce type d'affection. Toutefois, ces maladies sont toujours présentes et souvent "importées".
On décrit le rachitisme en trois stades :
- Précoce ou infra-clinique, car son expression n’est pas ostéoarticulaire (hypotonie, convulsions généralisées chez le nourrisson…).
- Floride, au cours desquels les signes osseux prédominent comme l’élargissement des zones de jonction entre corps et extrémités de certains os, particulièrement visibles au niveau des poignets et des chevilles, chapelet costal par gonflement des jonctions chondro-costales de part et d’autre du sternum, mollesse des os (indolore à la pression), fractures spontanées, retard psychomoteur majeur…
- Tardif : petite taille, déformations osseuses.
L’ostéomalacie survient bien plus tard et se caractérise d’abord par des douleurs osseuses lancinantes, principalement au niveau des hanches, mais aussi des membres et de la colonne vertébrale. Si la carence vitaminique n’est pas alors diagnostiquée et corrigée, le tableau se complète : myasthénie et sensation d’affaiblissement, déformations osseuses, fractures, crampes musculaires, picotements disséminés…
Voilà pourquoi on continue à prescrire systématiquement de la vitamine D aux enfants. Il y aurait mille autres raisons de le faire, mais on en est resté à cette vision d'après-guerre de la santé de l'enfant.
La vitamine D
et le surdosage pour les nourissons
La vitamine D est peu toxique lors de surdosage aigu. Cependant, l’exposition chronique à des quantités de vitamine D supérieures à l’apport maximal quotidien recommandé peut entraîner des symptômes toxiques incluant nausées, vomissements, anorexie, hypertension, arythmies cardiaques, calculs rénaux, insuffisance rénale et néphrocalcinose. Plusieurs des effets chroniques de la vitamine D sont dus à l’hypercalcémie résultant de l’augmentation de l’absorption du calcium par le tractus intestinal.
On estime que l’ingestion quotidienne de 2 000 à 6 300 UI/jour peut inhiber la croissance d’un enfant normal, tandis que l’ingestion quotidienne de 1 000 UI/jour pourrait causer un syndrome hypercalcémique chez des enfants hypersensibles.
La littérature scientifique fait état de plusieurs intoxications chroniques survenues chez des nourrissons auxquels des doses supra thérapeutiques ont été administrées à plus ou moins long terme. Les symptômes observés chez les nourrissons incluaient : somnolence, hypotonie, nausées, vomissements, constipation, douleurs abdominales, perte de poids, polyurie, hypercalcémie, calciurie et hypertension légère.
Quelle dose donner ?
La multiplicité des formes et des formats de vitamine D disponibles, ainsi que le manque de rigueur dans l’appellation et l’étiquetage de ces produits en vente libre contribuent à la confusion et peuvent mener à des erreurs thérapeutiques en l’absence d’implication professionnelle d'un naturopathe ou d'un pharmacien.
Synthétique ou pas les fabricants sont en général assez prudents et indiquent des doses qui ne sont pas dangereuses pour le nourrisson sur leurs étiquettes.
Les recommandation officielles en France sont :
Entre 1 et 3 ans 10 µg/j soit 400 UI/j
Entre 4 et 12 ans 5 µg/j soit 200 UI/j
Les canadiens sont plus réalistes avec les ANR (apports nutritionnels recommandés) et les AMT (apports maximum tolérés)
Grossesse et lactation
Recommandé : 800 UI (20 μg)
Maxi : 4 000 UI (100 μg)
Nourrissons 0-6 mois
Recommandé : 400 UI (10 μg)
Maxi : 1 000 UI (25 μg)
Nourrissons 7-12 mois
Recommandé : 400 UI (10 μg)
Maxi : 1 500 UI (38 μg)
Enfants 1-3 ans
Recommandé : 600 UI (15 μg)
Maxi : 2 500 UI (63 μg)
Enfants 4-8 ans
Recommandé : 600 UI (15 μg)
Maxi : 3 000 UI (75 μg)
Enfants de plus de 9 ans
Recommandé : 600 UI (15 μg)
Maxi : 4 000 UI (100 μg)
Mais on peut tout de même aller au plus simple. La posologie à la fois la plus efficace et sûre s’établirait aux alentours de 1 000 UI par tranche de 12 kg de poids corporel, même chez l’enfant.
L'Uvéstérol, l'exemple du n'importe quoi
Voici la liste des excipients qui sont mélangés avec la vitamine D de la marque Uvestérol (laboratoire Crinex)
- Propyle gallate (E310),
- Sodium hydroxyde (E524),
- Citron, Sodium édétate (E385),
- Citrique acide (E330),
- Sodium hydrogénophosphate,
- Sorbique acide (E200),
- Saccharine sodique (E954),
- Huile de ricin polyoxyéthylénée,
- Propylèneglycol (E1520),
- Glycérol (E422),
- Eau purifiée
On ne comprend pas, bien entendu, la nécessité de ces excipients dont le fabricant justifie l'emploi par leur non-dangerosité.
Entre parenthèses, le laboratoire Crinex a obtenu la suppression, par Google, de l'article que nous avions écrit pour dénoncer la nocivité de ce produit. Fort heureusement, d'autres sites ont repris notre information et vous pourrez lire cet article censuré ici par exemple.
Plusieurs alertes ont été lancées par le passé par la revue Prescrire, voici le texte de la dernière en date :
En finir avec Uvestérol pour éviter les malaises chez les nouveau-nés
L’agence du médicament et la firme ne montrent pas une prise en charge sérieuse du problème.
Après 15 ans de demi-mesures et d’atermoiements de l’Agence française du médicament et de la firme Crinex, Uvestérol expose encore les nouveau-nés et les nourrissons à des malaises parfois graves, comme le montre un cas parmi d’autres analysé en détail par Prescrire dans le cadre de son programme Éviter l'Évitable.
Ce cas est emblématique du peu de prise de conscience du risque que représentent ces malaises provoqués par la prise d'Uvestérol.
En 2013, en France, une mère a reçu une ordonnance préimprimée d’Uvestérol vitaminé ADEC. Ni le personnel soignant de la maternité, ni celui du service de protection maternelle et infantile (PMI), n’ont expliqué à la mère les modalités particulières d’administration, ni la possibilité de mélanger les vitamines au lait dans le biberon. La mère n’a pas lu la notice, et a administré Uvestérol vitaminé ADEC à l’enfant allongé en lui soulevant la tête et en vidant la pipette à piston de 1 ml sous sa langue.
Lors du signalement des malaises de type arrêt respiratoire lors de l’administration d’Uvestérol vitaminé ADEC, les soignants du service de PMI ont répondu que le problème était connu, sans prise au sérieux des malaises. Le pharmacien a déclaré connaître le problème et a répondu à la mère qu’il ne pouvait pas le remplacer par un autre médicament à base de vitamine D.
En pratique, les mises en garde officielles relatives aux modalités d’administration d’Uvestérol ne sont pas suffisantes. D'ici à ce que la firme propose enfin une nouvelle formulation de son médicament n’exposant pas à des malaises et fausses routes, mieux vaut utiliser un autre médicament à base de vitamine D qui n’expose pas à ces problèmes.
"Uvestérol : encore et encore des nouveau-nés victimes de malaises" Rev Prescrire 2014 ; 34 (367) : 352-353.
Une dernière chose
L'huile de foie de morue renferme de la vitamine D3 et on l'a longtemps donnée aux enfants pour prévenir le rachitisme.
Malheureusement, l'huile de foie de morue contient aussi beaucoup de vitamine A. Cette vitamine A en grande quantité nuit à l'action de la vitamine D.
En aucun cas les informations et conseils proposés sur le site Alternative Santé ne sont susceptibles de se substituer à une consultation ou un diagnostic formulé par un médecin ou un professionnel de santé, seuls en mesure d’évaluer adéquatement votre état de santé
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