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PEA, un bon antidouleur ? Pas seulement
Nous avions déjà évoqué le palmitoylethanolamide, ou PEA, pour ses remarquables actions antidouleur. Mais à la faveur de l’engouement des scientifiques pour ce lipide, on découvre aujourd’hui ses nouvelles vertus thérapeutiques, notamment concernant le système immunitaire, l’arthrose, l’allergie, le sommeil, et dans d’autres domaines où il s’avère plein de promesses.
Tout comme les oméga-3, le palmitoylethanolamide (PEA) fait partie des lipides les plus précieux de l’organisme. Mais les bénéfices qu’il peut apporter pour la santé dépassent de loin ceux des oméga, qui sont pourtant des remparts contre l’obésité et les maladies chroniques, et indispensables à la bonne santé des yeux et du cerveau.
En effet, les études se sont multipliées depuis quelques années, et montrent les très nombreuses qualités de cette "supergraisse " : un antidouleur 100 % naturel, qui est aussi un soutien de l’immunité, un antiviral et un anti-inflammatoire, excellent pour la santé du cerveau, neuroprotecteur, bon pour les articulations et le système cardiovasculaire, efficace pour le sommeil, et enfin – ce qui n’est pas la moindre de ses qualités –, prometteur pour combattre la maladie d’Alzheimer.
Le PEA est produit par le corps humain, mais en toutes petites quantités – qui ne font que diminuer avec l’âge. On en trouve principalement dans le cerveau, le foie, les muscles, les intestins et la peau, mais sa concentration est surtout importante dans les tissus abîmés, lésés ou qui subissent des dégénérescences. En effet, il participe à préserver l’équilibre et l’intégrité des organes. La production de cette molécule est activée " sur demande " dans des situations de stress, lors d’infections virales et bactériennes, dans les états d’inflammations, de douleurs et d’allergies, ainsi que lors des maladies cardiaques et rénales1.
Le corps fabrique du PEA, mais il peut aussi en puiser dans certains aliments, tels que le jaune d’œuf, le lait, le soja et dans l’huile d’arachide.
Un antiallergique prometteur
Les réactions allergiques telles que la rhinite allergique, la dermatite allergique et l’asthme allergique sont caractérisées par l’inflammation et l’infiltration inflammatoire des cellules. À la reconnaissance d’un facteur allergique, les mastocytes sont activés et ils « dégranulent », c’est-à-dire qu’ils activent des médiateurs tels que l’histamine, les cytokines et les chimiokines – des molécules-signal qui entraînent la réponse immunitaire, la contre-attaque du corps humain. L’effet antiallergique du PEA a été détecté dès l’article de Coburn de 1954, sur les propriétés antiallergiques du jaune d’œuf sur les cochons d’Inde2. Il y a pléthore d’études qui démontrent ces effets sur les animaux. Il y en a moins sur les humains, mais deux études sur des dermites atopiques soignées grâce au PEA, dont la seconde a permis de faire refluer l’eczéma et l’urticaire d’un enfant, sont également prometteuses.
Le grand oublié de la nutrition
Malgré tous des bénéfices pour la santé étayés, le PEA est encore le grand oublié de la nutrition et n’a pas été utilisé couramment par la médecine. Peut-être parce qu’elle était incapable d’expliquer son fonctionnement exact. Si ce n’était l’intérêt particulier que lui a porté la neurologue Rita Levi-Montalcini, prix Nobel de médecine en 1986, le PEA susciterait toujours la méfiance indue du milieu médical.
Car le PEA a été découvert dès 1954, lorsque des médecins ont observé une caractéristique anti-inflammatoire propre au jaune d’œuf. Trois ans plus tard, le PEA est isolé par Kuehl3. Jusqu’en 1979, les découvertes s’enchaînent, et il est enfin reconnu comme un soutien de l’immunité doté de propriétés anti-inflammatoire, antigrippe et anti-rhume. Mais les douze années suivantes, la recherche s’en désintéresse, jusqu’à ce qu’en 1992, donc, la Pre Levi-Montalcini commence à déceler sa capacité à empêcher le déplacement des mastocytes – des cellules responsables de l’inflammation – ainsi qu’à comprendre le rôle du PEA dans le système nerveux.
Cependant, la véritable révolution a éclaté dans les années 1990, lorsque les chercheurs ont percé le mystère d’un système de communication propre au corps humain et jusque-là méconnu, le système endocannabinoïde, ou SEC. C’est en découvrant le SEC, que la médecine a véritablement compris le fonctionnement du PEA, qui est intrinsèquement lié au SEC.
Le PEA, un remède aussi sûr que difficile à obtenir
Cela fait maintenant près de soixante-dix ans que le PEA est testé sur des humains. En 2016, une méta-étude, qui a regroupé 12 autres études sur des personnes atteintes de douleur chroniques ou neuropathiques, a montré qu’il n’y a eu aucun effet secondaire sur les 1 188 sujets traités au PEA, alors qu’ils ont reçu des doses conséquentes (1 200 mg par jour), entre un mois et un an4.
Mais le PEA est difficile à conserver et à métaboliser par l’organisme. Il y a déjà sa nature lipidique (c’est une « graisse »), donc il n’est pas soluble dans l’eau et a tendance à s’agglomérer. Mais surtout, c’est une molécule très « grosse » ce qui rend son traitement par l’intestin délicat. Les meilleurs producteurs de PEA ont donc mis au point des méthodes de fabrication pour parer à cela et rendre celui-ci plus biodisponible, par exemple via la micronisation, c’est-à-dire le broyage en particules très fines. Une autre voie prometteuse consiste à avoir un médium lipidique qui permet au PEA micronisé de se disperser dans le flux physiologique. Ce double traitement agit et sur la taille des particules et sur leur formulation, afin d’obtenir une dispersion aqueuse optimale malgré le caractère lipidique des ingrédients. Ce type de PEA dit biodisponible est utilisé dans la très grande majorité des études réalisées chez l’humain. Il permet une absorption gastro-intestinale qui atteint les mastocytes. Si aujourd’hui le PEA est indignement méconnu, on peut anticiper qu’il va bientôt devenir plus courant que le glutathion ou la CoQ10 dans notre tiroir à compléments alimentaires.
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Un super CBD ?
N’en déplaise à certains, il existe donc dans le corps humain, un système de communication nerveux qui utilise des molécules semblables à celles du chanvre : les endocannabinoïdes. D’où l’engouement actuel pour le CBD. Mais le gros avantage du PEA, c’est qu’il n’est pas cannabinoïde, et ne peut donc rebuter ceux qui refusent de prendre des extraits de chanvre. Il n’en active pas moins le SEC. Cette action est particulièrement intéressante car le système endocannabinoïde est d’une importance considérable pour le corps humain. Il contribue à maintenir l’homéostasie, c’est-à-dire l’équilibre fonctionnel de l’organisme : poids, température corporelle, glycémie, rythme cardiaque5… Le SEC est surtout représenté au niveau du système nerveux central mais il a aussi été détecté au niveau de tissus périphériques comme le système digestif, le foie et le pancréas, le système cardio-vasculaire, les poumons, le tissu adipeux, les glandes surrénales, le système reproducteur, la peau, les os et les muscles. On retrouve donc des récepteurs cannabinoïdes CB1 et CB2 dans presque toutes les cellules du corps.
Le SEC joue un rôle essentiel pour :
- la plasticité neuronale ;
- le contrôle des émotions ;
- les capacités d’apprentissage ;
- le contrôle de l’appétit ;
- la formation des cellules graisseuses ;
- la sécrétion d’adrénaline et de corti- costérone ;
- le fonctionnement du système cardio-vasculaire (vasodilatation et pression sanguine) ;
- le système digestif (contrôle de la motilité et des sécrétions intestinales) ;
- le contrôle de l’inflammation et de l’activité des cellules immunitaires.
Une complémentation en PEA permet d’activer ce système d’équilibrage du corps sans effet indésirable notable.
Un booster d’immunité
Dans les années 1960, le PEA a été utilisé pour la première fois pour le traitement prophylactique de la grippe et du rhume. L’intérêt pour la recherche a augmenté dans les années 1970, avec six essais cliniques confirmant l’efficacité du PEA sur les symptômes et l’incidence de la grippe.
Aujourd’hui, on comprend mieux les effets antiviraux du PEA, qui augmentent la résistance à l’infection. La grippe, par exemple, se caractérise par un état hyperinflammatoire appelé "tempête de cytokines ". Le PEA permet de réduire la production de ces cellules inflammatoires. Il en va de même pour les mastocytes, dont l’activité pro-inflammatoire est modulée, donc contrôlée. Mais la signalisation propre au bon fonctionnement du système immunitaire n’en est pas émoussée pour autant6.
Ainsi, le PEA protège des infections bactériennes et, administré en prophylaxie sur des souris méningitiques, a augmenté leur durée de vie en l’absence d’antibiotiques7. Des études similaires ont démontré que le PEA améliore la résistance aux infections bactériennes systémiques8.
Enfin, le PEA permet de combattre la dysbiose intestinale, en fabriquant des bactéries telles que Akkermansia muciniphila, qui a des effets protecteurs contre l’obésité et le diabète, ou encore Eubacterium, qui a des propriétés régulatrices du microbiote9. C’est la raison pour laquelle le PEA devient de plus en plus populaire en ce qui concerne la recherche sur le microbiote.
Le PEA se révèle donc particulièrement prometteur concernant ses effets sur la fonction immunitaire, documentés par pas moins de 350 articles universitaires révisés, incluant aussi bien des études sur les animaux que sur les humains10. Il est considéré comme un immunomodulateur d’avenir, d’autant mieux capable de canaliser les défenses immunitaires qu’il s’agit d’une molécule dont le modèle est inhérent au corps humain.
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Le PEA contre Alzheimer ?
L’inflammation neurologique joue un rôle clef dans les maladies dégénératives telles que la maladie d’Alzheimer ou celle de Parkinson, mais aussi dans l’épilepsie, les troubles cognitifs ou comportementaux. Les effets neuroprotecteurs du PEA sont dus à sa capacité à modifier l’activation des mastocytes, des microglies et des astrocytes, de façon que la résistance à l’infection soit améliorée sans activer l’inflammation11.
Dans les cas des maladies de Parkinson et d’Alzheimer, d’AVC, de thrombose et de traumatisme cérébral, un protocole à base de PEA a permis d’atténuer l’inflammation des neurones, de protéger les patients contre la dégénérescence neuronale et l’apoptose, d’éviter les effets dus à la toxicité du glutamate monosodique, d’inhiber le stress oxydatif, et de résorber les déficits comportementaux, les troubles de l’humeur et les difficultés locomotrices12.
Le PEA, associé à la lutéoline, améliore la fabrication de nouvelles cellules cérébrales : la neurogénèse13. Il facilite la plasticité synaptique, améliore les problèmes cognitifs14. Ceci peut être expliqué aussi par le caractère antidépresseur, anxiolytique et analgésique du PEA. D’autre part, la capacité du PEA à maintenir une barrière intestinale solide permet de prévenir les maladies neuro-dégénératives et les problèmes psychiatriques qui résultent de la perméabilité intestinale15.
Des premières études faites sur des souris atteintes de la maladie d’Alzheimer ont montré une efficacité des effets neuroprotecteurs du PEA. Effectivement, quoique les études ne soient pas toutes concluantes, sachant la complexité de la maladie d’Alzheimer et certains de ses mécanismes encore inconnus, la complémentation en PEA peut être considérée comme une piste sérieuse de traitement à court terme16.
Enfin, une étude terminée en 2021 sur les souris a montré que le PEA contrait l’inflammation intestinale et les dysfonctionnements moteurs intestinaux propres à la maladie d’Alzheimer. Ainsi, même dans une stratégie de traitement ciblée sur l’axe cerveau-intestin, le PEA pourrait jouer un rôle prometteur.
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Et pour dormir ? Ça marche aussi
D’abord, un antidouleur naturel capable d’atténuer les douleurs chroniques permet de passer des meilleures nuits. Car rien de pire, lorsqu’on souffre, que de ne pas pouvoir se reposer. Or les qualités antidouleurs et les vertus anxiolytiques du PEA en font un candidat de choix pour chercher un repos réparateur et bien mérité. Cela a d’ailleurs été prouvé dans une étude qui montre que le PEA, avant et après une opération, améliore le rythme circadien et la qualité du sommeil en général. La supplémentation en PEA améliore le temps nécessaire pour se sentir pleinement éveillé. C’est ce qu’a prouvé une étude publiée en 2021 sur les qualités somnifères du PEA17. Pareillement, les capacités intellectuelles au réveil sont améliorées, ce qui est avantageux car l’inertie du sommeil et la somnolence diurne sont des effets secondaires classiques des somnifères.
Et aussi pour les articulations
Il faut partir du principe que dans les cas d’inflammations chroniques (comme l’arthrose et l’arthrite par exemple), la production de PEA baisse mécaniquement. C’est là qu’une complémentation en PEA peut compenser cet épuisement, rétablir les mécanismes naturels de la réparation tissulaire, et atténuer la douleur. Ainsi, le PEA fait doublement du bien : il améliore la santé des articulations (qu’il est important de régénérer d’autre part avec de la glucosamine), et de l’autre, il atténue la douleur naturellement.
Une étude clinique a démontré que le PEA était plus efficace que l’ibuprofène pour atténuer la douleur due à une arthrite de l’articulation temporo-mandibulaire18. Une autre étude en double aveugle a démontré l’efficacité du PEA sur les patients atteints d’arthrite du genou, avec une réduction de la douleur articulaire entre 40 et 50 %. Des réductions de la douleur au bout de trois jours et une diminution conséquente dans les deux semaines après début du traitement ont également été observées dans une autre étude en double aveugle.
Les résultats de ces études sur les qualités antidouleur, anti-inflammatoires et réparatrices du PEA en font un futur classique dont il serait dommage de nous passer.
Références bibliographiques
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