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Immunité : l'impact psy
Comment les facteurs émotionnels, les chocs psychiques peuvent-ils avoir un impact sur le système immunitaire ? Question captivante fouillée par la psycho-neuro-immunologie. Son champ d’investigation repose sur la mise en évidence d’interrelations entre les systèmes nerveux central, neuroendocrinien et immunitaire.
Le postulat de départ de la psycho-neuro-immunologie (PNI) est que les facteurs psychologiques influencent le fonctionnement du système nerveux qui va à son tour affecter le système immunitaire. En d’autres termes, des facteurs émotionnels et psychiques pourraient être responsables de pathologies. Psychologie, neuroscience, immunologie, psychiatrie, endocrinologie voire physiologie, pharmacologie, biologie cellulaire, médecine comportementale, infectiologie et rhumatologie entremêlent leurs connaissances et tissent une vision décomplexée qui met de côté des points de vue stricts et fermés. L’interdisciplinarité de la PNI considère les émotions comme des entités biologiques et physiques. Si les systèmes nerveux central et autonome, endocrinien et immunitaire étaient autrefois considérés comme indépendants, les neurosciences ont prouvé que ce sont leurs systèmes de communication qui permettent de maintenir l’équilibre interne de l’organisme.
Que dit la PNI ?
La PNI étudie l’impact de la psyché sur le système immunitaire et indirectement sur le développement des maladies. Parmi ses centres d’intérêt, figurent la relation entre le comportement et la progression des maladies immunologiques, ou l’évaluation du rôle des facteurs immunitaires dans les pathologies du système nerveux central. Les nerfs du cerveau et de la moelle épinière composent le système nerveux central tandis que le système immunitaire est composé d’organes et de cellules qui défendent le corps contre l’infection. Les deux systèmes produisent des molécules et des protéines qui peuvent agir comme messagers entre les deux systèmes. Dans le système nerveux central, ces messagers sont des hormones et des neurotransmetteurs. Le système immunitaire utilise, lui, des protéines (cytokines) pour communiquer avec le système nerveux central.
Mais comment fonctionne la communication entre psychisme, système neuroendocrinien et système immunitaire ? Les messagers chimiques véhiculent les informations par voie sanguine et/ou nerveuse (signaux de type électrique, neurotransmetteurs, hormones…), naviguent, font le lien, établissent des relations mettant en évidence l’influence du psychisme sur les systèmes endocrinien et immunitaire. Certains pourraient légitimement voir ici avérés les paradigmes multimillénaires des médecines traditionnelles (chinoise, ayurvédique…). Le va-et-vient permanent entre corps et esprit pointe l’importance de l’axe de communication intestin-cerveau via le nerf vague, de l’alimentation – pilier de notre microbiote – dont les bactéries dialoguent en permanence avec notre cerveau, de l’hygiène de vie en général et de limiter au maximum les situations de stress. Des associations de médecins et des universités se sont ouvertes à la méditation, la visualisation et à d’autres techniques dites alternatives telles que le yoga et le taï chi qui œuvrent à une prise en charge globale corps esprit de la maladie et entrent dans un processus de prévention1.
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Une nouvelle vision thérapeutique
Le laboratoire Mind & Body de la Stanford Medical School (États-Unis) étudie la façon dont les états d’esprit subjectifs telles que pensées, croyances et attentes peuvent modifier la réalité objective par le biais de mécanismes comportementaux, psychologiques et physiologiques. Le laboratoire rassemble des courants de recherche connexes et conçoit des interventions qui peuvent améliorer la santé, la performance et le bien-être (mbl.stanford.edu). Le cardiologue Kenneth Pelletier participe au programme et propose des activités adaptées aux affinités de ses patients : une méditation par le son pour l’amateur de musique, du taï chi pour celui qui aime bouger, des marches quotidiennes dans le silence pour celui qui apprécie la nature. L’impact de la pratique de ces activités sur l’état de santé des patients est étudié.
La PNI, source d’inspiration pour la psychosomatique
Le Pr Jean Benjamin Stora est psychologue, psychanalyste et psychosomaticien. Les théories psychanalytiques classiques et la médecine allopathique étant selon lui « incapables d’établir des relations entre l’esprit des patients et les maladies de leur corps », il se tourne dans les années 1980 vers la psycho-neuro-immunologie. « Nous sommes tous les jours confrontés à des excitations plus ou moins importantes. L’esprit ou système psychique est, aux côtés du système immunitaire, un deuxième système de défense [mais il] peut avoir d’importantes perturbations dans son fonctionnement, ce qui le rend incapable de traiter les excitations. Celles-ci sont alors transmises au système nerveux central qui a pour tâche, à son niveau, de les gérer. […] Lorsque les excitations persistent (par exemple événements traumatiques, deuils, etc.), l’homéostasie des organes et des fonctions est perturbée et les troubles somatiques apparaissent. »
Recherches à l’appui
On sait depuis déjà longtemps que les événements psychiques et les émotions, le stress par exemple, ont un impact sur le système nerveux central et que cela retentit directement au niveau immunitaire. De nombreuses recherches attestent d’une communication bidirectionnelle entre systèmes nerveux et immunitaire, soit directement, soit via une voie de régulation neuroendocrinienne2, 3. Elles portent pour nombre d’entre elles sur la libération de cytokines en réponse au stress physique et psychologique. Une cytokine est une molécule constituée par des glucides et des protéines. Elle est libérée par les cellules, en particulier celles de votre système immunitaire. Il existe plusieurs types de cytokines, et celles qui sont ordinairement stimulées par le stress sont appelées cytokines pro-inflammatoires. De manière générale, le corps en libère en réponse à une infection ou une blessure pour aider à la destruction des germes ou à la réparation des tissus. En cas de stress physique tant que psychologique, le corps libère aussi des hormones comme l’adrénaline et la noradrénaline. Celles-ci se lient à des récepteurs spécifiques tels les β2-adrénergiques. Une équipe de recherche de l’Inserm au Centre d’immunologie de Marseille-Luminy a entre autres découvert que ces récepteurs inhibent tout particulièrement " la réponse de certaines cellules immunitaires, les cellules Natural Killer (NK). Les récepteurs β2-adrénergiques stimulés par les hormones du stress empêchent ces Natural Killer de produire un type de cytokine particulier requis pour permettre l’élimination des virus ". Sophie Ugolini, directrice de recherche Inserm, explique : " Nous avons confirmé expérimentalement que les hormones du stress qui se lient aux récepteurs β2-adrénergiques réduisent la réponse immunitaire et que cela passe par une diminution de la production de certaines cytokines inflammatoires, requises pour l’élimination des virus. " Ces résultats participent à ouvrir des perspectives thérapeutiques. " En ciblant le récepteur β2-adrénergique, il serait en effet envisageable, dans certains contextes pathologiques, de lever les freins immunitaires provoqués par un état de stress. "4 Les études, toujours plus nombreuses, montrent combien stress, émotions et autres évènements peuvent conduire à des réactions de défense immunitaire exacerbées qui pourraient augmenter le risque de problèmes cardio-vasculaire, obésité, diabète, maladies de peau, troubles du système digestif, cancer, etc.
Les recherches en PNI ouvrent donc des perspectives sur ce qu’il est favorable de mettre en œuvre au quotidien pour encadrer, évaluer et répondre à des situations stressantes de telle sorte qu’elles génèrent des réactions immunitaires minimales voire bénéfiques et, dans un avenir que nous espérons pas trop lointain, d’agir sur les récepteurs β2-adrénergiques afin de ne pas bloquer le travail des cytokines indispensables pour lutter contre la maladie.
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Une discipline pas si récente
Ce sont les travaux de G. F. Solomon, de l’université de Californie à Los Angeles, révélés dans son article " Emotions, immunity, and disease : a speculative theoretical integration "5, qui mettent en lumière ce qu’il appelle en 1964 la " psycho-immunologie ". En 1975, le psychologue R. Ader et l’immunologiste N. Cohen de l’université de Rochester font émerger le terme " psycho-neuro-immunologie ". Mais tout ne se passe pas de l’autre côté de l’Atlantique ! La découverte des neurohormones du cerveau par le Pr Guillemin, prix Nobel de médecine en 1977, ouvre de nouveaux champs de recherche, la connexion corps esprit est établie. Les études menées par D. L. Felten en 1981 à l’Indiana University School of Medicine (États-Unis) sont cruciales pour la PNI. Elles sont détaillées dans l’ouvrage collectif Psychoneuroimmunology, de Ader, Cohen et Felten en 1981. Cet ouvrage expose le rôle des structures neuronales et des signaux des neurotransmetteurs dans la communication avec le système immunitaire, les connexions neuronales étendues avec les organes du système immunitaire, la dynamique de l’innervation sympathique noradrénergique de la rate et du thymus et la preuve de la signalisation immunitaire du système nerveux central. Le rôle des hormones dans la modulation des fonctions immunitaires, la communication bidirectionnelle entre les systèmes neuroendocrinien et immunitaire et ses implications physiologiques potentielles sont également détaillés. L’ouvrage traite enfin des influences comportementales sur la réponse immunitaire ainsi que des effets du conditionnement, du stress et des interactions sociales dans la modulation des réponses immunitaires. On peut encore remonter le temps et évoquer Aristote. Le philosophe de l’Antiquité ne défendait-il pas que psyché et corps interagissent en continu, comme une seule entité ?
Références bibliographiques
- La Méditation Transcendantale conseillée par l’AHA…, 2013 / La méditation à l’hôpital, 2020
- Stress, immunité et physiologie du système nerveux, 2002
- Psychoneuroimmunology, Sciences Direct, 2022
- Emotions, Immunity, And DiseaseA Speculative Theoretical Integration, 1964
- Quand le stress affaiblit les défenses immunitaires, 2020
En savoir plus
- J.B Stora « Quand le corps prend la relève », éd. Odile Jacob, 1999
- J.B Stora « L’être humain est une unité psychosomatique », éd. Librinova, 2021
- F.Bottacioli « Psychoneuro endocrino immunologie », éd. Marco Pietteur, 2012
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