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Histamine : l’allergie cachée qui empoisonne votre quotidien
Multi-intolérances alimentaires, reflux gastriques, douleurs, malaises, démangeaisons, rougeurs, diarrhées… les symptômes potentiellement en lien avec l’histamine sont nombreux. Encore mal comprise et méconnue, l’intolérance à l’histamine est pourtant de plus en plus répandue, en particulier dans les pays industrialisés aux modes de vie modernes.
"L’histamine est un sujet très complexe. Il y a encore une réelle incompréhension notamment au niveau des professionnels, affirme l’experte Andréa Fernandez Indulsky, micronutritionniste, praticienne en biologie nutritionnelle et fonctionnelle et autrice de Intolérances à l’histamine¹, un ouvrage complet sur l’histamine. Depuis que je me suis mise à entreprendre des recherches sur l’histamine, je reçois de nombreux appels de personnes souffrantes qui se grattent, qui ne savent plus ce qu’elles doivent manger, qui prennent parfois jusqu’à huit antihistaminiques par jour sans aucune amélioration de leur état. Et surtout, elles ne savent plus vers qui se tourner pour s’en sortir. "
Qu’est-ce que l’histamine ?
L’histamine est une protéine produite par le corps à partir d’une autre protéine, la L-Histidine. Cette molécule joue un rôle clé dans les réactions allergiques et inflammatoires. Quand le corps détecte un allergène (pollen, poussière…), il libère de l’histamine, ce qui provoque des symptômes comme des démangeaisons, des rougeurs ou des gonflements. C’est la raison pour laquelle les personnes allergiques connaissent bien les antihistaminiques, des médicaments qui bloquent l’action de cette molécule.
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L’histamine, bien plus qu’une simple réponse allergique
"Son rôle va pourtant bien au-delà et elle peut générer des symptômes désagréables, voire vraiment handicapants en dehors de véritables allergies ", précise Andréa Fernandez Indulsky.
Elle est également synthétisée par les mastocytes et les granulocytes basophiles, qui sont tous les deux des globules blancs. L’histamine communique avec les barrières (la muqueuse de l’intestin, par exemple), l’immunité innée (la première ligne de défense) et l’immunité adaptative (qui produit des anticorps contre les envahisseurs).
La spécialiste indique que l’histamine se trouve naturellement dans de nombreux endroits de notre corps (peau, foie, estomac, moelle osseuse, cerveau). Elle intervient dans le processus d’acidification de l’estomac (indispensable à une bonne digestion) ou encore au niveau du cerveau, comme un neuromédiateur agissant sur le réveil.
L’histamine est stockée dans les cellules et libérée dans des circonstances telles que les réactions d’allergies. Andréa Fernandez Indulsky : "L’histamine est effectivement libérée lorsque l’organisme est attaqué par un allergène. Sauf qu’aujourd’hui, elle réagit aussi en cas d’infections longues, comme dans la maladie de Lyme ou dans le Covid long (lire encadré ci-dessous). Bon nombre de personnes présentent des réactions histaminiques non-stop, activées par l’histamine apportée par l’alimentation. "
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Paludisme, Lyme et Covid long : en lien avec l'intolérance à l'histamine ?
Andréa Fernandez Indulsky consacre un chapitre de son ouvrage1 au paludisme et à la maladie de Lyme. Ces deux pathologies sont, pour elle, interconnectées à l’histamine à travers la réponse immunitaire et les processus inflammatoires du corps. « De nombreuses preuves scientifiques lient le paludisme et la maladie de Lyme à une libération excessive d’histamine, entraînant une réponse incontrôlable et excessivement inflammatoire », affirme-t-elle.
Elle pense qu’il est, en outre, possible de mieux comprendre le Covid long via les voies de l’histamine. « L’histamine, dans ce monde post-Covid, touche une grande partie de la population mais ce n’est pas reconnu et les patients ne sont encore pas bien écoutés. »
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Quels aliments sont riches en histamine ?
La molécule d’histamine peut ainsi être apportée par des aliments ou libérée lors de leur digestion. On la désigne sous le terme d’histamine exogène, qui vient de l’extérieur du corps. Elle va, de ce fait, se trouver dans les produits ayant subi une fermentation ou une dégradation de leurs protéines lors du vieillissement. Dans le cas d’aliments restés emballés trop longtemps, le taux d’histamine augmente significativement une heure après la cuisson.
" Les personnes intolérantes sont donc obligées de manger frais, de faire tout par elles-mêmes. Et d’éviter des aliments riches en histamine comme les poissons (thon, sardine et maquereau), les fruits de mer, les crustacés, les viandes et charcuteries vieillies (salami, jambon), les produits laitiers fermentés (fromages vieillis, yaourt), les aliments fermentés (choucroute, vinaigre), le vin et la bière, le pain au levain, le kéfir, le kombucha, le chocolat, etc. Côté fruits et légumes, on peut citer les fraises, les bananes, les tomates, les épinards, les aubergines et les avocats. Certains aliments sont naturellement riches en histamine et concourent à son excès dans le corps ", détaille-t-elle.
Certains aliments peuvent aussi libérer l’histamine endogène, située dans les cellules de stockage du corps.
Les ennuis commencent quand l’organisme n’est plus en mesure de dégrader correctement l’histamine. " Elle s’accumule et peut potentiellement créer une intolérance, sans qu’une réaction allergique proprement dite ne soit en cause ", poursuit la naturopathe.
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Une intolérance sous-estimée
Méconnue ou mal connue, cette intolérance toucherait 1 % de la population, mais sans doute davantage si les praticiens identifiaient mieux ce problème : " Elle est sous-estimée parce que, d’une certaine façon, la perturbation du métabolisme de l’histamine passe inaperçue. Par conséquent, les symptômes que cette perturbation engendre le sont également. D’autant que cette intolérance peut facilement être assimilée à des allergies ou à des maladies chroniques, rendant le diagnostic complexe. Aujourd’hui, les patients et les professionnels de santé ne se rendent pas compte. Ils passent à côté. Soit les médecins prescrivent un antihistaminique, soit ils mettent les symptômes sur le compte du stress, de la fatigue ou de la dépression ", regrette Andréa Fernandez Indulsky.
Elle explique que la plupart des patients consultent au départ pour une inflammation gastro-intestinale, nécessitant de prendre des antiacides pour réduire la brûlure de l’estomac ou la sensation que quelqu’un les étrangle à la gorge. Et comme il arrive que les symptômes débutent après un fort problème émotionnel, les praticiens mettent le blâme sur le stress, sans se demander pourquoi le patient présente des symptômes aussi étranges.
Et d’ajouter que souvent le médecin spécialiste va se concentrer sur sa spécialité et ne va pas voir que le problème est lié à l’histamine. On se retrouve donc avec des personnes non diagnostiquées, non traitées parce que les antihistaminiques ne suffisent pas. Il faut adopter une approche plus globale face à une importante variabilité symptomatique.
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Rhinite, insomnie, constipation : des symptômes variés et méconnus
L’autrice dresse une liste sans fin de symptômes associés à l’intolérance à l’histamine. On peut avoir :
- Des rhinites à répétition, le nez bouché après avoir bu du vin, mangé du fromage ou du chocolat
- Une rhinorrhée ou écoulement nasal immédiatement après la consommation de nourriture
- Une vasodilatation, entraînant des œdèmes. Dans le pire des cas, les personnes font des crises de dermographisme : en sortant de la douche, elles sont marquées de partout et lorsqu’elles se touchent, la marque du doigt reste apparente sur la peau plus longtemps que normal.
- Une mauvaise régulation de l’acide gastrique qui ne peut plus s’équilibrer correctement. Cela engendre des gastrites et des reflux gastriques à répétition. Les problèmes intestinaux, avec des alternances de phases de constipation et de diarrhée ainsi que des douleurs abdominales (surtout après avoir bu du vin et mangé des aliments gras) font partie des symptômes.
- Des phénomènes inflammatoires peuvent se produire un peu partout dans le corps. Cette inflammation peut se situer au niveau des articulations et des orteils avec une tendinite qui devient chronique. Chaque individu va le manifester de façon différente. Cela peut aussi se traduire par de la fibromyalgie, de l’urticaire, du prurit, de la dermatite, du psoriasis chronique et des allergies.
- On recense aussi des insomnies, des syndromes de fatigue chronique à la limite du burn-out, des symptômes neurologiques (maux de tête), des symptômes cardio-vasculaires (hypotonie et arythmies), etc.
Génétique, intestins, médicaments : les causes principales de l’intolérance à l’histamine
Andréa Fernandez Indulsky compte trois causes principales d’intolérance : une prédisposition génétique entraînant une production moindre de la diamine oxydase (DAO), l’enzyme qui dégrade l’histamine (lire encadré ci-dessus) ; des dommages à la paroi intestinale ainsi qu’une déficience en cofacteurs enzymatiques.
Parmi les autres causes, elle cite les médicaments allopathiques réduisant l’efficacité des enzymes ; les troubles de la méthylation (réaction chimique qui joue un rôle clé dans divers mécanismes cellulaires) diminuant l’efficacité de l’enzyme N-méthyltransférase (HNMT) ; une perturbation de la dégradation de l’histamine par le champignon Candida albicans ; une prédominance œstrogénique activant la libération de l’histamine ou encore des troubles thyroïdiens favorisant la libération d’histamine.
Tests urinaires, sanguins : comment déceler une hyperhistaminose ?
Différentes méthodes de détection sont disponibles pour diagnostiquer l’intolérance à l’histamine. " On peut procéder à un dosage de la diamine oxydase (DAO). Ce test évalue l’efficacité de l’enzyme DAO dans la dégradation de l’histamine, souligne Andréa Fernandez Indulsky. Il existe un test de l’histamine urinaire qui mesure les niveaux d’histamine dans l’urine sur une période de vingt-quatre heures.
Bien qu’il soit moins invasif que les prélèvements sanguins, ses résultats peuvent être influencés par des facteurs alimentaires. Les analyses de sang à champ noir reposent, quant à elles, sur l’observation des cellules sanguines en temps réel à l’aide d’un microscope. Le dosage de l’histamine plasmatique mesure les niveaux d’histamine dans le sang. Mais parfois ils peuvent revenir négatifs même si la personne est en pleine crise, ceci reste un mystère. "
Traitement de l’intolérance : conseils alimentaires et naturopathiques
" Je conseille d’adopter pendant au moins trois semaines une alimentation pauvre en histamine. Si après cette période, on constate une amélioration, on sait qu’on est sur la bonne voie ", préconise l’experte.
Dans le cas contraire, on peut commencer à nettoyer les intestins pour traiter une potentielle dysbiose. " Il faut savoir qu’un Français sur deux souffre de troubles digestifs, notamment des ballonnements, provenant des mauvaises bactéries dans l’intestin grêle et/ou dans le côlon. Je pense que potentiellement la moitié de la population souffre d’une intolérance à l’histamine en France sans en être consciente, étant donné le nombre de personnes souffrant des troubles digestifs ! "
Quels compléments peuvent aider à réguler l’histamine ?
La spécialiste conseille des micronutriments et des composants actifs qui peuvent aider à réduire l’histamine. Andréa Fernandez Indulsky : " Les compléments de DAO peuvent être particulièrement utiles pour ceux qui présentent un déficit naturel en cette enzyme. Ensuite, la quercétine, antioxydant naturel présent dans les pommes et les oignons, a des effets anti-inflammatoires et peut inhiber la libération d’histamine.
La bromélaïne, une enzyme extraite de l’ananas, aide à réduire l’inflammation et les réactions allergiques, et complète bien la quercétine pour un effet synergique.
L’ortie (Urtica dioica), plante aux propriétés antihistaminiques naturelles, aide à réduire les symptômes d’allergie, tels que les démangeaisons et la congestion nasale et à stabiliser la libération d’histamine. "
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La méthode NSSR pour une meilleure prise en charge
" Si l’on soupçonne une intolérance à l’histamine, le point de départ est de traiter le système digestif qui va de la bouche à l’anus, confirme Sabrina Meziani-El Attar, naturopathe, nutritionniste et praticienne en biologie nutritionnelle et fonctionnelle, formée au sein de l’organisme de formation² dirigé par Andréa Fernandez Indulsky. On peut s’appuyer sur la méthode NSSR, mise au point par Andréa Fernandez Indulsky. "
On commence par nettoyer tout l’appareil digestif. Y compris la bouche. Ensuite on scelle les barrières à la base de notre système immunitaire. Puis on soigne les muqueuses. Et enfin on répare le système immunitaire intestinal et on contrôle l’inflammation systémique. Cette méthode est primordiale (lire encadré ci-dessous).
Nettoyer, sceller, soigner, réparer, la méthode " NSSR "
" On commence par le nettoyage de toutes les toxines accumulées, notamment les pathogènes, les mycoses, etc., décrit Sabrina Meziani-El Attar, naturopathe, nutritionniste et praticienne en biologie nutritionnelle et fonctionnelle. Différentes plantes peuvent aider à cela, comme l’ail, l’origan, ou encore l’extrait de pépin de pamplemousse. " Ensuite, la méthode consiste à sceller la paroi intestinale. Si l’on souffre d’intolérance à l’histamine, il est plus que probable que cette paroi laisse trop passer. Ce que l’on ingère va dans la mauvaise direction ou directement dans les selles.
Pour sceller, la naturopathe suggère d’utiliser des vitamines, du zinc et d’autres éléments afin de tapisser la paroi pour la réparer, la soulager et diminuer l’inflammation. L’étape suivante consiste à prendre en charge les muqueuses. " La présence des mucines* génère un bon “velcro” d’accroche pour le développement des bonnes bactéries, la lutte contre les mauvaises bactéries et l’élimination des biofilms ", indique la micronutritionniste Andréa Fernandez Indulsky.
La dernière étape se focalise sur la réparation : il s’agit de réguler l’activation de l’inflammation en accentuant l’apport en nutriments et vitamines. " L’idée est de rétablir la bonne homéostasie du corps pour que la personne puisse remanger des aliments riches en histamine sans avoir les effets délétères qui y étaient associés. "
Vers qui se tourner pour un diagnostic et une prise en charge adaptée ?
" Lorsque je reçois une personne au cabinet, j’essaie de détecter une éventuelle persistance des symptômes à travers un questionnaire et des bilans biologiques, tels que des tests sanguins, urinaires ou fécaux, fait savoir Sabrina Meziani-El Attar. On sait qu’il faut aller creuser du côté de l’histamine quand on a beau traiter le système digestif, l’inflammation et les dérèglements hormonaux mais que les symptômes sont récurrents. " Au départ, la naturopathe fonctionnelle oriente vers des tests assez généraux visant à détecter d’éventuelles carences nutritionnelles en vitamines A, B (B2, B6, B9, B12), D ou en zinc. Une fois ces tests réalisés et si l’intolérance persiste, elle propose des tests de la DAO au niveau fécal qui donnent des résultats pertinents.
" Pour être pris en charge pour une intolérance à l’histamine en France, c’est un peu compliqué. Nous sommes en retard au niveau de la médecine fonctionnelle par rapport à nos confrères belges, allemands ou luxembourgeois. L’idée est de se tourner vers un naturopathe, un nutritionniste ou un praticien en biologie fonctionnelle spécialisé qui aura une approche plus poussée. Le tout étant d’arriver à trouver le bon ", conclut-elle.
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Déficit enzymatique et histamine : un mécanisme sous-jacent
Cette intolérance peut être due à un défaut de dégradation de l’histamine à cause d’un déficit en enzymes. Les enzymes en question sont la diamine oxydase (DAO) et l’histamine N-méthyltransférase (HNMT), responsables de la dégradation de l’histamine. Elles sont principalement localisées dans les cellules de l’intestin. La DAO empêche l’histamine d’entrer dans la circulation sanguine.
Dans le gros intestin, où se produit une fermentation accrue, les enzymes fonctionnent ensemble. Si elles fonctionnent mal ou sont déficientes, l’histamine est mal dégradée et s’accumule dans le corps. Ce mécanisme est parfois désigné sous le terme de pseudo-allergie. Bien que les symptômes ressemblent à ceux d’une allergie, le mécanisme sous-jacent est différent.
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Aller plus loin :
Références bibliographiques
1. Intolérances à l’histamine, Comprendre les symptômes, les diagnostics et les traitements, éd. du Dauphin.
En aucun cas les informations et conseils proposés sur le site Alternative Santé ne sont susceptibles de se substituer à une consultation ou un diagnostic formulé par un médecin ou un professionnel de santé, seuls en mesure d’évaluer adéquatement votre état de santé
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