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L’influence du microbiote intestinal sur le psychisme

  • Les bactéries intestinales saines produisent des substances cérébrales indispensablesLes bactéries intestinales saines produisent des substances cérébrales indispensables
Article paru dans le journal nº 82

La recherche scientifique démontre aujourd’hui l’implication des bactéries intestinales sur notre psychisme. Un quart des individus de la planète a perdu la richesse de son microbiote intestinal. En le rééquilibrant, nous pouvons rééquilibrer également nos troubles mentaux. Voici les dernières solutions validées par des études scientifiques.

Le microbiote intestinal est considéré maintenant comme un organe. Il a une fonction de digestion et d’absorption des nutriments, un rôle nutritif et métabolique, comme l’assimilation de certains aliments que seules les bactéries savent digérer, en particulier les fibres. Il convertit les aliments en nutriments et en énergie, et assure la synthèse de vitamines indispensables à l’organisme. Il constitue une barrière protectrice, une réponse immunitaire. Il contrôle l’inflammation, la détoxication, et la régulation du sommeil. Il a aussi une action sur le système endocrinien-hormonal, et sur le fonctionnement global du corps. Il intervient notamment lors des processus essentiels du neuro-développement ; son rôle est suspecté dans la genèse de la maladie d’Alzheimer. Il est responsable de l’épaisseur de la muqueuse intestinale, de la taille des villosités, de la production de mucus, de la vascularisation épithéliale et de l’activité enzymatique de la muqueuse. Il est la base de notre défense : 75 % de notre système immunitaire se trouve dans notre intestin.

Ce constat a fait émerger de nouveaux domaines de recherche : la psycho-neuro-endocrino-immunologie (PNEI) – qui étudie les interrelations entre le cerveau, le système nerveux, le système endocrinien, le système immunitaire et le système digestif –, la psychomicrobiotique, champ de recherche qui s’intéresse au lien entre les perturbations du microbiote intestinal et les troubles psychologiques, la psychonutrition, et a donné naissance à une nouvelle discipline, la neuro-gastro-entérologie.

Psychomicrobiotique : champ en plein essor

Selon l’embryologie, les cellules nerveuses de l’intestin proviennent du même feuillet embryonnaire que celles du cerveau. Nous sommes dotés de deux cerveaux qui communiquent constamment par le biais du nerf vague, le plus long nerf de l’organisme, voie de communication la plus rapide, comme une ligne de téléphone. On étudie aujourd’hui comment les bactéries stimulent le nerf vague car sa stimulation est déjà un traitement contre la dépression.

Environ 80 % des informations du nerf vague vont de l’intestin vers le cerveau. L’intestin dénombre 200 à 600 millions de neurones ou neurotransmetteurs. Ces messagers chimiques, cellulaires, moléculaires sont semblables à ceux du cerveau. De plus, ses milliards de bactéries communiquent. C’est un écosystème qui influence tout notre être.

Les bactéries intestinales saines produisent des substances cérébrales indispensables : BDNF, GABA (acide gamma-­aminobutyrique), glutamate. Une carence de ces trois substances entraîne de la dépression, de l’anxiété, Alzheimer. Le microbiote produit également les vitamines du groupe B, influençant l’équilibre nerveux.

Les bactéries contrôlent les hormones du stress : certaines bactéries intestinales interagissent avec le système immunitaire pour conduire à la libération de molécules inflammatoires et d’hormones du stress : les « cytokines inflammatoires ». Elles activent le système de réponse au stress et elles peuvent modifier notre perception de la douleur, en étant plus sensibles à celle-ci. Elles contribuent au contrôle du cortisol et de l’adrénaline – les hormones associées au stress qui sèment le chaos dans l’organisme lorsqu’elles sont produites en permanence.

Les 85 % de la sérotonine – molécule du bonheur – de notre corps sont produits par les cellules nerveuses de notre cerveau intestinal, ce qui est plus que la part produite par le cerveau de notre tête.

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Les facteurs nuisant à l’équilibre de notre microbiote

Parmi les facteurs nuisant à notre microbiote intestinal, nous pouvons citer une carence de base à la naissance (problème génétique, césarienne, stress de la mère) ; une mauvaise alimentation incluant le manque de nutriments capables de maintenir les différentes populations bactériennes en bonne santé, notamment une insuffisance en fibres végétales ; l’exposition à des substances chimiques qui tuent les colonies bactériennes ou perturbent leur composition ; le stress qui, provoquant de l’inflammation, change l’environnement intestinal ; une inflammation chronique.

Dysbiose, ou la faiblesse du microbiote

L’altération de la qualité du microbiote s’appelle une dysbiose. Ce qui signifie une réduction de sa biodiversité. Or, une chute de 30 à 40 % de la diversité de nos bactéries intestinales peut provoquer une apparition de maladies chroniques. Celle-ci augmente la perméabilité intestinale, c’est-à-dire que les jonctions serrées jouant le rôle de gardiennes ne contrôlent plus ce qui doit passer à l’intérieur (nutriments) et ce qui doit rester à l’extérieur (menaces potentielles). Ce sont elles qui, en effet, déterminent la valeur seuil de l’inflammation de l’organisme à tout moment. Si des molécules inhabituelles passent à travers, des protéines alimentaires incomplètement dégradées vont directement dans le système lymphatique et sanguin. C’est la dysimmunité, le système immunitaire est dépassé. Soit la personne surréagit à tout (c’est le règne des allergies) , soit elle ne réagit plus (le métabolisme devient le terrain des infections répétées), soit c’est l’auto-immunité : les défenses épuisées deviennent imprécises et confondent l’intrus avec des composants de l’organisme.

Le microbiote et ses grandes pathologies

Les pathologies causées par le déséquilibre du microbiote sont légion :

  • Le syndrome de l’intestin irritable ou l’hyperperméabilité intestinale

Sensation gênante de pression dans l’abdomen ou de borborygmes et tendance aux diarrhées et à la constipation. Il peut être dû à des micro-inflammations, une mauvaise flore intestinale ou des intolérances alimentaires. On constate également une tendance à l’anxiété et à la dépression.

Pourtant, aucun dommage n’est visible à l’examen de l’intestin par imagerie médicale d’où le scepticisme de beaucoup de médecins (sauf pour la maladie de Crohn). L’intolérance alimentaire est une réaction retardée, à la différence de l’allergie.

  • État de la recherche sur les liens entre le microbiote et psychisme

Quand il y a irritabilité de l’intestin, il y a dysfonctionnement de la communication entre intestin et cerveau ; cela peut être pesant psychologiquement. Les effets sont visibles sur un scanner cérébral. Le syndrome de l’intestin irritable (SII) est associé à une pathologie psychiatrique dans 60 à 85 % des cas. L’inversion du microbiote de deux souris, une timide et une exploratrice, a entraîné l’inversion des caractères de chacune.

Le stress, l’anxiété, l’autisme, la dépression et la schizophrénie, modifient la physiologie du côlon et impactent la composition de la flore intestinale. La colonisation du tube digestif est capitale pour le développement cérébral.

Le Pr Dinan (École universitaire de Cork en Irelande) a montré que sans bactéries digestives suffisantes, le cerveau et l’intestin ne produisent pas assez de sérotonine, l’« hormone du bonheur ».

La dépression, l’anxiété et les troubles paniques sont plus fréquents chez les personnes présentant des troubles inflammatoires, auto-immuns et un intestin irritable.

Des probiotiques contre les maladies mentales…

Certains probiotiques permettent d’améliorer des symptômes psychiques, selon des études récentes. Il s’agit de souches telles que Lactobacillus plantarum, Lactobacillus acidophilus, Lactobacillus brevis, L. rhamnosus, Bifidobacterium lactis, Bifidobacterium longum, Bifidobacterium infantis, Bifido- bacterium breve, Lactobacillus paracasei, Lactobacillus casei, Lactobacillus helveticus. La souche la plus utilisée aujourd’hui contre la dépression est Lactobacillus casei. Bifidobacterium infantis régule le triptophane précurseur de la sérotonine, calme l’AHHS (axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien), conçu pour répondre à un stress aigu. À sa prise, on constate une baisse du cortisol et une diminution du stress et de l’anxiété.

La bactérie Clostridium, liée à la constitution de base du microbiote avant 3 ans, est souvent trouvée en excès dans des cas de troubles autistiques, avec une perméabilité intestinale. La schizophrénie : pathologie qui serait liée à la toxoplasmose (l’avoir eue augmenterait le risque d’être diagnostiqué schizophrène), à un trauma immunologique et à la constitution de base du microbiote avant 3 ans.

Marion Leboyer (CHU Henri Mondor à Créteil) parle de « psychose auto-­immune » en évoquant ses recherches sur les dysfonctions immunitaires dans les troubles psychiatriques. Des stress sévères subis durant l’enfance ou des infections très précoces atteignent les gènes de l’immunité. Ce qui provoque des stigmates inflammatoires persistants et un effet au niveau du cerveau. Cette inflammation chronique entraîne une perméabilité intestinale, des antigènes dans la circulation sanguine et une réaction auto-immune. Les anticorps ciblent dans le cerveau le glutamate. La transmission glutamatergique est altérée chez ces patients qui vont, pour certains, développer schizophrénie ou troubles bipolaires.

La paroi intestinale et la membrane hémato­encéphalique sont deux barrières dont la perméabilité peut s’altérer et générer un terrain pathologique. Le trouble déficitaire de l’attention est relié à une exposition aux antibiotiques, à l’intolérance au gluten, au taux de GABA et de dopamine trop bas. Les troubles du comportement alimentaire (TCA) sont liés à une protéine (CIpB) fabriquée par certaines bactéries (tel qu’Escherichia coli).

Des études récentes suggèrent que le microbiote aurait un rôle déterminant dans les maladies neurodégénératives : il serait impliqué dans l’inflammation cérébrale de la maladie d’Alzheimer.

La gravité des symptômes parkinsoniens est aussi corrélée à la concentration d’une espèce particulière (Entérobactericeae).

Lire aussi Alzheimer, Parkinson : le microbiote intestinal et les facteurs environnementaux en première ligne

Bons aliments, bons outils psychothérapeutiques

Nos goûts, nos dégoûts, nos addictions sont influencés par notre microbiote qui nous pousse à manger ce qui favorise sa propre croissance. Changer d’alimentation, permet en deux semaines de modifier son microbiote. Les aliments qui nous attiraient auparavant nous laissent alors indifférents.

Un régime d’aliments anti-inflammatoires, antioxydants, « bio », riches en fibres, aliments fermentés, donc associant prébiotiques et probiotiques, privilégiant les graisses saines, aliments à faible teneur en glucides, sans gluten, sans sucre rajouté et graisses saturées, se révèle optimal pour notre flore intestinale. La mastication est la première étape de la digestion. Si des protéines n’arrivent pas correctement découpées, c’est la voie vers une réponse immunitaire inappropriée, conduisant aux allergies et aux intolérances alimentaires.

Choisir des aliments riches en probiotiques comme les aliments fermentés. Les prébiotiques qui sont « les aliments des probiotiques ». Deux prébiotiques courants sont l’inuline et les fructo-oligosaccharides (FOS), tels les liliacées : poireau, asperge, ail, oignon ; les astéracées : endive, salsifis, topinambour, artichaut ; la gomme d’acacia ou gomme arabique, la racine de chicorée, les feuilles de pissenlit, les pommes, les graines de lin, la racine de konjac, de yacon, de bardane, les algues, la salade verte, les échalotes, l’amidon résistant qui se forme quand on laisse refroidir des pommes de terre et du riz après cuisson. Le galacto-oligosaccharide (GOS) diminue le taux de cortisol et le niveau d’anxiété.

Supprimer les aliments les plus inflammatoires : le gluten, le sucre, les produits laitiers. Des compléments alimentaires seront utiles pour restaurer les villosités de l’intestin, rééquilibrer les carences et traiter des terrains psychiques où certaines vitamines ou oligo-éléments se sont avérés efficaces : vitamines B, D3, magnésium, enzymes digestives, L Glutamine, L Tryptophane, N-acétyl-cystéine, Oméga-3.

 

En aucun cas les informations et conseils proposés sur le site Alternative Santé ne sont susceptibles de se substituer à une consultation ou un diagnostic formulé par un médecin ou un professionnel de santé, seuls en mesure d’évaluer adéquatement votre état de santé


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