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Stratagème placebo :
une efficacité déstabilisante
Le placebo et son effet associé, utilisé dès l’Antiquité, a depuis été maintes fois éprouvé par l’analyse scientifique moderne. Les chercheurs, qui ont identifié ses ressorts psychologiques et les conditions de son efficacité, ont également cerné ses risques et ses effets secondaires.
Administré à des patients, un placebo peut diminuer sensiblement la douleur aiguë ou chronique, l’intensité de la migraine, la dépression, le rejet social. Il est aussi capable de ralentir la fréquence cardiaque et les chiffres tensionnels quand ceux-ci sont élevés, de régulariser les constantes biologiques et parfois même d’améliorer les affections dites incurables. Toutefois, son effet n’est pas prévisible comme l’est l’effet pharmacologique, et son action dans le temps est plus courte.
Les ressorts psychologiques qu’il active sont plus que mystérieux : si l’effet placebo est nettement plus puissant lorsque le patient ne sait pas qu’il est manipulé par son soignant, il reste loin d’être insignifiant quand la personne est avertie que ce qu’on lui administre est ou n’est qu’un placebo… Mieux encore : lorsqu’il est donné à des volontaires sains, le placebo induit des manifestations chez 15 à 30 % d’entre eux !
Ces exemples issus des innombrables études dédiées au phénomène placebo ont conclu à son indéniable efficacité chez les sujets répondeurs. Une efficacité telle que certaines firmes pharmaceutiques ont même stoppé la recherche de médicaments, car parvenir à démontrer que de nouvelles molécules sont réellement plus efficaces qu’un placebo est devenu de plus en plus difficile.
Êtes-vous un sujet répondeur ?
Le placebo n’induit un effet que chez un certain pourcentage de la population tout venant. Ce qui a permis d’identifier les critères des sujets répondeurs comparativement aux patients ordinaires. À ce jour, ont été retenus :
- La prédisposition génétique : un gène, au moins, détermine le niveau de réponse au placebo. Selon le variant (mutation génétique ne s’exprimant que dans un contexte spécifique), l’amélioration des symptômes peut être doublée comparativement à celle observée avec d’autres variants.
- Le jeune âge : chez l’enfant, l’effet placebo fonctionne plus fréquemment et plus intensément qu’à l’âge adulte ; on relève environ 20 % de sujets répondeurs chez les enfants contre seulement 10 % chez les adultes. En cas d’épilepsie, le sujet répondeur est défini par une diminution d’au moins 50 % de l’incidence des crises.
- Un tempérament « droit » moralement, altruiste et facilement résilient : les patients présentant ce profil sont nettement plus répondeurs que les personnes colériques et/ou hostiles.
Efficacité, effets secondaires et risques non négligeables
Les médicaments allopathiques sont réputés pour engendrer un certain nombre d’effets indésirables, parfois sévères. Aussi, de façon tout à fait similaire, la prise d’un placebo peut provoquer les effets secondaires listés sur la notice du médicament qu’il remplace symboliquement… Le placebo (à la programmation « Je plairai ») peut être alors un nocebo (« Je nuirai »).
L’utilisation d’un placebo comporte également des risques. Le Dr Patrick Lemoine, docteur en neuroscience et psychiatre spécialisé dans l’exploration et la prise en charge des troubles du sommeil et de la dépression, les a décrits dans son livre, Le mystère du placebo (éd. Odile Jacob, 1996) :
- La plainte est liée à une pathologie constituée et la réponse au placebo est négative ; certainement la situation la plus simple, car le médecin continue les investigations nécessaires et indispensables.
- La plainte est liée à une pathologie constituée et la réponse au placebo est positive ; le risque, alors, est de considérer la pathologie comme une non-pathologie et de la laisser évoluer.
- La plainte n’est pas liée à une pathologie constituée et la réponse au placebo est positive ; le patient risque de s’installer dans la croyance que ses troubles fonctionnels sont liés à une pathologie constituée.
- La plainte n’est pas liée à une pathologie constituée et la réponse au placebo est négative : le médecin risque de s’épuiser à chercher une cause organique là où il n’y en a pas.
Selon le Dr Patrick Lemoine, « le placebo est un pur mensonge, un ectoplasme de pharmacie, une apparence de médicament, un simulacre de comprimé. […] Si, autrefois, le placebo était utilisé comme médicament, de nos jours ce sont les médicaments eux-mêmes qui servent de placebo. […] À l’image de monsieur Jourdain, la médecine occidentale pratique la placebothérapie sans le savoir. Ou plutôt, sans vouloir le savoir. »
À médecin inspiré, remède efficace ?
Quelle que soit son appellation, le soignant est vécu comme un possible thaumaturge, un faiseur de miracles. Corollaire : son patient doit ressentir que la confiance qu’il investit est bien fondée, c’est-à-dire que le thérapeute a identifié le mal et sait comment le traiter, si possible efficacement et rapidement.
Ainsi Jean-Nicolas Corvisart, médecin personnel de Napoléon 1er, répondit aux demandes insistantes des dames de la cour qui souffraient de constipation en leur prescrivant Mica panis (de la mie de pain). Il reçut en retour remerciements et éloges, car cette préparation leur avait procuré un réel soulagement. Comment Corvisart eut l’idée d’un tel artifice, nul ne le sait !
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