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Uvestérol : un complément empoisonné pour vos enfants

Article paru dans le journal nº 3

Suite à une décision du tribunal de Commerce nous sommes dans l'obligation de retirer cet article et tous ses commentaires de notre site. Bien entendu, nous avons fait appel de cette décision qui porte gravement atteinte à la liberté d'expression et vous le retrouverez peut-être dans les prochains jours si nous gagnons. Pour rappel, cet article mettait en cause le médicament vendu sous la marque Uvestérol. Vous trouverez ci-dessous le détail de ce jugement.

APRES EN AVOIR DELIBÉRÉ LES FAITS :

LABORATOIRES CRINEX, ci-après CRINEX, est un laboratoire pharmaceutique qui fabrique et commercialise des médicaments à destination des êtres humains, notamment pour les enfants en bas âge.

CRINEX commercialise un médicament nommé "Uvesterol", qui consiste en une supplémentation en vitamine D destinée aux nourrissons. déclinée en Uvestero/ D ou Uvesterol ADEC.

SANTE PORT ROYAL est une société commerciale qui édite des revues et périodiques, sous la direction de Monsieur Alexandre IMBERT et notamment un magazine intitulé ALTERNATIVE SANTE, consacré aux méthodes alternatives de traitement des maladies.

CRINEX reproche à SANTE PORT ROYAL d'avoir publié, le 25 février 2014 sur le site ALTERNATIVE SANTE un article intitulé "UVESTEROL : un complément empoisonné pour vos enfants" dont l'auteur est Monsieur Michel DOGNA. Cet article reprend un à un les excipients contenus dans l'Uvesterol arguant de leur nocivité.

Le 19 août 2014, Monsieur IMBERT acceptait, après mise en demeure de CRINEX, de modifier le texte de l'article incriminé, notamment après que CRINEX lui ait adressé les commentaires du Docteur François HUBERT, expert toxicologue prés de la cour d'appel de BOURGES.

L'adresse URL de l'article n'était pas modifiée.

Le 8 novembre 2014, un bulletin d'information électronique était adressé par ALTERNATIVE SANTE à l'ensemble de ses membres, reprenant le titre "UVESTEROL un poison pour vos enfants".
C'est dans ces conditions que CRINEX a saisi le juge des référés afin qu'il soit fait injonction à SANTE PORT ROYAL de cesser immédiatement la diffusion de l'article de monsieur Michel DOGNA.
Le juge des référés ayant considéré qu'il n'était pas compétent pour faire cesser le trouble allégué, CRINEX a saisi le tribunal de céans.

LA PROCÉDURE :

Pour CRINEX :
Il existe un lien direct de concurrence entre CRINEX et le groupe SANTE PORT ROYAL ; cependant, en tout état de cause, de jurisprudence constante, l'auteur d'un dénigrement n'est pas nécessairement un concurrent de la victime de ce dénigrement.
La divulgation d'une information de nature à jeter le discrédit sur un concurrent constitue un dénigrement, peu important qu'elle soit exacte.

Les propos dénigrants, particulièrement violents et sans nuance, ont été portés à la connaissance du public.

L'alinéa 2 de l'article 10 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales prévoit expressément des cas de restriction è la liberté d'expression, ce qui est le cas de l'espèce, la suppression de cet article et de tous propos dénigrants à l'encontre de l'UVESTEROL ne va pas à l'encontre de la liberté d'expression.

Pour SANTE PORT ROYAL :
Les demandes formulées par CRINEX dépassent le litige de la concurrence déloyale ou dénigrante et visent à interdire à SANTE PORT ROYAL l'usage de son droit à la liberté d'expression. SANTE PORT ROYAL est un organe de presse exerçant une activité journalistique. Le présent litige s'inscrit dans le cadre du principe de la liberté d'expression reconnue et garantie par les textes supérieurs de l'ordre juridique applicable en FRANCE, tels que l'article 10 de la Convention européenne des droits de l'homme.

L'état de concurrence entre les parties est inexistant.

La cour européenne des droits de l'homme a jugé que dès lors que les propos s'inscrivent dans le cadre d'un débat d'intérêt général, comme c'est le cas, il importe peu que celui qui s'exprime ait un intérêt personnel à défendre dans ce débat.

Il n'existe aucune définition précise de la concurrence déloyale par dénigrement telle qu'invoquée par CRINEX. L'article 1382 du code civil, compte tenu de son caractère très général, ne présente pas une qualité de précision suffisante pour constituer une "loi" au sens du 26ème alinéa de l'article 10 de la Convention européenne des droits de l'homme, qui autoriserait la limitation de la liberté d'expression sollicitée par CRINEX. Les demandes de CRINEX ne constituent pas un but légitime.

Les propos s'inscrivent dans le cadre d'un sujet d'intérêt général et l'espace pour le prononcé de restrictions à la liberté d'expression à l'égard de l'article en cause est particuliêrement réduit. SANTE PORT ROYAL n'a pas dépassé les limites admissibles de la critique autorisée par la liberté d'expression

SUR CE :

Sur le dénigrement
Attendu que les présentes demandes sont faites sur le fondement de l'article 1382 du code civil qui édicte que tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. Qu'il s'en infère que la demanderesse doit démontrer une faute, un préjudice et un lien de causalité entre les deux ;

Attendu que le dénigrement peut se définir comme tout acte ou comportement de nature à jeter publiquement le discrédit sur les produits, l'entreprise ou la personnalité de toute personne physique ou morale, même en absence de situation de concurrence,

Attendu que l'article de Monsieur Michel DOGNA rédigé le 25 février 2014 a pour titre "Uvesterol : un complément empoisonné pour vos enfants", que, en première page, sous le titre de l'article, une photo d'un nourrisson absorbant le médicament attire particulièrement l'attention sur l'article ;

Attendu qu'en gros caractères, dans le texte placé sous la photo, on peut lire au sujet de l'Uvestérol "qu'il est bourré de produits nocifs" et que "d'autres produits existent en pharmacie".

Sur le respect de la liberté d'expression

Attendu que l'article 10 de la cour européenne des droits de l'homme dispose que :
"Toute personne a droit à la liberté d'expression. Ce droit comprend la liberté d'opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu'il puisse y avoir ingérence d'autorités publiques et sans considération de frontiére. Le présent article n'empêche pas les Etats de soumettre les entreprises de radiodiffusion, de cinéma ou de télévision à un régime d'autorisations.

L'exercice de ces libertés portant des devoirs et des responsabilités peut être soumis à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions prévues par la loi, qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à l'intégrité territoriale ou à la sûreté publique, à la défense de l'ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, à la protection de la réputation au des droits d'autrui, peur empécher la divulgation d'informations confidentielles ou pour garantir l'autorité et l'impartialité du pouvoir judiciaire "

Attendu que selon les dispositions du 2ème alinéa de l'article 10 de la Convention européenne des droits de l'homme l'exercice de la liberté d'expression comporte des devoirs et des responsabilités ; qu'il peut être soumis à des restrictions ou sanctions prévues par la loi ;

Attendu que les propos tenus par SANTE PORT ROYAL sont de nature à jeter le discrédit sur l'Uvestérol et à inciter la clientèle de CRINEX à s'en détourner ;

Attendu que la lecture de l'article de Monsieur DOGNA est de nature à engendrer le doute des parents vis à vis de la prescription de leur médecin pour leurs enfants et notamment par les affirmations suivantes: "Que penser des médecins prescripteurs d'Uvestérol ? On est en droit de se poser des questions, partant du principe que tout ce qui est annoncé ici devrait faire part de leur culture professionnelle :

  • Soit ils ne s'intéressent pas vraiment à leur métier
  • Soit ils sont devenus de dangereux zombis irresponsables des grands labos
  • Soit ils ne respectent pas leur clientèle
  • Soit ils ont un intéressement dans leurs prescriptions
  • Soit ils sont carrément incompétents

Il y a de quoi être dubitatif devant la formule consacrée : demandez conseil à votre médecin traitant. Il n'y a hélas trop souvent que du mal â prendre. Dommage quant il s'agit de vos enfants..."

Attendu ainsi, que l'article incriminé ne rentre pas dans ce qu'appelle SANTE PORT ROYAL le débat public ;

Attendu que, contrairement aux affirmations de SANTE PORT ROYAL, l'article 1382 du code civil et la jurisprudence constante relative a la concurrence déloyale par dénigrement constituent une loi au sens de l'alinéa 2 de l'article 10 de la convention européenne des droits de l'homme ; que cette loi sanctionne le dénigrement, restreignant ainsi la liberté d'expression et sanctionnant le comportement délictuel de SANTE PORT ROYAL ;

Attendu en second lieu que les allégations de SANTE PORT ROYAL créent le doute sur la compétence et l'honneur des médecins et constituent un danger pour la santé, allant au delà de ce que devrait être un débat public ; qu'elles rentrent donc dans le champ des restrictions et limites prévues par la Convention européenne des droits de l'homme ;

Attendu que la jurisprudence de la cour européenne des droits de l'homme produite par SANTE PORT ROYAL ne trouve pas son application en l'espèce, soit qu'il s'agisse de débats à caractère politique (affaires Jean-Jacques Morel c/ France et Pinto Pinheiro Marques c/ Portugal), soit que le litige ait un caractère très général avec des propos nuancés (affaire Hretel c/ Suisse) ;

Ordonne à la SAS SANTE PORT ROYAL, sous astreinte de 1.000 € par jour de retard à compter du 5ème jour après la signification du présent jugement, dans la limite de 45 jours, durée au delà de laquelle il sera à nouveau fait droit, de :

  • supprimer l'article "Uvestérol : un complément inquiétant pour vos enfants", publié sur le site internet "Alternative santé" www.alternativesante.fr ainsi que tous les commentaires publiés sur le site, relatifs à cet article
  • cesser la diffusion du bulletin d'information intitulé "UVESTEROL, un poison pour vos enfants" adressé à tous les abonnés en date du 8 novembre 2014

fait injonction à la SAS SANTE PORT ROYAL de cesser tout acte de dénigrement à l'encontre de l'UVESTEROL et de la société la SA LABORATOIRE CRINEX,

Condamne la SAS SANTE PORT ROYAL à payer à SA LABORATOIRE CRINEX la somme de 30.000 € à titre de dommages et intérêts,

Condamne la SAS SANTE PORT ROYAL à payer à SA LABORATOIRE CRINEX la somme de 10.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires, ordonne l'exécution provisoire du présent jugement, en toutes ses dispositions,

Condamne la SAS SANTE PORT ROYAL aux dépens de l'instance, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 82,44 € dont 13,52 € de TVA.

En application des dispositions de l'article 871 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06/03/2015, en audience publique, devant M. Philippe Paris, juge chargé d'instruire l'affaire, les représentants des parties ne s'y étant pas opposés.

Ce juge a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré du tribunal, composé de :
M. Hervé Lefebvre, M. Philippe Paris et Mme Marie-Claire Bizot.

Délibéré le 13/03/2015 par les mêmes juges.

La minute du jugement est signée par M. Hervé Lefebvre, président du délibéré et par Mme Brigitte Pantar, greffier.

 

En aucun cas les informations et conseils proposés sur le site Alternative Santé ne sont susceptibles de se substituer à une consultation ou un diagnostic formulé par un médecin ou un professionnel de santé, seuls en mesure d’évaluer adéquatement votre état de santé


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