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Maladie de Lyme et troubles neuropsychiatriques

  • Maladie de Lyme et troubles neuropsychiatriques
Article paru dans le journal nº 64

Des malades atteints de la borréliose de Lyme, cousine de la syphilis, peuvent présenter des symptômes neurologiques graves alors que leurs examens médicaux sont normaux. D’un autre côté, des personnes déjà psychologiquement troublées peuvent aussi être infectées… Pour aborder un malade déroutant, il faut donc tout prendre en compte, comme le tente une nouvelle discipline : la psycho-neuro-endocrino-immunologie.

Des personnes ont été sorties de psychiatrie grâce à un test Borrelia positif. Comme le jeune Yannick, dont le témoignage a fait l’objet d’un livre médiatisé. Souffrant le martyre en dépit d’examens médicaux normaux, il est baladé de neurologues en kinésithérapeutes, de pédiatres en pédopsychiatres. On lui administre antidépresseurs, anti-épileptiques et morphine, sans effet.

On lui reproche de simuler la douleur, et on traite ses parents avec dédain, voire avec suspicion, allant jusqu’à leur envoyer les gendarmes pour des soupçons – infondés – de maltraitance. Après neuf mois d’errance et d’hospitalisations, et alors que l’on insiste pour l’interner en hôpital psychiatrique, sa mère, infirmière, se souvient d’une piqûre de tique antérieure, avec érythème migrant. Elle entre en contact avec le Pr Christian Perronne, spécialiste de la maladie de Lyme, qui l’a traitée avec succès. Selon ce dernier, « il est plus rassurant pour un médecin de déclarer son malade fou plutôt que reconnaître son ignorance au sujet de sa maladie ».

"Une sorte de syphilis"

La borréliose est une cousine de la syphilis, elle aussi causée par des spirochètes. Ce qui interpelle, c’est que le tableau clinique de la borréliose ressemble à s’y méprendre à celui de la neurosyphilis : une évolution chronique aggravée de la syphilis, avec des symptômes neurologiques.

La syphilis était, jusqu’au début du siècle dernier, la cause la plus fréquente de démence. Avec l’arrivée de la pénicilline, elle est devenue curable. Le neurologue Houston Merritt avait déclaré, dans les années soixante : « Connaître la neurosyphilis dans tous ses aspects, c’est connaître toute la psychiatrie. » Certains auteurs s’intéressent aujourd’hui à la survivance de cette maladie. Cette bactérie (Treponema pallidum) peut affecter le système nerveux central à n’importe quel stade de la maladie, les manifestations pouvant être aussi bien progressives que brutales.

C’est dans la tête ? Peut-être, mais pas comme on l’imagine

Revenons à Borrelia. Le psychisme tient parfois une place réelle dans l’étiologie de la maladie de Lyme, et l’objectiver n’a rien d’évident. Une vision cartésienne nous conduisant à séparer le corps de l’esprit n’arrange rien, comme l’illustre le cas de cet homme de 55 ans souffrant d’une dépression chronique, avec fatigue et douleurs anciennes, mais fortement aggravées depuis quelques années. Aucun médicament ne le soulageait. Son passé traumatique plaidait pour du « tout psy ». Originaire d’un pays de l’Est, il avait connu la guerre ; il avait aussi été battu et humilié par son père. Le test pour la borréliose s’est pourtant révélé positif…

On peut souffrir de troubles psychologiques, se faire piquer par une tique et voir ses troubles s’exacerber. Il est évident que de telles personnes doivent à la fois bénéficier des soins biologiques exigés par la maladie de Lyme et d’une psychothérapie pour de se reconstruire.

Changer de paradigme

En fait, le système immunitaire et le système nerveux sont interconnectés. Un stress psychologique peut diminuer nos défenses immunitaires et nous rendre vulnérable à une infection ou en réveiller une latente, voire entraîner une rupture de tolérance avec les bactéries symbiotiques.

Réciproquement, le microbiote, qu’il soit équilibré ou non, communique avec le cerveau à travers des messages hormonaux ou nerveux, au point d’influencer la sensibilité au stress. Il serait temps que les connaissances sur la relation intestin-cerveau, qui ont explosé ces dernières années, passent concrètement dans les mœurs médicales. En attendant, pour le Pr Perronne, « les malades atteints de Lyme chronique se trouvent dans un no man’s land entre la microbiologie et la psychanalyse. »

Une nouvelle discipline se développe toutefois, qui étudie l’impact du stress sur notre organisme. Car un stress psychologique est capable de provoquer une réponse immunitaire en l’absence de tout antigène, les réseaux nerveux et lymphoïdes étant interconnectés. Ainsi, les lymphocytes peuvent être activés par des neuromédiateurs. Les infections correspondent d’ailleurs souvent aux périodes de stress… Ces interactions sont étudiées en psycho-neuro-endocrino-immunologie, discipline tentant de réunifier notre médecine trop fractionnée.

Une origine infectieuse des neuropathologies ?

Lyme laisse dans son sillage une kyrielle d’états dépressifs, de douleurs inexpliquées et même de pseudo-autisme ou pseudo-Parkinson ne répondant pas aux médicaments habituels. Toutefois, selon des recherches récentes, la borréliose serait impliquée dans les véritables Alzheimer et Parkinson. Des borrélies ont ainsi été retrouvées en nombre dans le cerveau de malades décédés.

Les chercheurs ont acquis la certitude que le microbiote joue un rôle important dans la genèse de ces maladies. Nous savons déjà que des symptômes psychiatriques peuvent être provoqués par des maladies infectieuses, mais quel est leur impact sur les tissus cérébraux lorsqu’elles se chronicisent ? La question se pose pour la sclérose en plaques, les neurotoxines des borrélies étant suspectées de s’attaquer aux gaines de myéline.

Si Lyme ne doit pas devenir l’explication à tout, la piste mérite d’être soigneusement étudiée. Étudier l’origine infectieuse de neuropathologies réputées incurables apporte de grands espoirs.

 

En aucun cas les informations et conseils proposés sur le site Alternative Santé ne sont susceptibles de se substituer à une consultation ou un diagnostic formulé par un médecin ou un professionnel de santé, seuls en mesure d’évaluer adéquatement votre état de santé