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La Méthode Padovan De la marche… à la mise en marche du cerveau
Enfants présentant des troubles du langage ou du comportement, adultes victimes de trauma ou d’AVC… Et si l’on soignait plutôt les causes profondes que les symptômes ? Et si le cerveau et la plasticité neuronale étaient une clé d’entrée majeure pour changer ? La méthode Padovan intéresse les orthophonistes, ergothérapeutes, kiné ou psychologues intrigués par les difficultés d’apprentissage ou de rééducation. Une méthode singulière qui réhabilite le « marcher-parler-penser » qui fait le propre de l’homme !
Pas un jour sans que de nouvelles recherches en neurosciences ne viennent conforter l’idée de l’efficacité d’une trilogie corps-pensée-esprit mise en avant par les Anciens. On a longtemps cru que le capital neuronal de la naissance ne pouvait ni évoluer ni se renouveler. Or ces dix dernières années ont mis en évidence que notre système nerveux n’est pas achevé à la naissance. Que si les cellules sont bien là, la création de connexions ne se fait qu’à partir de stimulations sensorielles, motrices, affectives ou culturelles. C’est à partir de cet éclairage que l’on peut mieux comprendre la méthode Padovan de réorganisation neurofonctionnelle (RNF).
Une approche singulière qui intéresse tout autant l’enfant lassé de devoir chaque semaine aller s’asseoir devant son orthophoniste, des parents désolés d’avoir un hyperactif qu’on devrait soigner en permanence avec des tranquillisants, ou l’adulte handicapé des séquelles d’un AVC ou d’un accident de voiture…
Une recherche empirique
Tout commence par un « amour immense » pour les enfants, assorti toutefois de la « frustration » de ne pas les aider assez. Dans les années 1970 au Brésil Béatriz Padovan est professeur à l’école Rudolf Steiner de São Paulo. Malgré une attention intense aux élèves, des difficultés d’apprentissage ou d’écriture, mais aussi de comportement ou de relation aux autres se multiplient chez certains. Cette singulière pédagogue passe de longues heures en dehors des cours à tenter de les soutenir au mieux.
Frustrée, elle quitte l’école pour se former à l’orthophonie, qu’elle ira jusqu’à enseigner ! Las, les résultats, une nouvelle fois, ne sont pas à la hauteur. Beatriz Padovan témoigne encore aujourd’hui : « En répétant beaucoup, on pouvait apprendre un peu. Mais la dynamique était limitée. De surcroît, certains bons résultats faisaient apparaître d’autres difficultés ! »
Marcher-parler-penser
C’est dans cet état d’esprit qu’une révolution s’impose à elle suite à la lecture d’une conférence de Rudolf Steiner. Le philosophe visionnaire y développe sa théorie sur le « marcher-parler-penser ». Il insiste pour expliquer qu’un développement harmonieux de l’humain passe par trois stades qui se font la courte échelle ; l’étape du « marcher » qui prépare celle du « parler » qui prépare l’étape du « penser ».
Qu’il y a là des interactions neurobiologiques inextricables et que le cerveau se construit en parallèle du corps. Steiner estime que d’éventuelles difficultés ultérieures feront souvent écho à des étapes problématiques rencontrées lors des sept premières années de la vie dédiées à ces premières expériences du marcher-parler-penser. CQFD.
Beatriz Padovan fait le lien avec sa propre expérience insatisfaisante de thérapeute. Et si travailler les difficultés du « parler » en se contentant de rééduquer la parole était une impasse ? Et s’il fallait plutôt travailler l’étape précédente, celle correspondant à la marche ?
Interactions neurones-marche
Toujours à cette époque, elle découvre aussi les travaux d’Henri Piaget, de Luria Vigotski et d’Henri Wallon qui lui confirment qu’il y a sûrement un nouveau chemin à emprunter. Et les travaux de Temple Fay l’interpellent sérieusement. Ce neurochirurgien américain, spécialisé dans la récupération de patients gravement atteints, cherche a priori comment récupérer le système nerveux central à partir de la périphérie.
Avec une équipe, il entreprend un singulier travail, caméra à l’épaule, afin de filmer les différentes phases de l’apprentissage de la marche chez les enfants issus de différents pays. À l’issue de ce tour du monde, il publie ses conclusions, partout sur la planète, de mêmes étapes, de mêmes mouvements, sauf bien sûr en cas de handicaps ou de principes d’éducation hors normes. Temple Fay répertorie alors la succession des séquences vers la marche, commune à tous, qu’il nomme patterns ; le « rouler », puis le « ramper » puis le « marcher à quatre pattes » qui permettent partout au jeune de rencontrer sa spécificité dans le monde du vivant ; de défier l’apesanteur et de se redresser !
Mais le neurologue a plus qu’un regard d’anthropologue. Il relie ces patterns à des moments clés de la maturation neurologique. Pour constater lui aussi que, de l’horizontal du berceau à la verticale de l’adulte, le système nerveux de l’enfant vient à maturité par étapes, partant des circuits les plus inconscients – via la moelle épinière ou le cervelet – pour aller jusqu’au cortex qui permet la pensée consciente.
Une méthode originale
Rudolf Steiner, Temple Fay, c’est à partir de ces deux inspirants chercheurs que Beatriz Padovan met au point sa méthode dite de « réorganisation neurofonctionnelle ». En remontant dans le temps et dans la mémoire archaïque. L’idée centrale est de repasser à travers des circuits neuronaux où certains processus n’auraient pas été respectés. Avec un objectif ambitieux : que la répétition de gestes facilite une réorganisation globale qui aura des effets correcteurs sur l’être en difficulté.
Elle imagine donc des protocoles, très codifiés, pour ses séances. On y retrouve d’abord une récapitulation des mouvements depuis le berceau jusqu’à la station debout. Elle peaufine aussi la logique de la maturation neurologique, puisque, en se redressant, le petit être a libéré ses bras et ses mains et s’en est servi pour tenter de communiquer, elle va donc adjoindre des exercices des membres supérieurs.
Même autre apport original à partir de ses propres recherches sur les fonctions de la bouche à travers le temps. La bouche sert d’abord aux fonctions réflexes végétatives (respiration, succion, déglutition, mastication). Or les mêmes circuits servent ensuite pour la parole. L’amélioration des aspects de base du « parler » devrait donc être facilitée par une récapitulation des mouvements premiers de la bouche. Enfin, pour stimuler l’organisation temporelle, Beatriz Padovan impose un rythme. Et tous ses exercices sont accompagnés de comptines ou de poèmes rythmiques.
Des effets multiples
« Celui qui respecte ce que la sagesse de la nature nous montre a moins de risques de se tromper ! » avertit depuis quarante ans la conceptrice de cette approche qui touche au système nerveux dans son ensemble. Qui a vite constaté que les séances ont des effets bien au-delà d’une modification sur la plainte d’origine.
Ainsi un enfant venu consulter pour des problèmes de langage ou d’apprentissage, peut bénéficier d’autres effets non mentionnés au départ : énurésie, incapacité à se motiver ou à organiser son travail, troubles du sommeil ou de l’orientation, manque de joie de vivre… Reste un bémol : on ne réorganise pas un encodage neurologique en une ou quelques séances seulement. Et même si certains effets se font sentir vite, il faut de la patience et de l’opiniâtreté. Tout dépend bien sûr de l’intensité de la pathologie d’origine. Mais aussi de la qualité du thérapeute formé correctement à cette approche ambitieuse qui combine apparente simplicité à magie évolutive du cortex humain…
Pour qui, comment ?
La méthode Padovan RNF est (le plus) souvent prescrite pour des enfants présentant des troubles du langage ou du comportement : dyslexie, dyscalculie, dyspraxies, instabilité comportementale, hyperactivité ou troubles du tonus… Toutefois, elle est aussi très utile aux adultes souffrant par exemple de bégaiements, ou qui ont été victimes de traumatismes, d’accidents de la route, d’AVC, de troubles neurologiques ou de dégénérescence du système nerveux, etc. Elle participe en effet de la stimulation de la plasticité neuronale, autrement dit de la capacité du cerveau à réorganiser de nouveaux circuits quand certaines zones ont été endommagées.
Les séances commencent d’abord sur un tapis de sol afin de pouvoir repasser par les zones neuronales activées au moment des premières étapes vers le « marcher ». Les autres exercices physiques suivent par ordre chronologique du développement, incluant des mouvements neuro-évolutifs de la bouche, des bras ou mains, et des yeux… Les exercices sont très précis. Par exemple : simuler la position du bébé qui, jambe et tête du même côté, suce son pouce ; ou étirer un gros orteil du pied vers son corps allongé ; ou encore marcher à quatre pattes en veillant à bien allonger la jambe opposée au bras… Même des adultes partiellement handicapés peuvent faire ces mouvements à condition qu’ils soient correctement encadrés par le thérapeute. En moyenne, il faut une vingtaine de séances pour obtenir des changements sur les symptômes les plus lourds.
Une thérapie exigeante
Peut-on ou non toucher au système nerveux central et au corps sans risque ? Sonia Padovan, médecin et fille de Beatriz, insiste pour que les thérapeutes soient correctement formés. Parce que les protocoles sont précis et puissants, celle qui supervise au nom de sa mère les formations dans le monde n’accorde pas de diplôme à des non professionnels de la santé. Toutefois, les deux premiers modules (sur cinq) sont ouverts à des particuliers comme des parents par exemple, afin de leur donner quelques bases pour aider leurs enfants selon la RNF.
Christiane Fontaine, logopédiste et présidente de l’association Synchronicité, qui regroupe les praticiens RNF en Europe francophone, approuve l’exigence de ces formations. « La RNF ouvre de nouveaux circuits. Et parfois les exercices peuvent réveiller des moments douloureux qu’il faut savoir accompagner. »
Pour ce faire, elle-même a choisi de compléter son travail par une formation en « gestion mentale ». Mais elle vient surtout de lancer des expériences de semaines intensives de travail avec la méthode Padovan aux côtés de confrères formés à la PNL, l’EMDR ou d’autres approches cognitivo-comportementales. Elle reste toutefois enthousiaste. « J’ai bien plus de résultats avec la méthode Padovan qu’avec les autres approches d’orthophonie. En quatre ou cinq séances, on observe que les enfants retrouvent une joie de vivre. Ils sont heureux de ces exercices physiques qui sollicitent tout leur être et qui les changent de séances de travail répétitif devant un bureau ou des cahiers ! Ensuite, on peut passer – si nécessaire – à un travail plus classique. » Elle constate que, grâce à la RNF, les choses sont plus vite assimilées. Quant aux adultes : « Ils font volontiers les exercices au sol, aussi incongrus soient-ils, quand on leur en a expliqué les principes dans le cadre de l’évolution neuronale. »
Pour aller plus loin
• Synchronicité, association francophone des praticiens de la réorganisation neurofonctionnelle, méthode Padovan.
www.synchronicite.fr
• Carrel, centre de formation en France supervisé par Sonia Padovan.
www.carrel.fr
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