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Canal carpien, misez sur la routine préventive

  • Certaines personnes souffrant du syndrome du canal carpien refusent la cortisone ou n’y ont tout simplement pas droit.Certaines personnes souffrant du syndrome du canal carpien refusent la cortisone ou n’y ont tout simplement pas droit.
Article paru dans le journal nº 109

Mal aux causes multiples, ce syndrome qui résulte de la compression du nerf médian du poignet engendre une douleur au niveau de la main pouvant aller jusqu’à une altération de la motricité des doigts. Pour y remédier et éviter, si possible, l’intervention chirurgicale, des alternatives existent, moins invasives et qui ont fait leurs preuves.

Le poignet et les doigts sont faits de peu de muscles. Ils sont essentiellement composés de tendons et de canaux, tel le fameux canal carpien, qui peut faire beaucoup souffrir. « C’est aussi le siège de deux articulations majeures : le carpe, ou poignet, et le pouce, explique le Dr Marc Pérez*, qui pratique depuis plus de trente ans la médecine du sport et la médecine manuelle ostéopathique à l’Hôtel-Dieu et dans son cabinet parisien, et dont les pathologies de la main et du pied sont les spécialités. Les personnes viennent consulter pour ce syndrome parce qu’elles ressentent des fourmillements et des engourdissements dans les doigts (principalement le pouce, l’index et le majeur) qui s’aggravent la nuit, car le poignet est parfois plié, ce qui crée des réveils fréquents. Ces personnes consultent donc quand cela impacte leur sommeil. Elles peuvent aussi subir une perte de force musculaire dans le poignet et la main et une douleur qui peut irradier dans l’avant-bras, parfois même jusqu’à l’épaule. » Ces manifestations peuvent être liées à des travaux manuels impliquant par exemple l’utilisation d’un marteau-piqueur et générant des vibrations. Elles peuvent aussi découler d’un traumatisme du poignet, de changements hormonaux pendant la grossesse, de maladies auto-immunes, du diabète ou encore de pathologies liées à l’âge, à l’instar de l’arthrose. « Le syndrome est en rapport avec une compression du canal carpien, qui abrite le nerf médian (moteur et sensitif) et les tendons fléchisseurs des doigts. Le nerf médian peut être comprimé au niveau du poignet, des cervicales et de la moelle épinière. Les facteurs de risque sont liés à des tâches nécessitant des gestes répétés du poignet et de l’avant-bras comme l’usage fréquent de la souris d’ordinateur », poursuit le médecin.

Un syndrome pas toujours douloureux

« Le syndrome du canal carpien est bien sûr détectable en ostéopathie. Il n’est pas toujours accompagné d’une douleur, parfois seulement d’une différence de sensibilité, relève l’ostéopathe Alain Lavallée. Je reçois environ un patient par trimestre venant spécifiquement pour ce syndrome, et un patient par semaine ne sachant pas qu’il en souffre. Je pense qu’en la matière, nous devrions prendre exemple sur les Asiatiques qui se distinguent par une culture de la prévention. » Le Dr Pérez va dans le même sens et indique qu’une routine de gymnastique matinale, à base de gainage et de postures de yoga, impliquant le corps entier, apporte un gain de souplesse préventif. Ceci en particulier si le métier exercé est propice au développement de ce syndrome.

Auto-traitement sur dix jours

Pour traiter ce syndrome, le Dr Pérez préconise la médecine intégrative basée sur la neuralthérapie, la mésothérapie, l’acupuncture, l’auriculothérapie et l’ostéopathie, mais surtout la pratique de l’ostéo-gym. Reposant sur un protocole d’autotraitement, la méthode d’ostéo-gym du thérapeute ne s’accomplit pas sans avoir en tête quelques conseils élémentaires. Ainsi, dans les activités quotidiennes, il est préconisé, en cas de tâches répétitives, de reposer les mains et les poignets régulièrement, de les étirer, de changer souvent de position et d’alterner si c’est possible les tâches assignées à chaque main. Le Dr Pérez conseille d’éviter de tenir les objets du bout des doigts, mais de les tenir à pleines mains. Au bureau, il est recommandé de ne pas « casser » le poignet en tenant la souris ou en tapant sur le clavier. L’emploi d’un repose-poignet ou d’un coussin ergonomique conçu pour cet usage est conseillé, le bras et la main devant être placés dans le même axe. Ceci bien intégré, le protocole d’autotraitement sur dix jours peut être déployé.

  • Les jours 1 et 2 sont dédiés aux automassages, dont l’objectif est de calmer les douleurs aiguës. Pour cela, attraper le pouce avec la main opposée et tirer dessus pendant dix secondes. Relâcher. Faire de même pour tous les autres doigts, puis passer à l’autre main. Ensuite, effectuer un roulage des tendons à l’aide de la pulpe de l’index et du majeur : rouler les tendons du poignet interne puis les relâcher brusquement. Recommencer dix fois de suite. Faire de même sur la face externe du poignet, puis sur l’autre main. La compression des points douloureux peut soulager : chercher du bout des doigts ces points et masser en rotation horaire ou antihoraire, selon l’efficacité. Palper la peau et les muscles au-dessus, notamment sur l’avant-bras et à la base du cou peut être bénéfique, car une douleur au poignet est parfois le signe d’une douleur projetée.
  • Les jours 3 et 4, dans le but d’augmenter la mobilité et de relâcher la contracture musculaire, l’autotraitement consiste à se livrer à des étirements et des raccourcissements. Tout d’abord, pour étirer les doigts, poser le coude sur la table, et avec l’autre main, étirer les doigts vers l’arrière et relâcher. Refaire l’exercice dix fois de suite, en accompagnant le mouvement vers l’arrière. S'ensuit l’auto-raccourcissement qui s’opère en fermant le poing et en repliant le poignet vers l’intérieur et en maintenant la position 90 secondes, avant de relâcher doucement.
  • Les jours 5 et 6 sont consacrés à la remobilisation de la zone touchée, d’abord en secouant les poignets dans tous les sens, ensuite en les tournant comme dans un jeu de marionnettes, et enfin en tirant sur chaque doigt l’un après l’autre en leur faisant faire des rotations dans un sens puis dans l’autre.
Les jours suivants sont, entre autres, centrés sur l’entretien de la souplesse articulaire et le renforcement du tonus et de la force musculaires.

Mésothérapie et neuralthérapie en réponse aux contre-indications médicamenteuses

Certaines personnes souffrant du syndrome du canal carpien refusent la cortisone ou n’y ont tout simplement pas droit, notamment en cas de diabète ou de grossesse. Dans ces cas-là, le Dr Pérez fait appel à la mésothérapie, qui consiste en injections sous-cutanées de produits anti-inflammatoires à base de mesocaïne : « Cette technique permet de traiter avec une faible quantité de produit en regard de la pathologie. Le produit reste dans le derme pendant dix à quinze jours en agissant lentement. On répète les séances tous les quinze jours jusqu’à la guérison. » La neuralthérapie, quant à elle, est une technique mise au point par des anesthésistes germaniques. En injectant des anesthésiques à travers une aiguille à proximité des nerfs en lien avec la région à opérer, ils se sont rendu compte que la procaïne atténuait la souffrance induite par les nerfs, les oxygénaient et les cicatrisaient. Ils l’ont ensuite déployée comme une méthode de soin.

Avant la chirurgie, l’ostéopathie…

« En cabinet, je réalise souvent les mêmes exercices que ceux proposés dans l’autotraitement, simplement, j'y mets plus de force, fait savoir le Dr Pérez. Je manipule aussi les os du poignet et les cervicales 6 et 7 qui correspondent au poignet. J’adapte le traitement aux désirs et aux contraintes du patient. » Les femmes enceintes ne prendront pas de médicaments. Les personnes ne souhaitant pas prendre de cortisone pourront passer par la neuralthérapie et la mésothérapie. « En cas de douleur aiguë, je préconise de porter, au moins durant quinze nuits consécutives, une orthèse la nuit afin de mettre l’articulation du poignet au repos, continue-t-il. Cela évite de plier le poignet dans tous les sens ou de l’écraser avec le poids de la tête ou du corps. »

… et/ou la médecine chinoise

« Lorsqu’un patient vient me voir pour un syndrome du canal carpien, il espère en général éviter l’opération chirurgicale, rapporte Alain Koreneff, praticien en médecine chinoise. À partir de là, je ne me focalise pas directement sur la zone du canal carpien, mais sur la globalité de la personne. En fonction de la situation identifiée, et sans rentrer dans les détails, on se servira de formules de plantes, des aiguilles d’acupuncture, de la chaleur avec la moxibustion, du massage Tui Na (qui comprend aussi une partie de normalisations ostéoarticulaires : le Zheng Gu Tui Na) ou du qi gong. En médecine traditionnelle chinoise, nous adaptons la thérapeutique au terrain de la personne, à l’histoire de la maladie, et aux circonstances d’apparition de la perturbation. »

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« Pour le choix entre la chirurgie et la médecine chinoise, poursuit Alain Koreneff, le premier choix est celui du patient. Toute approche thérapeutique a ses avantages et ses inconvénients, et tout l’art de soigner est un compromis entre les bénéfices escomptés et les risques, en médecine conventionnelle comme en médecine chinoise. La correction chirurgicale est plus invasive et radicale, mais elle est susceptible d’entraîner une perte de force dans la main et le poignet. Les solutions en médecine chinoise sont, elles, plus modulées en fonction du patient, et ne sont pas aussi définitives ; une fois que le ligament annulaire est sectionné, il n’est pas évident de pouvoir réparer après cicatrisation. »

Quand la chirurgie devient inévitable

À un stade plus avancé, la motricité fine peut être touchée et la situation se détériore malgré des infiltrations de corticoïdes ou de procaïne. La chirurgie peut se révéler alors inévitable. Le traitement consiste en la libération chirurgicale du nerf. La microchirurgie, dite invasive endoscopique, repose sur la réalisation d’un petit orifice où est introduit un fibroscope à l’aide d’une caméra. Le rétinaculum, une partie du ligament annulaire, est alors coupé sans dégâts collatéraux. Cette méthode est, selon le Dr Pérez, très efficace et fonctionne si l’autotraitement ou l’ostéo-gym sont appliqués en rééducation pour éviter les récidives. Elle est incontournable après avoir essayé en vain l’ostéopathie, la médecine chinoise, les infiltrations, et si l’électromyogramme fait apparaître une forte détérioration du nerf qui ne permettra pas de développer une récupération.« Je recommande toujours de consulter un médecin spécialiste de l’appareil locomoteur. Ceci pour établir le diagnostic précis et l’évaluation de l’urgence chirurgicale.Si l’électromyogramme fait état d’un début de paralysie, la non-intervention entraîne une perte de motricité, de force, des douleurs chroniques et une perte de la sensibilité définitive, soutient le Dr Pérez. D’où l’intérêt de la médecine intégrative et d’un dialogue entre médecins spécialistes et thérapeutes non-médecins. »

 

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