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Lyme : de nouveaux tests fondés sur les bactériophages

  • Lyme : de nouveaux tests fondés sur les bactériophages
Article paru dans le journal nº 70

Notre dossier de janvier 2019, consacré à la maladie de Lyme, concluait sur les recherches du Dr Louis Teulières et sur l’espoir d’une nouvelle génération de tests. Il semble que nous touchons au but. Une nouvelle façon de détecter les bactéries intracellulaires Borrelia, responsables de la maladie, vient d’être mise au point. Une bouffée d’oxygène pour les personnes malades non diagnostiquées ?

Elisa et Western-Blot : des tests dépassés

Au cœur d’une interminable polémique, ces tests proposés par la médecine conventionnelle ne satisfont personne. En cause, leur faible sensibilité qui aboutit à des faux négatifs (personnes malades non détectées) et à des impasses thérapeutiques. En l’absence de tests fiables, il est difficile pour les médecins de diagnostiquer la maladie de Lyme, tant ses symptômes sont variés et se confondent avec ceux de nombreuses autres maladies.

Ces tests recherchent dans le sang les anticorps dirigés contre la bactérie, ce qui pose d’emblée plusieurs limitations. Au stade précoce, c’est-à-dire en début d’infection, l’organisme n’a pas encore eu le temps de produire des anticorps. Ensuite, certains malades ne produisent pas d’anticorps, soit pour des raisons génétiques, soit parce que la bactérie a déjà neutralisé leur système immunitaire. Même s’ils produisent des anticorps, rien n’indique si les bactéries sont encore actives. Enfin, de nombreuses sous-espèces de Borrelia ne sont pas prises en considération.

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Les phages, régulateurs du monde microbien

Il se trouve qu’à chaque bactérie correspond un virus, appelé phage, qui limite son développement. C’est ce qui fait que nous ne croulons pas sous les bactéries. Soit le phage entre dans la bactérie pour la tuer directement (on parle de phage lytique), soit il va s’intégrer en elle pour en modifier les gènes (on parle de phage lysogénique). Il peut demeurer longtemps à l’intérieur, pendant des générations, puis un jour, pour une raison ou une autre, s’activer et exécuter son travail.

Les phages sont spécifiques des bactéries qu’ils infectent. En insérant leur matériel génétique dans les bactéries, ils peuvent les rendre plus vulnérables aux traitements. L’hypothèse est formulée qu’une partie de l’activité des antibiotiques serait due à leur capacité à activer les phages. Surtout, les phages traversent sans encombre les biofilms, qui permettent habituellement aux bactéries Borrelia de se dissimuler.

La PCR, une approche génétique

Les tests PCR (Polymerase Chain Reaction) détectent directement les agents infectieux, en traquant leur ADN. Il n’est pas nécessaire d’attendre que l’organisme de la personne infectée produise des anticorps, ni que les lymphocytes aient acquis la mémoire immunitaire. C’est donc un test particulièrement utile en phase précoce. Mais très vite, l’amplification en chaîne par polymérase se heurte aux mêmes limites que les autres tests, notamment au fait que la bactérie se cache rapidement dans les tissus et ne circule plus dans le sang. On ne sait pas davantage si les bactéries sont vivantes.

Le Pr Martha Clokie, chercheuse à l’université de Leicester en Angleterre, a mis au point un bactériophage contre la bactérie Clostridium difficile. Le Dr Louis Teulières, qui travaille depuis longtemps sur les bactériophages, a obtenu des financements en se joignant à son équipe. Et ils ont travaillé sur une autre piste.

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Traquer les phages : un test fiable et précis

Plutôt que cibler la bactérie Borrelia, nos chercheurs ont eu l’idée de créer un test qui cible le phage de Borrelia. Autrement dit, au lieu de partir à la recherche du gibier, on va rechercher le chasseur. Il y a dix à cent fois plus de phages que de bactéries et ils circulent partout, ce qui donne statistiquement beaucoup plus de chances de rencontrer un phage qu’une bactérie.

Si le phage est là, c’est que la bactérie s’y trouve également puisque le phage n’a pas d’autre utilité que de l’infecter. La différence majeure est que les phages sont présents seulement si les bactéries sont actives. Un test PCR positif aux phages est donc un diagnostic fiable d’une infection en cours.

Après trois ans de travail, l’équipe de recherche est parvenue à caractériser les phages spécifiques de toutes les souches connues de Borrelia, trouver des éléments communs à tous ces phages et sur cette base, à mettre au point un test PCR. Le projet est financé par Phelix, une œuvre de charité, sous la direction scientifique du CHU de Leicester.

L’avantage d’un test PCR-phages est qu’il intervient tout de suite, pour vérifier une infection après une piqûre de tique. Même en phase tardive, sa sensibilité est beaucoup plus importante, de l’ordre de 50 % en comparaison avec les PCR classiques. Un résultat positif malgré une absence de symptômes et même une bonne santé pourrait signifier que des bactéries sont présentes mais sont sous le contrôle d’un bon système immunitaire.

Elargir le champ d’action

Ce nouveau test est disponible depuis le 1er juillet. Il peut être commandé et réalisé auprès du laboratoire RED Laboratories. Son coût de 235 euros demeure pour le moment à la charge du patient. L’interprétation des résultats doit être assurée par un professionnel de santé suffisamment au fait de la maladie et formé à ce type d’approche.

Si le test est proposé par défaut sur un prélèvement sanguin, il est également possible à partir d’autres supports, comme une biopsie, le liquide céphalo-rachidien ou le liquide synovial d’une articulation. Le test de base devrait aussi être proposé sur prélèvement salivaire, c’est plus simple pour les enfants.

Les chercheurs veulent ensuite élargir ce test aux co-infections de la maladie de Lyme, comme les bactéries Rickettsia, Bartonella mais aussi les mycoplasmes. Pour ces derniers, une PCR basée sur les phages constituerait le premier test fiable. En effet, les mycoplasmes n’ayant pas de protéines de surface, la sérologie est inutile. Même la PCR classique n'est pas une garantie tant ce micro-organisme est difficile à débusquer.

Cette nouvelle approche a été présentée l’an dernier à la conférence de Chicago de l’association ILADS (International Lyme and Associated Diseases Society), et cette année lors de la conférence sur les crypto-infections à Dublin. Espérons que ces avancées mettent un terme à la cacophonie autour de la maladie de Lyme, et que les malades bénéficient enfin de diagnostics fiables.

 

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