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Physiologie et physiopathologie du jeûne
Il n’est quasiment plus un thérapeute qui ne conseille aujourd’hui le jeûne comme outil thérapeutique. Il n’est qu’à voir les religions qui ont toutes inclus le jeûne comme pratique obligatoire. C’est qu’elles ont bien compris l’intérêt sanitaire du jeûne. De tout temps, il a accompagné l’humanité et semble, à juste titre, retrouver enfin ses lettres de noblesse.
- Partie 4
Un ensemble de réactions biochimiques est nécessaire pour que les différents systèmes indispensables à la pérennisation du processus vital fonctionnent de façon optimale, quelles que soient les stimulations environnementales.
Au repos, seules les fonctions essentielles continuent d’œuvrer. Les dépenses énergétiques qu’elles causent, représentent environ 70 % du métabolisme total, en contexte ordinaire. Elles sont regroupées sous les vocables de dépense énergétique de repos (DER) ou de métabolisme de base (MdB).
Du fait que les apports alimentaires sont périodiques voire irréguliers, l’organisme stocke les substrats énergétiques (glucides, lipides, protéines) ingérés en excès au moment des repas, puis puise dans ces mêmes réserves tout au long de la journée et de la nuit, en fonction des besoins de l’instant.
En cas de disette ou de restriction calorique volontaire, la seconde phase de cette programmation est amenée à durer plus longtemps avec, pour conséquences, des effets sur l’organisme très spécifiques.
Trois définitions importantes
Glycogénolyse : production de glucose à partir du glycogène qui est la forme de stockage du glucose dans le foie.
Néoglucogenèse : production de glucose à partir de substance non glucidique comme le pyruvate, le lactate, le glycérol et la majorité des acides aminés.
Lipolyse : décomposition des graisses en acides gras et en glycérol.
Modifications biochimiques induites par le jeûne
Physiologiquement, pendant la nuit, les besoins énergétiques de repos sont satisfaits grâce à l’oxydation des glucides pour environ 40 à 50 %, des lipides pour 30 à 40 % et des acides aminés pour seulement 15 à 20 %.
Dès que le jeûne dépasse la demi-journée, la DER diminue et plus le jeûne dure, plus la DER continue de diminuer jusqu’à se stabiliser aux alentours des 60 % de sa valeur de départ.
La production de glucose qui est assurée par le foie provient d’abord, à peu près à parts égales, de la glycogénolyse et de la néoglucogenèse, puis après épuisement des réserves en glycogène (c’est-à-dire au bout de 24 à 36 heures), de plus en plus de la néoglucogenèse. Rapidement, la production de glucose baisse ainsi que son utilisation. Ainsi, la consommation de glucose au niveau cérébral diminue des deux tiers en 8 jours et est divisée par six au bout de 40 jours.
L’insuline est moins sécrétée, ce qui stimule la lipolyse. Les acides gras ainsi libérés sont transformés en corps cétoniques par le foie et les muscles afin de produire l’énergie nécessaire à tout l’organisme et notamment au cerveau. Dans le même temps, la sécrétion de glucagon augmente, ce qui incite le foie à la glycogénolyse, à la néoglucogenèse et à la cétogenèse.
La thyroxine (T4) est inactivée sous forme de 3,3’,5’-triiodothyronine (T3 inverse), ce qui réduit le métabolisme de base.
Le foie et les corps cétoniques
Au nombre de trois, ce sont les produits de dégradation des acides gras par le foie : l'acétylacétate (AcAc), l'acide bête-hydroxybutyrique (BHB) et l'acétone. Les deux premiers servent de carburants pour le cerveau et le coeur. L'acétone, produit de dégradation de l'acétylacétate, est éliminée par les voies naturelles, dont l'haleine qui prend une odeur acidulée. Leur production est permanente, à un niveau faible toutefois. Elle augemente lors du jeûne dès que celui-ci est mené de façon prudente. Au cours du diabète de type 1, suite à une injection insuffisante d'nsuline, u à l'occasion d'un épisode infectieux, la production de ces corps cétoniques s'emballe, les taux sanguins de glucose et de cétones grimpent, le pH passe en acidose qui peut conduire à la mort, si elle n'est pas rapidement contrôlée.
Dans le même temps, les réserves protéiques, majoritairement stockées dans les muscles, sont mises à contribution par le foie afin de produire du glucose. La protéolyse est supérieure à la protéosynthèse avec, pour manifestation principale, une baisse progressive de la masse musculaire.
Tous ces phénomènes diminuent d’intensité avec le temps, de sorte que l’être humain, sain et de poids normal, est capable de survivre à un jeûne de 60 jours et parfois plus.
Au niveau cérébral, dans un premier temps, la sécrétion de plusieurs neuromédiateurs est stimulée (dopamine, noradrénaline, sérotonine) avec pour effets, un sentiment d’euphorie et d’excitation et une tendance à l’hyperactivité physique.
Puis, lorsque les réserves lipidiques et protéiques sont bien entamées, cette sécrétion est amoindrie, ce qui se traduit cliniquement par des troubles de l’humeur (baisse du seuil de tolérance au stress, anxiété, pensées dépressives), du sommeil (difficultés à l’endormissement, réveils nocturnes, etc.), de l’attention et de la concentration.
Dans le même temps, la sensation de faim réapparaît et doit être impérativement respectée sinon une anémie sévère s’installe (conséquence du manque de fer et de vitamines B9 et B12, éventuellement), le capital osseux diminue et le tissu hépatique se fibrose…
Plus tard encore, quand les réserves lipidiques sont épuisées, l’organisme puise l’énergie nécessaire dans les stocks protéiques restants. À ce stade, la dénutrition est irréversible du fait des nombreux troubles qui l’accompagnent telles que la chute de l’IMC (au-dessous de 13 chez l’homme et de 11 chez la femme), les carences en micronutriments, le désordre hydro-électrolytique et les manifestations cardiaques pathologiques. La mort est alors inéluctable.
Modifications cliniques induites par le jeûne
Sur le plan clinique, les manifestations du jeûne sont, elles aussi, multiples et varient fortement selon sa durée.
Au cours des premiers jours, ce sont surtout :
- Langue saburrale, haleine de bonbon anglais (acidulée), constipation.
- Sensation de mal-être, difficulté de concentration, voire maux de tête.
- Frilosité, fatigue.
- Hypotension orthostatique responsable de malaises à type de vertiges.
Puis, ce cap étant passé :
- Sensation de légèreté, d’acuité intellectuelle accrue, de clarté de la pensée,
- Amélioration de la qualité du sommeil : au terme d’un jeûne de sept jours, des sujets sans surpoids sont moins sujets aux réveils nocturnes.
- Amaigrissement affectant d’autant plus la masse musculaire qu’une activité physique minimale n’est pas pratiquée dans le même temps.
- Aggravation des déficits micronutritionnels préexistants au risque de créer de véritables états carentiels.
À plus long terme, notamment lors des jeûnes politiques et ascétiques :
- Réapparition torturante de la faim,
- Inversion de l’humeur avec irritabilité, angoisse, dépression,
- Troubles du sommeil,
- Difficulté de concentration, etc.
La reprise alimentaire peut être marquée par :
- Des douleurs abdominales ou/et de la diarrhée, symptômes qui ralentissent la reprise pondérale.
- Le retour au poids initial, une augmentation de la masse grasse et une diminution de la masse maigre, surtout si, préalablement, un surpoids existait. La principale conséquence est alors la diminution des dépenses énergétiques qui favorise la prise de quelques kilos supplémentaires (de la même façon que les « kilos yoyo » s’ajoutent à la fin de chaque régime amaigrissant).
L’intensité de ces différentes manifestations est toujours proportionnelle à la durée du jeûne et à son degré de sévérité.
En d’autres termes, un jeûne court produit plus d’effets bénéfiques que d’inconvénients, mais on observe qu’un jeûne long a pour conséquence majeure une inversion de la balance bénéfices-inconvénients.
le jeûne cultuel et la préservation de la santé
De nombreuses dérogations au jeûne cultuel existent afin d’éviter de mettre en danger la santé des personnes fragiles. Parallèlement, quelques études sont menées afin d’évaluer les allégations de ces différents types de jeûnes.
Ainsi, il a été établi que…
- Le jeûne de Daniel chez les chrétiens améliore les chiffres tensionnels, le profil des graisses dans le sang, la sensibilité à l’insuline et réduit le stress oxydatif.
- Le ramadan, quand il est rigoureusement suivi, stimule la diversité alimentaire et présente les mêmes avantages que le jeûne 16/8, notamment la perte de poids.
Les réserves énergétiques de l’organisme
Chez une personne de 70 kg, les réserves se répartissent ainsi :
• Glucose (dans les liquides circulants, sang notamment) : 80 Kcal soit 20 g
• Glycogène (dans le foie et les muscles) : de 200 à 400 Kcal soit de 70 à 120 g
• Protéines (dans les muscles) : 25 000 Kcal soit 6 kg
• Triglycérides (dans le tissu adipeux blanc) : 108 000 Kcal soit 12 kg
Au vu de cette répartition, il est évident que la production d’énergie à partir du glucose doit être rapidement relayée par la voie des cétones.
En aucun cas les informations et conseils proposés sur le site Alternative Santé ne sont susceptibles de se substituer à une consultation ou un diagnostic formulé par un médecin ou un professionnel de santé, seuls en mesure d’évaluer adéquatement votre état de santé
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