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RISUG : bientôt une nouvelle contraception masculine ?

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Article paru dans le journal nº 74

Depuis cinquante ans, la pilule et le stérilet ont révolutionné la vie des Françaises. Côté messieurs, la contraception prendrait plutôt les airs d’un long serpent de mer. Mais il y a quelques semaines, une nouvelle venue d’Inde enthousiasmait les esprits : une contraception masculine ultra-efficace et sans effets secondaires aurait passé avec succès les tests sur sujets humains. Il s’agit du RISUG, acronyme de Reversible Inhibition of Sperm Under Guidance (inhibition réversible contrôlée du sperme). Comment fonctionne cette nouvelle contraception masculine ? Est-elle réellement sans effets secondaires ? On vous explique tout.

Un bouchon pour bloquer les spermatozoïdes

Le principe du RISUG consiste à injecter une sorte de gel synthétique pour boucher le canal par lequel passent les spermatozoïdes avant l’éjaculation. L’opération se fait sous anesthésie locale et ne dure pas plus de quinze minutes. Le médecin réalise une petite incision de la peau située en haut de chaque testicule ou pince la peau sans l’inciser. Il cherche ensuite le canal qui emmène le sperme des testicules vers la verge, le pince et y injecte une petite quantité d’un gel synthétique qui vient le boucher. Le polymère injecté bloque le passage des spermatozoïdes (trop gros pour se frayer un chemin) et altère leur capacité fertilisante mais laisse circuler librement les autres fluides corporels.

Composé d’un copolymère (l’acide maléique-styrène) que l’on fait réagir chimiquement avec du dimethyl sulfoxide, le gel injecté est un assemblage de grosses molécules synthétiques de la même famille que les résines ou la cellulose. Il serait efficace jusqu’à treize ans après l’injection. Si l’homme veut concevoir avant ce délai, une nouvelle injection d’un second produit vient dissoudre le bouchon de gel et permet à nouveau le passage des spermatozoïdes.

Un fonctionnement mystérieux, même pour ses inventeurs

Que deviennent alors les spermatozoïdes ? Au départ, les scientifiques pensaient que le pH du gel tuait tout simplement les spermatozoïdes mais des recherches ont montré que cette action seule ne suffisait pas à expliquer l’aussi grande efficacité du dispositif. On pense désormais que la réaction chimique engendrée par le contact du spermatozoïde avec le gel du RISUG entraînerait un gonflement puis une « explosion » de la tête des spermatozoïdes qui seraient alors déchiquetés en pièces non fonctionnelles avant d’atteindre l’autre côté du bouchon formé par le gel.

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Efficace à 100 % et sans effets secondaires ?

Les tests cliniques publiés en septembre dernier ont été menés dans trois hôpitaux indiens entre 2000 et 2002 sur 133 jeunes hommes hétérosexuels vivants sous le même toit que leur compagne. 83 % des hommes l’ayant testé étaient considérés comme infertiles moins de deux mois après l’injection. Les 17 % restant le devenaient trois à six mois après. L’efficacité établie serait pour l’heure de 100 % puisqu’aucune grossesse n’a eu lieu chez les compagnes des hommes testés.

Comme l’indiquent les chercheurs « aucun effet secondaire grave n'a été observé après l'injection de RISUG chez les volontaires et leurs partenaires ». Chez la majorité des patients, un léger gonflement de la peau qui enveloppe les testicules a été observé dans la semaine suivant l'injection mais a disparu au bout d'un mois sans traitement médicamenteux. 36 % ont noté une légère douleur aux testicules, disparue en un mois également et 23 % ont développé un nodule scrotal (sorte de petite boule qui se forme à l’endroit de l’injection) qui a disparu en six mois chez la majorité des individus. Enfin, l'échographie réalisée six mois après l'injection n’a décelé aucune anomalie sur l’ensemble des hommes testés.

Toutefois, certains scientifiques s’interrogent sur le peu d’études disponibles sur les polymères utilisés dans le gel et leur réelle innocuité à long terme sur les patients et leur descendance. D’ autres pointent du doigt le faible échantillon de patients testés ou l’absence d’études démontrant la réversibilité du processus chez l’être humain et pas uniquement sur l’animal. Enfin, des chercheurs de l’Université de Virginie s’inquiètent des données de certains essais cliniques réalisés sur des animaux qui montrent que le RISUG peut endommager le sperme et les tissus des organes reproducteurs mâles.

Une méthode découverte il y a 40 ans freinée par l’industrie pharmaceutique ?

Si le grand public n’a entendu parler que très récemment de cette méthode, la première étude portant sur cette méthode remonte à 1979 . Après de premiers tests prometteurs sur les animaux, des tests sur l’humain avaient été réalisés dès 2014. Mais alors pourquoi le développement de ce contraceptif masculin met-il tant de temps ?

Selon le docteur Sujoy K. Guha, l’un de ses inventeurs qui se confie au média indien indépendant The Wire : « Le principal opposant au RISUG n’est pas le gouvernement (NDLR : indien) mais le lobby pharmaceutique international. » En effet, le gouvernement indien a lui-même financé la majorité des recherches sur le RISUG mais, comme l’explique Guha, les instances de santé américaines préféreraient « promouvoir un nouveau médicament [à base d’hormones comme la pilule pour homme] qui implique une ingestion régulière » et donc plus de profits à long terme. Selon Guha, les institutions américaines auraient donc volontairement soulevé des questions sur le RISUG afin de retarder sa mise sur le marché américain et, selon les confessions que lui aurait faite un ancien secrétaire d’état à la santé, « même à l'OMS, il y [aurait] des gens qui ne veulent pas que ce dispositif voie le jour ».

Une commercialisation encore incertaine en Europe

En 2010, la fondation Parsemus (une organisation américaine à but non lucratif) a déboursé 100 000 dollars pour s’offrir le brevet du RISUG. Elle entend développer la méthode sous une autre forme qui a plus de chances d’être commercialisée aux États-Unis puis en Europe : le Vasalgel (qui bloque simplement les spermatozoïdes sans utiliser les propriétés chimiques du RISUG).

Après avoir été testé avec succès en 2016 et 2017 sur des rats, des lapins et des singes, le Vasalgel doit désormais être testé sur les humains afin d’espérer pouvoir être commercialisé dans la décennie à venir aux États-Unis puis très certainement ensuite en Europe.

 

En aucun cas les informations et conseils proposés sur le site Alternative Santé ne sont susceptibles de se substituer à une consultation ou un diagnostic formulé par un médecin ou un professionnel de santé, seuls en mesure d’évaluer adéquatement votre état de santé


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