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Santé mentale : La grande délaissée
On n’a jamais autant parlé de santé mentale que cette année… Le mal-être de beaucoup de Français a émergé si massivement qu’il a bien fallu aux pouvoirs publics le prendre en considération. Un petit état des lieux n’est pas de trop.
Impossible d’ignorer les troubles du sommeil et de l'alimentation, l’anxiété, l’humeur dépressive, l’isolement, l’irritabilité, la violence… relatés à l’hôpital, chez les médecins, psychiatres et psychologues qui ont vu exploser leur carnet de rendez-vous ! Parler du coupable serait inutile, on le connaît et on rêve tous qu’il ne soit qu’un lointain souvenir. Comment ne pas flancher sous le poids de la pression des mesures prises qui nous ont obligés aux confinements et mesures barrières ? Peur de la maladie, manque de contacts avec nos proches, de perspectives d’avenir, perte de repères et de confiance entretenues par les cafouillages et décisions contradictoires… Il n’est pas exagéré de parler de souffrance face à ce vide sidéral de perspectives positives !
La santé mentale en question
Selon l’OMS, la santé mentale englobe « la promotion du bien-être, la prévention des troubles mentaux, le traitement et la réadaptation des personnes atteintes de ces troubles »1. La santé mentale fait pleinement partie de la santé, sans elle, on ne peut pas parler de santé. Beaucoup associent santé mentale et psychiatrie, mais attention de ne pas tout mélanger. La santé mentale est bien plus que l’absence de troubles ou handicaps mentaux. Une personne en bonne santé mentale est en capacité de surmonter les aléas de la vie, d’avancer sur son chemin en accomplissant ce qui lui est nécessaire pour être autonome et participer à la vie sociale en ressentant un certain bien-être. Autant dire que nous ne sommes pas tous égaux face à ces critères… De nombreux facteurs biologiques, psychologiques et sociaux sont déterminants. On connaît les dégâts considérables de la pauvreté, des guerres, des catastrophes naturelles, du manque d’instruction, de l’isolement, des conditions de travail et de vie exécrables, du chômage, des discriminations (religieuses, envers les femmes, personnes atteintes de handicaps, homosexuels, transgenres, etc.), de la malnutrition, des toxicomanies et abus d’alcool, des violences et violations des droits de l’homme, la liste est longue. Certains profils psychologiques et traits de personnalité prédisposent malheureusement aux troubles mentaux et des causes biologiques tels que les facteurs génétiques contribuant à des déséquilibres chimiques du cerveau peuvent en être responsables. Agir de manière bénéfique sur la santé mentale est donc un vaste programme qui doit prendre en considération l’éducation, l’emploi, la justice, les transports, l’environnement, le logement, la protection sociale et des droits, le handicap, le vieillissement, l’alimentation, l’activité physique, la culture, tout ce qui peut créer des conditions de vie acceptables.
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Comment la définir ?
Une personne atteinte de maladie mentale subit des changements qui affectent pensée, émotions, humeur et comportement, responsables de souffrance et de détresse. Seul un professionnel de santé, qui considère l’ensemble des signes et symptômes (tristesse, euphorie, anxiété, insomnie, difficultés de concentration, désorganisation, addictions, perte de mémoire, perte d’appétit, nausées, étourdissements) peut poser un diagnostic. Parmi les maladies mentales les plus connues, on compte : le trouble anxieux, le trouble panique et agoraphobique, celui de la personnalité limite, de l'obsessionnel-compulsif, celui de l’humeur (bipolaire, psychotique), le post-traumatique, celui du comportement alimentaire mais également la dépression, la phobie, l'anxiété généralisée. Quelles que soient les causes de ces troubles mentaux, la prise en charge est impérative. Elle permet d’éviter les conséquences en cascade malheureusement réelles et documentées : moins bon accès à l’instruction, niveau de chômage très élevé, revenus bas, isolement social, augmentation des comportements à risque, mauvaises habitudes alimentaires, manque d’activité physique, risque accru d’obésité, de maladie cardiovasculaire, cancer, diabète, suicide, risque d’une atteinte aux droits humains, stigmatisation et discrimination, accès aux services du secteur public ou privé entravé. Exclusion, morbidité et mortalité peuvent être intensifiées. Vous ne remarquez rien ? Causes et conséquences s’entremêlent tel un serpent qui se mord la queue ! Un exemple : les discriminations sont délétères pour la santé mentale et les troubles mentaux sont malheureusement source de discriminations.
Les psychologues en colère
En janvier 2020, madame Buzyn annonce la nécessité de travailler sur le remboursement des consultations de psychologues. Proposition encourageante… Les discussions entre la FFPP (Fédération française des psychologues et de la psychologie), le SNP (Syndicat des psychologues) et le ministère se sont accélérées avec la nécessité évidente de l’intervention des psychologues face à la souffrance psychique de la population. Mais malgré les multiples discussions et réunions, la tarification de la Cnam pour une consultation à 22 € les trente minutes a été validée. Une proposition qui pose deux questions. Vingt-deux euros est-ce décent ? Et trente minutes pour une prise en charge de la souffrance des patients est-ce suffisant ? Face au manque de concertation et des propositions discutables, la FFPP et le SNP mobilisent les psychologues dans l’espoir de négociations satisfaisantes pour tous. Benoît Schneider, coprésident de la FFPP reste optimiste : « La place des psychologues évolue, une certaine reconnaissance et légitimité nous laissent envisager des solutions à long terme ».
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Une vague européenne de mal-être
Le rapport de l’OMS de mai 2020 relate l’enquête internationale sur le comportement des enfants d’âge scolaire en matière de santé HBSC (Health Behaviour in School-aged Children ). Il révèle une augmentation du nombre de jeunes européens de 11 à 15 ans signalant des problèmes de santé mentale2. Le bien-être mental des adolescents a baissé dans de nombreux pays entre 2014 et 2018. Un adolescent sur quatre signale se sentir nerveux, irritable ou avoir des difficultés à s’endormir au moins une fois par semaine. Si la technologie numérique a des effets positifs, l’étude révèle qu’elle peut aussi « amplifier les vulnérabilités et introduire de nouvelles menaces, telles que la cyberintimidation qui touche les filles de manière disproportionnée. Plus d’un adolescent sur dix déclare avoir été victime de cyberintimidation au moins une fois au cours de ces derniers mois ». Si ce rapport met le doigt sur un mal-être croissant des adolescents, ils ne sont pas les seuls concernés ; les problèmes de santé mentale sont plus répandus chez les personnes défavorisées. Le Plan d’action européen sur la santé mentale Santé 2020, lancé en 2013, annonçait que les troubles mentaux touchent chaque année plus d’un tiers de la population (surtout dépression et anxiété) ! « Les troubles mentaux sont la plus importante des maladies chroniques touchant la population européenne, puisqu’ils représentent environ 40 % de l’ensemble. Les troubles dépressifs unipolaires sont responsables de 13,7 % de la charge d’invalidité, ce qui en fait la principale maladie chronique d’Europe. Elle est suivie par les troubles liés à l’alcool (6,2 % ), la maladie d’Alzheimer et autres démences (3,8 %), la schizophrénie et les troubles bipolaires (2,3 %) ». Le Plan d’action précise qu’il existe une nette corrélation entre troubles mentaux et suicides ; les neuf pays ayant le plus grand nombre de suicides au monde sont européens. Dépression, abus d’alcool, chômage, endettement sont cités comme facteurs de risque majeurs des suicides3. Si ce plan s’est donné des objectifs ambitieux à l’échelle européenne, on imagine combien la Covid-19 a pu bouleverser les chiffres et encore aggraver la situation.
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Covid : un nouvel état mental ?
C’est Corey Keyes, un sociologue américain, qui a décrit dans les années 2000 ce qu’était le languishing (se languir, en français). C’est un état émotionnel où l’on ne sent ni heureux ni malheureux, et pourtant un peu des deux. Si l’on n’est pas déprimé, le moral est tout de même atteint et « l’abattement physique et/ou moral se manifeste par un manque d’activité, d’énergie, de dynamisme ». On pourrait dire que le languishing est un état intermédiaire entre déprime et épanouissement. Méconnu et négligé par la santé mentale, cet état émotionnel semble prévalant en 2021 avec le Covid et les confinements successifs, où l'on a l'impression d'être emprisonné dans une même et unique journée.
Assommés par les confinements
Sans surprise, les constats énoncés en mars 2021 suite aux études de la Drees, font état qu’en France, une personne sur sept a présenté un syndrome dépressif à l’issue du premier confinement en mai 2020, les femmes et les jeunes (15-24 ans) étant les plus impactés avec une hausse des demandes de soins liés à la santé mentale (stress, troubles anxieux ou dépressifs)4. Les symptômes évoqués sont les troubles du sommeil, la perte d’intérêt à faire des choses, l’humeur dépressive et les difficultés de concentration. Les violences familiales ont fait un bond de 9 % par rapport à 2019. Les récents faits divers sordides relatés dans les médias auraient-ils un lien avec le contexte pandémique ? La question reste en suspens.
Des jeunes en souffrance
Toutes les générations ont souffert de la crise sanitaire mais, à en croire les psychologues et psychiatres, pré-adolescents, adolescents et jeunes adultes habituellement nourris de nouvelles rencontres amicales et amoureuses et d’expériences variées, ont très mal supporté cette parenthèse qui a accentué leur vulnérabilité. L’explosion du décrochage scolaire a mis en évidence les inégalités sociales, scolaires et familiales. L’étude baptisée E-Coccon menée au CHU de Toulouse sur les enfants de 8 à 15 ans précise qu’un sur cinq a été victime d’un stress post-traumatique durant le premier confinement5. Si pour certains la peur a pris le dessus – peur de l’avenir, de ne pas trouver de boulot, de la maladie qui rôde, de retourner en classe, de l’avenir incertain, que ça recommence – les jeunes sont surprenants ! Ils sont généralement capables de se réinventer, de rebondir et de donner du sens à ce qu’ils vivent. Rester à l’écoute, les aider si besoin et surtout envisager avec eux un avenir plus serein.
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