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Collaboration Cochrane : chasse ouverte aux lanceurs d’alerte ?

  • Collaboration Cochrane : chasse ouverte aux lanceurs d’alerte ?
Article paru dans le journal nº 60

Le 13 septembre, la collaboration Cochrane, spécialisée en production de méta-analyses, a brutalement renvoyé un de ses fondateurs, Peter Gotzsche. La question de l’évaluation des médicaments et comme toujours, les enjeux financiers liés, semblent au centre de l’affaire.

On a appris l’éviction brutale le 13 septembre dernier de Peter Gotzsche de la collaboration Cochrane, l’organisation la plus connue et respectée du monde scientifique pour son indépendance et son sa rigueur, composée de 11000 chercheurs et médecins bénévoles. Sa spécialité ? Produire des « méta-analyses », c’est-à-dire des revues critiques de toutes les recherches sur un médicament ou un problème de santé donné pour parvenir à « tout ce qu’on peut dire avec certitude là-dessus à partir des preuves dont on dispose ». Directeur du centre Cochrane d’Europe du Nord, Peter Gotzsche était un des membres fondateurs de l’organisation. Il y a collaboré durant vingt-cinq ans et était l’auteur de 17 méta-analyses.

Si tous les éléments n’ont pas encore émergé sur cette affaire, Gotzsche était connu pour ses prises de position tranchées, n’hésitant pas à mettre en péril les intérêts de l'industrie pharmaceutique – qu’il compare d’ailleurs au « crime organisé ». Il avait notamment critiqué l’usage excessif et dangereux des mammographies comme outil de prévention. En 2015, il avait dénoncé dans un livre les dangers des prescriptions banalisées de médicaments psychotropes, affirmant, chiffres à l’appui, qu’ils étaient la troisième cause de mortalité en Grande-Bretagne. Une analyse sur les psychotropes qui en rejoint d'autres sur le sujet.

Des pressions, des critiques et des plaintes

Avec la branche nordique de Cochrane, Gotzsche avait critiqué en 2016 avec une grande sévérité l’opacité, et les conflits d’intérêts au sein de l’Agence européenne du médicament, notamment ses méthodes dans le traitement des alertes d’effets indésirables graves du vaccin Gardasil contre le papillomavirus (HPV). Mi-septembre, dans le BMJ, il critique cette fois, avec deux autres chercheurs, la qualité et la méthodologie d’une méta-analyse très rassurante de Cochrane sur ce même Gardasil, affirmant notamment qu'ils avaient ignorés des notifications d'effets indésirables graves. Et ils ne sont pas les seuls à tirer la sonnette d’alarme à ce sujet.

Pour ne pas avoir lavé son linge salle en famille, avoir terni la "réputation" de la collaboration Cochrane (organisation qui a touché plus de 1 million de dollars de donation de la Fondation Bill et Melinda Gates, très engagée dans les campagnes de vaccination) et avoir dénoncé l’influence grandissante et néfaste des laboratoires dans la recherche et les conflits d’intérêts, y compris au sein de sa propre organisation, ce franc-tireur a été évincé. Après vingt-cinq ans de bons et loyaux services pour l’intérêt général, il n’a pu « s’expliquer » que cinq minutes devant le conseil d’administration de Cochrane… À la suite de cette décision, cinq des treize membres du conseil d’administration ont démissionné en protestation.

« Comme la plupart des gens le savent, mon travail n’est pas très favorable aux intérêts financiers de l’industrie pharmaceutique. À cause de cela, Cochrane a subi des pressions, des critiques et des plaintes. Mon expulsion est une des conséquences de ces campagnes. Or ce qui est en jeu, c’est la possibilité de produire les informations médicales crédibles et dignes de confiance dont la société a besoin », rappelait Gotzsche, il y a quelques jours, sur son blog personnel.

En mars 2019, Peter Gotzsche a fondé, l'institut pour la liberté scientifique (Institute for Scientific Freedom), dont les principes fondateurs sont :

  1. Toute science devrait essayer de s'extraire des conflits d'intérêt financiers.
  2. Toute science devrait être publiée le plus tôt possible et rendue accessible à tous.
  3. Toutes les données scientifiques, y compris les protocoles d'étude, devraient être accessibles gratuitement, permettant aux autres de mener leurs propres analyses.

Références :

- Le blog de Peter Gotzsche

- L'institut pour la liberté scientifique

"The Cochrane HPV vaccine review was incomplete and ignored important evidence of bias", BMJ

- "Response to Cochrane editors: Jørgensen, Gøtzsche and Jefferson"

 

En aucun cas les informations et conseils proposés sur le site Alternative Santé ne sont susceptibles de se substituer à une consultation ou un diagnostic formulé par un médecin ou un professionnel de santé, seuls en mesure d’évaluer adéquatement votre état de santé