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Chamanisme : thérapie spirituelle ou cognitive ?
Les guérisseurs, auréolés d’aptitudes mystérieuses, prétendent soigner quantité de maux, mais restent marginalisés par la médecine académique. Pourtant, deux tiers des Français en ont déjà consulté un, et certains interviennent au sein d’hôpitaux. Au-delà des préjugés, guérisseurs et science s’excluent-ils aussi irrémédiablement qu’il n'y paraît ? - Partie 5
Le chamanisme, tel qu’on le comprend en Europe, provient des steppes de l’Asie centrale, où le terme saman désigne " celui qui s’agite, qui gesticule ". Des voyageurs russes auraient propagé vers l’Ouest, à partir du XVIIe siècle, cette notion d’un " sorcier-guérisseur- augure ", intermédiaire privilégié entre les humains et les esprits, à la frontière de la médecine tribale et du paganisme. Mais le chamanisme ancestral, bien antérieur aux religions et à la médecine, a bien évolué en passant des espaces sauvages aux grandes villes.
Le rôle du son
Le chamanisme a traditionnellement recours au chant et au tambour, des sons censés participer à la guérison. Leurs vibrations bercent, harmonisent et ouvrent la réceptivité du malade aux soins qu’il reçoit. Pour certains observateurs, les chants chamaniques auraient le pouvoir de modifier le fonctionnement du corps et de l’esprit, en guidant l’auditoire vers des dimensions inconnues, jusqu’au niveau cellulaire !
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Les contours volatils du chamanisme moderne
Dans les sociétés anciennes, la maladie était comprise comme une dissociation (ou désincarnation) entre le corps et l’esprit. La personne malade voit son esprit (ou son âme) s’éloigner progressivement du corps, la mort étant le point de rupture définitif et le départ vers l’au-delà. Le rôle du chamane consistait à rétablir l’intégralité corps esprit du malade, grâce à ses dons d’incursion dans les mondes immatériels. On lui demandait aussi de traiter d’autres " revers de fortune " (une sécheresse prolongée, une période de malchance…). Car dans la compréhension ancestrale, c’est bien comme un " réparateur de bonne fortune " qu’est vu le chamane.
De nos jours, le " néochamanisme " touche plus souvent au développement personnel, à la recherche de spiritualité ou la quête d’authenticité. Cependant, une partie des guérisseurs-magnétiseurs confessent recourir à la médiumnité, que certains revêtent volontiers des habits du chamanisme (question de tendance ?). Il s’agit dans ce cas de libérer le patient d’une " influence énergétique " en lien avec un ascendant, ou un autre défunt, de se défaire d’une " entité " (ou âme désincarnée ou âme errante) parasite. Et quelquefois de s’en faire le porte- parole pour la délivrance d’un message. La médiumnité est cependant une représentation qui est loin de faire consensus chez les magnétiseurs, tous n’acceptant pas l’idée de cette dimension qui permettrait de percevoir, et moins encore de communiquer avec des " esprits ".
La transe chamanique : une ouverture, mais sur quoi ?
L’état de transe a longtemps été considéré comme une condition psychopathologique. Quand Corine Sombrun (ethno- musicienne et autrice, à l’origine du film Un monde plus grand), revient de Mongolie après une première expérience spontanée de transe, le premier médecin auquel elle se confie lui tend la carte d’un psychiatre ! Plus tard, lorsqu'elle maîtrise l’auto-induction de la transe, elle parvient à intéresser des chercheurs canadiens, qui peu à peu, établissent qu’il s’agit d’une manifestation cognitive, somme toute proche de l’hypnose et de la méditation, et non d’une pathologie comme la schizophrénie ou le syndrome de personnalité multiple. Mais qui ouvre sur quoi ? Une autre dimension ou de pures hallucinations ? L’incroyable périple de Puységur, un militaire contemporain du Dr Mesmer et initialement instruit par lui, jette un peu plus le trouble ; Puységur plongeait ses sujets dans un état proche du somnambulisme, d’où ils auraient été capables de voir à l’intérieur de leur propre corps et celui des autres, et de faire des prédictions. Ses résultats, qu’il relate nombreux et constants, lui feront dire qu’il pensait avoir fait apparaître une dimension jusqu’alors inconnue de la nature de l’homme. Quand d’autres, plus tard, invoqueront un effet de contexte et enterreront ces prémices sous l’édifice naissant de la psychologie moderne.
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Une dimension complémentaire dans le processus de guérison ?
On reproche souvent à la médecine académique de ne s’occuper que du corps du malade, sans s’interroger sur ce qui est en souffrance dans son être ou dans sa vie. C’est sur ce terrain du rapport à soi et au monde que le chamanisme peut contribuer à la guérison. Par l’induction d’une transe, qui est en fait un état modifié de conscience, il donne accès à la « face immergée de l’iceberg », libérant des ressorts cognitifs insoupçonnés, comme des intuitions, des visions, des souvenirs… Bref, tout un monde éthérique, souvent enchanté, quelquefois effrayant, qui constitue le « voyage chamanique » et offre la possibilité d’évoluer, ce qui est souvent un corollaire nécessaire pour guérir vraiment.
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