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Faire l'ascension du mont Blanc en jeunant

  • "Jeûner, c’est aussi économiser l’énergie utilisée pour digérer et la dépenser différemment"
Article paru dans le journal nº 59

Isabelle Finck-Bertheux est une fervente défenseuse du jeûne, qu’elle pratique depuis une quinzaine d’années. Très active, elle a décidé de mener l’ascension du mont Blanc, à jeun, les 12 et 13 juillet. Une semaine auparavant, elle nous a expliqué pourquoi et comment elle se lançait dans un tel défi.

Alternative Santé : Pourquoi entreprendre l’ascension du mont Blanc à jeun ?

Isabelle Franck : C’est très simple : parce que je pratique le jeûne et que je suis une montagnarde. Les sommets, c’est mon truc. J’en ai déjà gravi à jeun plusieurs dans les Pyrénées (le pic Aneto, qui culmine à 3 404 m, le mont Perdu, à 3 355 m). Cette fois-ci, j’ai choisi le mont Blanc (4 810 m), car il dépasse les 3 500 m d’altitude, limite au-delà de laquelle survient le mal aigu des montagnes. Or je veux repousser mes limites et celles du jeûne. Pour cela, je serai évidemment accompagnée par un guide de montagne, ancien secouriste. L’alpinisme n’est pas simple, et en faire aussi haut, à jeun, c’est une nouveauté pour moi et mon organisme.

Quand avez-vous commencé à jeûner ?

Il y a une quinzaine d’années de cela. Prise par une sinusite qui ne voulait pas partir même après plusieurs traitements antibiotiques, j’ai décidé de jeûner. Dès le premier jour, mes ganglions avaient disparu ! Et le deuxième, j’étais guérie. Un tel résultat m’a bluffée. Quelques temps plus tard, j’ai renouvelé l’expérience pour un problème de santé plus grave, des kystes ovariens. Au bout d’un mois de jeûne, j’étais très amaigrie, mais les kystes avaient disparu ! Là, c’est mon médecin qui n’en est pas revenu. Ça a été le début d’une nouvelle philosophie de vie. Forte de ces expériences et de mes recherches sur le sujet, je pratique depuis le jeûne intermittent quotidiennement, en mangeant sur une plage de trois heures dans la journée, et je fais au moins un jeûne long (environ 15 jours) par an. Ma santé, en tous points, n’a jamais été aussi bonne.

Comment menez-vous cette pratique, et que vous apporte-t-elle ?

Pour moi, le jeûne alimentaire est également une démarche mentale et spirituelle. Nous vivons dans une société où tout va très vite, où la surconsommation inhibe nos aspirations, où nous perdons le sens de la vie et des plaisirs. Jeûner, c’est revenir au plus proche de soi, de ses sensations et de ses émotions. C’est réapprendre au corps à se régénérer seul et mobiliser ses ressources d’auto-adaptation. Jeûner, c’est aussi économiser l’énergie utilisée pour digérer et la dépenser différemment. Enfin, cela permet de limiter les dépenses financières… Je me considère comme une épicurienne : je profite des bonheurs de la vie, je m’entoure de gens passionnés qui me nourrissent intellectuellement et spirituellement. J’aime bouger et être en activité, c’est mon caractère. J’aime aussi beaucoup manger, alors jeûner décuple la saveur et le plaisir des aliments. Même si 80 % de mon alimentation est végétale, je reste omnivore. Un bon magret de canard en fin de journée est très appréciable ! Le jeûne me procure un sentiment de liberté : à l’écoute de mes réels besoins, je suis maître de moi-même.

Qu’en pensent vos proches et les autres sportifs ?

Les étrangers que je rencontre, notamment les sportifs, sont interpellés par ma pratique. Pour certains, le jeûne est encore inadapté au sport, mais quand ils me voient en pleine forme, parfois même en meilleure santé qu’eux, ils veulent en savoir plus. Le père de mes enfants reste mon premier supporter. Comme je suis très occupée par mes activités, il s’assure de la logistique familiale en m’encourageant à aller toujours plus loin. Mes enfants ne jeûnent pas comme moi, mais ils sont très fiers de leur maman et me soutiennent tous les jours. Je ne suis pas « perchée », comme certains pourraient croire, mais plutôt d’une nature pragmatique. Quand on me rencontre, on se rend bien compte que mon mode vie n’a rien d’illuminé : il est totalement en accord avec mon tempérament pêchu et mon esprit épicurien, mais surtout, il me fait du bien.

Comment va se passer l’ascension ?

Je vais commencer à jeûner trois jours avant, pour mobiliser les ressources de mon corps. Ensuite, la montée se fera en deux étapes : une première jusqu’au refuge de la Tête rousse, à 3 165 m d’altitude, et une seconde jusqu’au sommet. Puis je redescendrai. Durant la montée et la descente, je serai en jeûne hydrique, c’est-à-dire que je pourrai boire : même s’il fait froid en altitude et que l’on transpire peu, l’effort réalisé demande beaucoup d’eau. Un jeûne sec n’est pas envisageable. Une fois de retour, je poursuivrai mon jeûne durant 15 jours en encadrant un groupe de jeûneurs, mais j’alternerai un jour sec (sans eau) et un jour hydrique. Ce sera donc un des jeûnes longs de mon année 2018.

Que voulez-vous montrer par cet exploit sportif ?

À travers cette ascension, je veux dire à tout le monde que le jeûne est bon pour la santé et qu’il peut être grandement utile dans le sport. Sa pratique est critiquée et parfois étouffée, car elle serait risquée. Il est vrai que jeûner ne se fait pas n’importe comment, qu’il faut savoir écouter son corps, reconnaître les signaux qui nous disent qu’il faut boire, manger, se reposer, bouger. Cela demande un travail sur soi, proche de la pleine conscience. Jeûner pour jeûner ou pour perdre du poids, sans éveiller sa pleine conscience, ne sert à rien et peu s’avérer dangereux. Je souhaite, en opposition au mode de surconsommation et de disruption que l’on nous propose et qui nous empoisonne, présenter le jeûne comme une véritable philosophie de vie dans laquelle on prend le temps d’apprécier les choses à leurs justes valeurs. Ma quête ne s’arrêtera pas à cette ascension : en janvier prochain, j’ai prévu de courir le marathon de Marrakech à jeun.

 

En aucun cas les informations et conseils proposés sur le site Alternative Santé ne sont susceptibles de se substituer à une consultation ou un diagnostic formulé par un médecin ou un professionnel de santé, seuls en mesure d’évaluer adéquatement votre état de santé


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