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La cyberdépendance, une réalité alarmante
Vous avez été nombreux, suite à notre dossier sur les addictions à vous inquiéter à propos de la cyberdépendance. Et pour cause. Au-delà du trouble lié à l’usage des jeux vidéo, qui est désormais reconnu, s’insinue un mal plus profond lié à l’utilisation difficilement contrôlable des applications d’Internet. Un mal qui mène à une souffrance cliniquement significative.
À l’occasion de l’Assemblée mondiale de la Santé de mai 2019, l’OMS a officiellement entériné la classification de « trouble de jeux vidéo » dans la onzième révision de la classification statistique internationale des maladies et problèmes connexes (CIM-11). Cette nouvelle classification est entrée en vigueur le 1er janvier 2022. L’addiction visée est définie précisément par « un comportement lié à la pratique des jeux vidéo ou des jeux numériques qui se caractérise par une perte de contrôle sur le jeu, une priorité accrue accordée au jeu […], et par la poursuite ou la pratique croissante du jeu en dépit de répercussions dommageables »1. Les jeux concernés regroupent tous ceux qui se réalisent à travers un dispositif informatique relié ou non à une connexion Internet, dans lequel le joueur évolue seul ou en groupe dans un environnement virtuel. À ce jour, selon 27 études réalisées à travers le monde entre 1998 et 2016, le pourcentage moyen de prévalence de ce trouble est de 4,7 %2.
Qu’entend-on par addiction aux jeux vidéo/Internet ?
L’OMS précise que « pour qu’un trouble du jeu soit diagnostiqué, le comportement doit être d’une gravité suffisante pour entraîner une altération significative du fonctionnement personnel, familial, social, éducatif, professionnel […] pendant au moins douze mois ».
La classification de l’OMS était attendue depuis plusieurs années. L’Inserm indiquant dès 2014 dans une expertise collective intitulée « Conduites addictives chez les adolescents » qu’en France, 5 % des adolescents de 17 ans jouaient entre 5 et 10 heures… par jour en 2011, et 26 % d’entre eux exprimaient avoir rencontré, à cause de cette pratique excessive, des problèmes à l’école ou au travail3. L’addiction aux jeux vidéo/Internet est classée parmi les addictions comportementales, dont les symptômes sont l’isolement, la perte de contrôle et les conflits avec l’entourage qui ont des conséquences néfastes sur les plans personnel, familial, social et professionnel. Impacts négatifs sur l’alimentation, troubles du sommeil, inactivité physique, fatigue chronique, migraines, troubles anxio-dépressifs et sexuels, échec ou retard scolaire, etc.4 ! L’Institut fédératif des addictions comportementales du CHU de Nantes indique que la France comptait en mai 2018 plus de 52,7 millions d’internautes de tous âges. Deux tiers des Français se connectent tous les jours, et le temps passé sur la toile est de 1 h 28 en moyenne. Ce sont les 15 % qui comptabilisent à eux seuls près de la moitié du temps total passé sur Internet qui interpellent5. Parmi eux, certains connaissent une perte de contrôle de leur temps de connexion. Le recueil de données sur l’utilisation problématique d’Internet met en évidence la concomitance de « facteurs environnementaux (difficultés familiales…), individuels (comorbidités psychiatriques…) et liés à l’objet d’addiction (les trois A : accessible, anonyme, abordable et l’effet de désinhibition) ».
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Un peu d’histoire
Le terme « cyberdépendance » a vu le jour en 1995 avec la plaisanterie d’un psychiatre américain, Ivan Goldberg, qui, dans un courriel, avait proposé une définition de la dépendance à Internet et recommandé de s’inscrire à un groupe d’entraide. À sa grande surprise, il reçut en retour de très nombreuses demandes de personnes ressentant une véritable souffrance. La psychologue Kimberly Young, devenue experte reconnue en matière de dépendance à Internet, a présenté dès 1996 une liste de symptômes et a créé en 1998 un test pour déterminer le niveau d’addiction d’une personne à Internet*.
Sensibiliser et rester vigilant
Quelle que soit l’addiction, la prévention reste un enjeu majeur. Il importe de sensibiliser jeunes, parents, enseignants, éducateurs aux dangers d’une utilisation excessive d’Internet, des réseaux sociaux et des jeux vidéo, et de rester attentif aux changements de comportements annonciateurs de mal-être chez ses proches. Il ne s’agit pas de supprimer Internet et les jeux, qui font partie intégrante de nos vies, mais bien de ne pas oublier d’aiguiser son esprit critique, de rester en lien avec la réalité, d’aider les personnes dépendantes à se reconnecter aux activités non virtuelles et à y trouver stimulations et plaisirs. Reprendre goût aux échanges, aux liens sociaux… la vraie vie, quoi ! Des services spécialisés en addictologie, psychiatres et psychologues sont des personnes-ressources en cas de souffrance avérée.
Référence :
- drogues.gouv.fr
- W. Feng W, D. E. Ramo, S. R. Chan, et al., dans Addict Behav., 2017.
- inserm.fr
- cairn.info/revue-psychotropes-2017-3-page-9
- ifac-addictions.chu-nantes.fr
- Ibid
En savoir plus :
« Hyperconnexion », de M. Stora et A. Ulpat, éd. Larousse, 2017.
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