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La lecture  : une véritable thérapie ?

  • Lire relâche les tensions et a des effets régulateurs sur l’humeur.Lire relâche les tensions et a des effets régulateurs sur l’humeur.
Article paru dans le journal nº 92

« Une lecture amusante est aussi utile à la santé que l’exercice du corps », disait au XVIIIe siècle Emmanuel Kant. Certes, mais les bienfaits de la lecture n’étaient vantés que pour ses vertus sur l’orthographe ou pour muscler sa culture générale. Ça, c’était avant, car les études se multiplient et, chose étonnante, avèrent des atouts réels sur la santé, y compris chez des patients souffrant de maux tenus pour inguérissables tels la maladie d’Alzheimer.

Lire, est-ce bon pour la santé ? Oui, on peut le dire haut et fort. Dévorer des livres ou de copieux articles contribue à protéger notre psychisme et notre corps contre toutes sortes d’agressions sanitaires et de pathologies. Les observations cliniques apportent aujourd’hui des démonstrations précises et quantifiées des bénéfices médicaux de la lecture.

La question ne date pas d’hier, mais elle prend un tour scientifique fascinant. On a longtemps dû se contenter de toutes sortes d’élucubrations sur le sujet, le livre ayant eu souvent mauvaise presse par le passé. Samuel-Auguste Tissot, le médecin des princes du XVIIIe siècle, considérait, dans Gens de lettres, que la lecture pouvait entraîner des pathologies graves : « Peut-être que de toutes les causes qui ont nui à la santé des femmes, la principale a été la multiplication infinie des romans depuis cent ans. »

Des médecins du siècle suivant s’en inspiraient volontiers, allant même jusqu’à interdire à leurs patients et leurs patientes de se plonger dans les livres ou encore dans la musique, y compris dans les ouvrages de sciences, y voyant la cause de nombreuses perturbations : tristesse, mélancolie, langueur, mal-être, paresse, hypocondrie et, pour tout dire, hystérie. Autant d’états qui leur paraissaient en contradiction avec la guérison en général.

Toutes ces craintes médicales issues de supputations fumeuses ont vécu, il faut s’en réjouir. On peut enfin lire pour le plaisir… et pour se fortifier ! Même si l’on rencontre parfois, et de nos jours encore, l’idée que les livres sont un obstacle à la vie, voire qu’ils sont responsables d’une féminisation des lecteurs mâles ; les médecins n’y contribuent plus.

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Un accompagnement pour les malades d’Alzheimer

Des études confirment que la lecture régulière a un effet étonnant contre la survenue de pathologies neurodégénératives, de type maladie d’Alzheimer ou démence sénile. Tout en sachant que leurs causes sont plurifactorielles, lire apparaît être un facteur protecteur1 avec parfois des effets curatifs ou freinant l’aggravation chez des patients déjà atteints, en associant lecture et activité physique2.

Concrètement, lire renforce les synapses existantes et favorise nettement la production de nouvelles synapses, au point de compenser la perte des neurones détruits par la dégénérescence chez une partie des patients. Alors que l’industrie pharmaceutique n’a pas encore trouvé un médicament digne de ce nom contre la maladie d’Alzheimer, ou un traitement susceptible d’apporter aux patients une rémission sérieuse et présentant un rapport bénéfice-risque vraiment favorable, la lecture se révèle être une alternative inestimable sur tous les plans.

Délicieuse, la lecture accomplit ses bienfaits en faisant oublier l’effort derrière le plaisir de partager des émotions et des connaissances. Elle améliore la mémoire et la réflexion par une gymnastique cérébrale jubilatoire. Lire, même un roman sans prétention, invite à se souvenir d’innombrables événements et indications sur les personnages, leur portrait, leurs sentiments, leur quête, leurs contradictions, leurs rencontres… Sans compter les lieux et les gestes significatifs, et bien sûr la progression des intrigues. Un miracle, l’air de rien. Et tout ça, en réussissant à la présenter comme un moment de détente et de repos, le comble ! L’invention de ­l’écriture alliée à celle de l’imprimerie et à l’art des auteurs n’ont donc pas fini de nous surprendre.

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Contre l’insomnie et les pathologies qui en découlent

Plus prodigieuse encore, et toujours aussi discrètement, la lecture a des effets indirects très positifs en améliorant l’accès au sommeil, quand le corps réclame sa nuit. Apaisante et propice à la rêverie, elle y contribue puissamment, sans présenter les effets indésirables des tranquillisants et des somnifères, lesquels peuvent être des contributeurs aux neurodégénérescences, tout particulièrement les benzodiazépines3… On sait tous que le livre aide à l’endormissement, mais sans en mesurer la portée médicale.

Cette vertu est d’autant plus précieuse que des études récentes montrent que le manque de sommeil est l’un des facteurs déterminants des maladies neurodégénératives. L’Inserm souligne que de plus en plus de données pointent ce lien. Sans compter les innombrables autres affections que l’insomnie contribue à générer ou à chroniciser en affaiblissant notre organisme tout entier. Et c’est aussi à ce niveau que la lecture peut avoir un rôle salubre outre ses effets contre les facteurs d’insomnie tels le stress et l’anxiété

Le manque de sommeil

L’Inserm a rappelé, en avril 2021, que le risque de maladie d’Alzheimer et de démence sénile est « plus élevé de 20 à 40 % chez les personnes dont la durée du sommeil est inférieure ou égale à six heures par nuit à l’âge de 50 ou 60 ans4 » par rapport à une durée de sommeil de sept heures. Ce surcroît de risque est saisissant.

Contre l’agressivité, le stress, l’anxiété, l’enfermement

On connaît le vaste catalogue de maux que favorisent le stress et l’anxiété : agressivité, dépressions, troubles ­cardio-vasculaires, cancers… Lire relâche les tensions et a des effets régulateurs sur l’humeur. Le plaisir du texte et l’appropriation des pensées d’un auteur nous distraient de nos propres soucis professionnels ou personnels. L’effet anxiolytique de la lecture est aussi avéré5 et permet d’éviter du même coup de prendre des tranquillisants.

En nous libérant peu ou prou de nous-mêmes, la lecture nous permet de transcender ce qui nous arrive en multipliant les perspectives sur le monde. Elle nous ouvre à d’autres regards, tout en accomplissant un paradoxe : elle accroît notre capacité de concentration. Autre paradoxe, cette activité solitaire est un apport précieux contre l’isolement et l’égocentrisme maladif : elle favorise notre disponibilité envers autrui et l’intérêt collectif. Elle contribue à ­développer notre faculté d’empathie, elle-même source d’équilibre et de bien-être social bénéfique pour la santé6.

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Jusqu’à l’allongement de l’espérance de vie !

Beaucoup de patients seraient prêts à payer cher pour s’offrir des médicaments aussi performants et, cerise sur le clafoutis, sans autre risque que de prolonger leur espérance de vie en bonne santé. Une étude a, en effet, mis en évidence cet allongement, en enquêtant sur une cohorte composée de 3 635 participants âgés de plus de 50 ans, tout en prenant en compte un maximum de variables (comorbidités, âge, sexe, éducation, richesse, situation matrimoniale…)7. « Les lecteurs de livres ont connu une réduction de 20 % du risque de mortalité au cours des douze ans de suivi par rapport aux non-lecteurs de livres », concluent les chercheurs.

Alors, verra-t-on bientôt des soignants et des aidants formés à la prescription de lecture aux patients en soins préventifs et en réponse aux troubles cognitifs avancés ? C’est déjà le cas pour une petite partie d’entre eux. Il est possible de leur (re)donner le goût de la lecture avec des formules de stimulation adaptées. C’est, par exemple, ce que proposent l’organisme, basé à Paris, Montessori Lifestyle et ses formateurs, sur le territoire européen ou en ligne, pour aider les malades d’Alzheimer et leurs accompagnants à se réapproprier les vertus du livre, en institution ou à domicile, individuellement ou collectivement.

On peut aussi sensibiliser les proches du malade aux bienfaits de la lecture. Pareillement, les expériences de lecture conviviale à voix haute sont très positives pour les uns et les autres et permettent de nourrir des complicités affectives et intellectuelles. Une autre idée simple est ­d’offrir au patient, à l’occasion des fêtes, des livres ou des revues adaptées à ses goûts. Ou l’édition personnalisée d’un album de photos de famille avec des légendes pour stimuler son esprit et entretenir joyeusement ses bons souvenirs. Il peut être réactualisé au gré des nouveaux événements.

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L’analphabétisme, facteur de prédisposition

Des examens médicaux et des tests de mémoire réguliers étalés sur deux ans portant sur 983 personnes, dont une partie était analphabète, ont permis aux chercheurs de conclure, en 2019, que les participants ne sachant ni lire ni écrire avaient beaucoup plus de risques de développer une démence que les autres, soit « presque trois fois plus susceptibles de souffrir de démence au départ par rapport aux participants alphabétisés »8. Rien moins !

Le support papier, un meilleur outil pour la mémoire

Profitons des vacances estivales pour lire. Rappelons au passage que le support papier est préférable à l’écran lumineux des tablettes ou des ordinateurs qui fatigue les yeux et consomme de l’énergie électrique. Une enquête de référence menée par des chercheurs norvégiens a fait ressortir, en interrogeant les lecteurs d’une histoire mise à leur disposition sur papier et ceux qui l’avaient lue sur une liseuse, que les premiers s’en souvenaient beaucoup mieux et avec plus de détails9. La lecture numérique, en faisant défiler le texte, incite à une lecture en survol et par sauts ; une lecture économe en quelque sorte, mais moins bonne pour la mémoire, expliquent les auteurs.

Le livre en papier présente, en outre, le suprême avantage d’être plus écologique car il est composé de fibres végétales et fonctionne sans batterie, simplement aux photons solaires !

 

Références :

 

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