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L’antibiorésistance en baisse chez les animaux, mais gare au rebond !

  • 5 000 décès par an sont imputables à l’antibiorésistance.5 000 décès par an sont imputables à l’antibiorésistance.
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La santé vétérinaire s’évertue depuis une décennie à diminuer l’usage des antibiotiques chez les animaux pour préserver la santé humaine. Des efforts qui payent : l’exposition des animaux aux antibiotiques aurait diminué de moitié depuis 1999 selon le dernier rapport de l’Anses. Mais cette baisse s’essouffle alors que le recours aux solutions naturelles n’est toujours pas réglementé.

Après dix ans de pédagogie, d’efforts et deux plans nationaux pour faire passer le message, les résultats sont là. L’utilisation des antibiotiques en élevage ainsi que chez les animaux domestiques aurait chuté de 45 %, atteignant l’objectif fixé par le plan Ecoantibio 2 (plan pluriannuel mis en place par le ministère en charge de l'agriculture pour lutter contre l'antibiorésistance), note l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) dans son rapport publié le 18 novembre dernier (1).

Un combat majeur car le recours sans mesure à ces traitements avait provoqué une hausse de l’antibiorésistance animale, c’est-à-dire que certaines bactéries étaient devenues résistantes aux antibiotiques. Or, l’animal peut transmettre ces bactéries à l’homme, et inversement, par contact direct ou par le biais de la chaîne alimentaire. De ce fait, l’homme peut à son tour devenir réfractaire aux traitements.

C’est un enjeu de santé publique crucial dans la mesure où plus de 5 000 décès par an sont imputables à l’antibiorésistance selon le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (2). Pour Gérard Moulin, directeur adjoint de l’Agence nationale du médicament vétérinaire (ANMV), les plans d’alerte et de prévention portent leurs fruits : « L’exposition à la colistine, un antibiotique utilisé fréquemment en médecine vétérinaire et réservé aux cas sévères en médecine humaine a diminué de 66 % par rapport au niveau de référence de 2014-2015 pour les filières bovine, porcine et avicole. »

Mais si ces derniers temps l’exposition animale aux antibiotiques diminue toujours, elle commence à ralentir. On atteindrait même « une phase plateau », commente Gérard Moulin. Et la tendance s’inverse même chez certaines espèces. Ainsi, entre 2019 et 2020, les traitements ont augmenté pour les lapins (+ 2,5 %), les bovins (+ 2,9 %), ainsi que pour les chats et les chiens (+ 5,1 %). Une hausse chez les animaux de compagnie qui pourrait s’expliquer, selon le rapport, par une plus grande attention portée à leurs symptômes pendant les confinements.

Pour les bovins, les vétérinaires expliquent que les conditions météo ont déclenché des maladies respiratoires et des inflammations des pis (mammites) nécessitant plus d’antibiotiques. Des explications conjoncturelles certes, mais un programme de recherche a été lancé malgré tout pour étudier les mécanismes de la transmission à l’humain de bactéries résistantes aux antibiotiques par contact avec les animaux de compagnie. Et l’Anses de recommander, par mesure de précaution mais également de manière assez peu réaliste, de se laver les mains après avoir touché son animal domestique

S’il est illusoire d’imaginer, en l’état actuel des connaissances, pouvoir se passer totalement des antibiotiques pour soigner les animaux, comment limiter davantage encore leur prescription ? L’une des pistes évoquées clairement par les vétérinaires à l’Anses est le recours aux traitements alternatifs de phytothérapie et d’aromathérapie. Ce que les autorités sanitaires encouragent officiellement depuis plusieurs années sans pour autant avoir édicté une réglementation valable sur la question.

Conséquence ubuesque : les vétérinaires et les éleveurs n’ont pas le droit, théoriquement, de traiter leurs bêtes avec des plantes, sauf en cure préventive ou sous forme de complément alimentaire. Une impasse thérapeutique qui a conduit l’Anses à mener, depuis un an, une étude concernant « l’état des connaissances sur les huiles essentielles et les plantes d’intérêt pour la phytothérapie et l’aromathérapie des animaux producteurs de denrées alimentaires » (3).

Le rapport, chargé d’évaluer les bénéfices/risques de ces médecines alternatives, devrait être publié au plus tard en janvier prochain, avec le projet de saisir ensuite l’Agence européenne du médicament sur ces questions. Il serait grand temps en effet que la réglementation s’adapte avec rigueur et sans dogmatisme aux spécificités des traitements en phytothérapie et en aromathérapie. Car les plantes ont un mode d’action bien distinct des médicaments allopathiques, tant en médecine animale qu’humaine.

 

Références

(1) https://www.anses.fr/fr/content/r%C3%A9sistance-aux-antibiotiques-chez-les-animaux-quelles-sont-les-principales-conclusions-pour

(2) "Attributable deaths and disability-adjusted life-years caused by infections with antibiotic-resistant bacteria in the EU and the European Economic Area in 2015: a population-level modelling analysis"

(3) https://www.anses.fr/fr/system/files/ANSES-RA2020-ANMV.pdf (page 8)


 

En aucun cas les informations et conseils proposés sur le site Alternative Santé ne sont susceptibles de se substituer à une consultation ou un diagnostic formulé par un médecin ou un professionnel de santé, seuls en mesure d’évaluer adéquatement votre état de santé