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L’hypothyroïdie concerne plus de 10 % de la population en France

  • Dr  Philippe VeroliDr Philippe Veroli
Article paru dans le journal nº 123

Dans son récent ouvrage*, le Dr Philippe Veroli rappelle l’importance, pour une bonne santé globale, du bon fonctionnement de la thyroïde. Il se penche plus particulièrement sur un dysfonctionnement de plus en plus répandu dans la population : l’hypothyroïdie. Il souligne les limites des bilans sanguins réalisés traditionnellement et met en avant les examens complémentaires permettant d’affiner le diagnostic et de cibler le bon traitement.

Pouvez-vous rappeler ce qu’est l’hypothyroïdie ?

L’hypothyroïdie se définit comme une insuffisance de la fonction thyroïdienne. Insuffisance qui peut être due soit à un défaut de production hormonale par la glande thyroïde, soit à une inefficacité des hormones thyroïdiennes. Autrement dit, soit la thyroïde ne fabrique pas assez d’hormones, soit celles-ci ne peuvent pas exercer leurs effets correctement. Et là, il y a plusieurs raisons que je détaille dans le livre. L’hypothyroïdie est un véritable enjeu de santé publique qui concerne environ 200 millions de personnes dans le monde. En France, un peu plus de 10 % de la population est atteinte et, après la ménopause, cela touche environ 15 % des femmes.

L’équilibre thyroïdien est-il si fragile ?

Chez un individu en bonne santé, cet équilibre se maintient très bien et de façon très naturelle. Les problèmes commencent lorsque la thyroïde se met à dysfonctionner. Si l’on se focalise sur l’hypothyroïdie, la réponse relativement univoque apportée par la médecine conventionnelle est de donner des hormones thyroïdiennes. Cette réponse peut être nécessaire mais peut aussi s’avérer trop simpliste.

En se penchant sur les mécanismes de fonctionnement de la thyroïde, on comprend qu’il est possible, dans certains cas, d’améliorer la situation autrement. Il y a notamment tout un pan nutritionnel qui est en général insuffisamment abordé.

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Vous évoquez dans votre ouvrage les examens sanguins classiques qui ne reflètent pas toujours l’état de la thyroïde…

Oui. Lorsque quelqu’un est " suspecté " d’hypothyroïdie, le premier examen à faire est le dosage de la TSH (thyréostimuline) qui est une hormone hypophysaire. L’hypophyse est une glande située dans le cerveau, qui commande la thyroïde. L’hypophyse produit la TSH qui va elle-même commander le fonctionnement de la thyroïde. Le mécanisme est assez simple : quand la thyroïde ne produit pas assez d’hormones, la production de TSH par l’hypophyse va augmenter pour stimuler davantage la thyroïde, et quand le taux d’hormones thyroïdiennes augmente, l’hypophyse va diminuer la sécrétion de TSH. C’est ce qu’on appelle un rétrocontrôle : c’est le taux d’hormones thyroïdiennes dans le sang qui informe l’hypophyse qu’il n’y en a pas suffisamment ou qu’il y en a trop. Le dosage de la TSH donne, le plus souvent, une idée fidèle du fonctionnement de la thyroïde.

À partir de quel moment ce dosage devient-il insuffisant ?

Il faut savoir que la TSH a des limites de normalité assez larges. En l’occurrence, cela s’échelonne de 0,3 à 4 mUI/l (micro-unités internationales par litre de sang). Dans cette grande fourchette de normalité, chaque personne a une valeur optimum propre de la TSH. La valeur optimale pour une personne n’est pas forcément la même pour une autre. Ainsi, le fait d’être dans cette fourchette ne signifie pas systématiquement que c’est le mieux pour vous. Il ne suffit pas de dire " votre TSH est dans les normes, donc votre thyroïde va bien ".

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Hypothyroïdie : quels examens complémentaires peuvent aider  ?

Hypothyroidie quels examens complémentaires ?

Au lieu de se focaliser sur l’évaluation de la TSH, qui est un dosage (donc une appréciation) indirect du fonctionnement de la thyroïde, il est possible de doser directement les hormones thyroïdiennes. Ceci afin d’avoir une idée plus exacte de ce que fait la thyroïde elle-même. La thyroïde fabrique trois types d’hormones : la T3, la T4 et la thyrocalcitonine. La T3 et la T4, qu’on appelle classiquement les hormones thyroïdiennes, s’occupent de toutes les fonctions thyroïdiennes.

Grossièrement, la thyroïde joue un rôle de thermostat de l’organisme et régule tout le métabolisme. La thyrocalcitonine contrôle, quant à elle, le métabolisme phosphocalcique : elle régule le calcium dans l’organisme. C’est une fonction extrêmement importante, qui n’a rien à voir avec les deux autres hormones T3 et T4. Classiquement, lorsque l’on évoque les hormones thyroïdiennes, on parle de la T3 et de la T4, et on ne tient pas compte de la thyrocalcitonine.

En quoi la T3 et la T4 nous intéressent-elles tout particulièrement ?

La thyroïde fabrique à 90 % de la T4 et à 10 % de la T3. Si le dosage de la T4 révèle qu’il n’y en a pas assez, on est en situation d’hypothyroïdie. Mais là où cela se complique un petit peu, c’est que la T4 n’est pas l’hormone active. L’hormone active est la T3, qui n’est que faiblement fabriquée par la thyroïde. Sa production s’effectue principalement ailleurs dans le corps, en particulier dans le foie. En bref, la T4 est transformée en T3 qui est l’hormone active.

Vous pouvez par exemple avoir suffisamment de T4 parce que votre thyroïde fonctionne bien, mais être déficitaire en T3 parce que la T4 n’est pas transformée en T3. Votre fonction thyroïdienne ne sera pas bonne, non pas parce que la thyroïde ne marche pas mais parce que la T4 n’est pas bien transformée en T3. Le problème n’est, par conséquent, pas dans la thyroïde mais, dans cet exemple, dans le foie. Et dans ces cas-là, vous allez présenter des signes d’hypothyroïdie.

Ces examens visant la T3 et la T4 sont-ils réalisés systématiquement ?

Non. En fait, il y a même des recommandations officielles qui incitent à ne doser que la TSH. Il arrive que la T4 soit dosée mais la T3 l’est rarement, ce qui est dommage. Or, pour comprendre ce qu’il se passe, il faut certes doser la TSH mais également la T3 et la T4…

À quel moment est-il possible d’associer des hormones à des accompagnement naturels ?

Thyroide ; alimentation saine

Si votre médecin vous diagnostique une hypothyroïdie, le plus souvent, sa première réaction, qu’il soit généraliste ou endocrinologue, va être de vous donner de la lévothyroxine, c’est-à-dire de l’hormone T4. Cependant, et c’est ce que je souligne entre autres dans le livre, il est dommage, à ce stade, de ne pas vérifier d’éventuels déficits en nutriments. En rétablissant une bonne hygiène alimentaire et nutritionnelle, on va parfois pouvoir résoudre le problème et se passer de médicaments.

La première chose à faire pour avoir une bonne santé thyroïdienne est de miser sur une alimentation riche en nutriments, en vitamines, et en évitant le plus possible les produits indésirables contenant des polluants. C’est malheureusement de plus en plus fréquent dans le monde moderne avec la hausse des perturbateurs endocriniens ou des métaux lourds.

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Que faire si l’on sent que l’on présente des symptômes de l’hypothyroïdie mais que le dosage de la TSH est dans les normes ?

La première démarche à entreprendre est d’aller voir son médecin, qui va procéder à un examen clinique et étudier les symptômes. Ces symptômes peuvent être variés puisque la thyroïde s’occupe de tout le métabolisme de base, qui correspond aux besoins énergétiques " incompressibles " de l’organisme. On peut donc ressentir de la fatigue, de la dépression, être constipé, avoir un peu trop de cholestérol, on peut être frileux, etc. Les désagréments peuvent être nombreux et divers. La première approche est de faire un dosage de la TSH. Puis c’est au médecin, sur la base des symptômes et des examens, de pousser les investigations et de demander un dosage un peu plus précis de la T3 et de la T4.

Si le dosage révèle une faiblesse, quelles sont les solutions ?

Pour faire son travail, la thyroïde a besoin de recevoir suffisamment de nutriments. Parmi ces nutriments, on peut citer l’iode, les vitamines (B, D, A, E) et les minéraux (sélénium, zinc, magnésium, fer, etc.). Si vous présentez des déficiences dans ces nutriments, cela peut suffire à expliquer que votre thyroïde ne fonctionne pas correctement. Je le répète, avant de prescrire des hormones thyroïdiennes, il faut d’abord explorer la possibilité d’un déficit en nutriments. Si l’iode était déficitaire et qu’une supplémentation suffit, alors la thyroïde va pouvoir fabriquer des hormones en bonne quantité et il n’y aura pas besoin de médicaments. Si les apports en nutriments sont suffisants et que cela ne va toujours pas, alors la prise de médicaments peut être envisagée.

La déficience en iode est-elle fréquente ?

Hypothyroidie et déficience en iode

Oui, elle n’est pas rare du tout. De nombreuses personnes ont une thyroïde paresseuse à cause d’un déficit en iode. Ces carences étaient, il y a quelques années, devenues plus rares dans la population grâce à la supplémentation en iode dans le sel alimentaire. Le sel n’étant pas bon pour la santé, les individus en consomment moins (ce qui est bien) et de ce fait ingèrent aussi moins d’iode. Je rappelle que l’on trouve de l’iode dans les produits de la mer (poissons, fruits de mer, algues).

Il faut savoir que l’iode appartient à la famille chimique des halogènes, qui inclut également le fluor, le brome et le chlore. Les différents halogènes se conduisent chimiquement de façon très similaire et se fixent sur des récepteurs identiques dans notre corps. Si l’alimentation d’une personne est déficiente en iode, ces récepteurs seront occupés par un autre membre de cette famille chimique, et la synthèse des hormones thyroïdiennes ne pourra pas se faire correctement.

Il existe bien sûr des maladies de la thyroïde dans lesquelles un apport iodé ne permettra pas à lui seul de rétablir la situation. Des hormones seront nécessaires.

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Pourquoi la médecine n’est-elle pas au fait de ces besoins de supplémentations ?

Il existe des domaines dans lesquels la médecine conventionnelle l’a compris. Une femme enceinte, par exemple, se verra systématiquement prescrire de la vitamine B9 (des folates) parce qu’il est reconnu, pour plein de raisons, que les folates sont importants. Concernant l’iode, il y a des recommandations officielles attestant que les apports en iode de la femme enceinte doivent être supérieurs à ceux d’une femme non enceinte. Les hormones thyroïdiennes sont, en effet, importantes lors de la grossesse car elles participent à la maturation du cerveau du fœtus.

L’alimentation moderne industrielle est extrêmement pauvre en nutriments et entraîne naturellement des carences, encore plus chez la femme enceinte, qui doit manger pour deux. Une nutrition de très bonne qualité pourrait suffire, encore faudrait-il le vérifier par des bilans. Dans le cas de l’iode, un simple dosage de l’iode urinaire pourrait être réalisé… Il est pourtant encore bien rare qu’on supplémente une femme enceinte en iode alors que ce sont des notions bien établies scientifiquement. La situation est peu similaire pour la vitamine D.

C’est-à-dire ?

Tout le monde ou presque est en manque de vitamine D. D’ailleurs, se supplémenter seulement en hiver ne suffit pas à maintenir un bon taux de vitamine D toute l’année. Si vous êtes carencé en vitamine D, votre thyroïde ne pourra pas fonctionner de façon optimale et votre santé ne sera pas parfaite. Or cette vitamine D n’est que rarement dosée par les médecins. Il y a même des recommandations invitant à ne pas la doser parce que cela coûte trop cher. À un moment donné, la littérature scientifique a insisté sur l’importance de cette vitamine et sur la carence générale de la population. Les dosages ont alors augmenté en flèche et, dans la foulée, les dépenses de l’assurance maladie. Face au fameux trou de la Sécu, la solution a finalement consisté à ne plus rembourser ce dosage (sauf dans des circonstances très particulières). C’est ce qui a incité les médecins à moins prescrire cette vitamine et à moins la faire doser. Ceci est un bel exemple de système D pour réduire les dépenses  !

Zoom sur la thyroïdite d'Hashimoto

thyroïdite d'Hashimoto

Votre livre apporte aussi des éclaircissements sur l’importance de l’intestin dans la santé thyroïdienne, avec un focus sur la maladie de Hashimoto. Pouvez-vous préciser ?

La maladie de Hashimoto est une hypothyroïdie très fréquente. Comme il s’agit d’une maladie auto-immune dans laquelle la thyroïde est détruite par le système immunitaire de la personne, la seule réponse du corps médical est de donner des hormones thyroïdiennes pour compenser la perte de la thyroïde. De mon point de vue, il serait aussi important de prendre en compte l’état auto-immun de la personne malade. Et ceci passe notamment par un rétablissement de la bonne marche de la barrière intestinale. Il existe un axe intestin-thyroïde qui mériterait d’être davantage connu par le corps médical.

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De quelle façon la barrière intestinale influence-t-elle la thyroïde ?

La muqueuse intestinale absorbe les nutriments nécessaires à notre santé. Elle possède pour ce faire une perméabilité adaptée, autorisant le passage de ces nutriments. Mais elle se comporte aussi comme une barrière empêchant l’entrée dans l’organisme de grosses molécules indésirables. Parfois, la perméabilité de cette barrière intestinale est altérée, probablement à cause de notre alimentation industrielle. Ces molécules qui n’auraient pas dû passer de la lumière intestinale à l’intérieur du corps sont reconnues comme étrangères par le système immunitaire, très présent au niveau du tube digestif.

Le système immunitaire va fabriquer des anticorps qui vont s’attaquer à ces grosses molécules, mais aussi à d’autres tissus de l’organisme (par un mécanisme de mimétisme moléculaire). Et en particulier à des structures thyroïdiennes. C’est par ce processus un peu subtil, qui a été bien décrit, que des anticorps vont aller attaquer la thyroïde. En rétablissement cette perméabilité, il est possible de jouer sur la bonne santé de la thyroïde. Miser sur une alimentation saine et non transformée est donc capital pour le bon fonctionnement de la thyroïde et pour le mieux-être global du corps.

Pour en savoir plus sur les meilleures solutions naturelles pour accompagner un trouble de la thyroïde, lisez également notre hors-série Prendre soin de sa thyroïde au naturel.

 

Le guide complet de l’hypothyroïdie, du Dr Philippe Veroli, éd. Thierry Souccar, 256 pages, 21,90 €.

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En aucun cas les informations et conseils proposés sur le site Alternative Santé ne sont susceptibles de se substituer à une consultation ou un diagnostic formulé par un médecin ou un professionnel de santé, seuls en mesure d’évaluer adéquatement votre état de santé


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