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Viande de labo, c’est non !

  • Des cellules de viande, plongées dans un milieu nutritif pour se reproduireDes cellules de viande, plongées dans un milieu nutritif pour se reproduire
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Il paraît que nous pourrons bientôt consommer de la viande ou du poisson sans avoir besoin du moindre animal ! Finis les abattoirs, finie l’exploitation animale, les aliments du futur seront des aliments cellulaires.

 

La recette ? Prélevez un peu de muscle sur une vache, ou prenez quelques cellules musculaires souches stockées dans l’une des banques de cellules déjà existantes, mettez-les en culture dans un bioréacteur avec un milieu nutritif adapté et à la température qu’il faut (37 °C pour les cellules des mammifères, 15 °C à 30 °C pour celles des poissons), laissez les cellules se multiplier, récoltez puis rincez avec soin.

Le résultat ? Plus proche du hachis insipide que de l’entrecôte ou du filet de saumon ! Mais, pour le plaisir du palais (!), la recette propose d’ajouter arômes, agents de texture, colorants et autres additifs, et pour la valeur nutritive, on n’oubliera pas d’ajouter quelques vitamines (comme la B12), du fer et des lipides… ouf !

Mais pourquoi des aliments cellulaires ?

Les aliments cellulaires sont réputés meilleurs pour le climat et pour le bien-être des animaux .

Côté climat, ils représentent la promesse de la fin des émissions monumentales de méthane liées à l’élevage intensif et aux flatulences permanentes des animaux qui le composent. Un méthane 400 fois plus impactant sur le réchauffement climatique que le dioxyde de carbone. Mais tout n’est probablement pas aussi vert que sur le papier : dans un contexte actuel de non-transparence, tant à l’égard du consommateur que des instances de surveillance de l’environnement, les entreprises ne sont même plus tenues de communiquer leurs émissions polluantes... Or, il va sans dire que les banques de cellules, les bioréacteurs et autres processus de transformation alimentaire émettent du CO2, consomment de l’eau et d’autres ressources.

Côté bien-être animalier, ce n’est pas tant les cellules qui vont servir à faire « pousser la viande » (prélevées sur un animal ou provenant d’une banque de cellules souches) que les procédés de fabrication qui interrogent : les produits à base de viande de poulet cellulaire (produits aux USA) qui ont été mis sur le marché à Singapour à la fin de 2021 ont ainsi été fabriqués en utilisant du sérum fœtal de veau comme milieu nutritif, ce qui a nécessité d’abattre des vaches gestantes afin de prélever du liquide amniotique – les défenseurs de la cause animale apprécieront... D’autres techniques ont depuis été développées pour éviter cette pratique peu éthique, mais elles sont loin d’avoir résolu toutes les questions, en particulier sanitaires, sur ces nouveaux produits.

Des risques inconnus pour notre santé

Même si les industriels jurent la main sur le cœur ne plus utiliser de sérum fœtal de veau, bien des mystères planent encore sur la composition du milieu nutritif qui sert à cultiver les cellules. Car pour se multiplier, les cellules ont besoin de facteurs de croissance et d’hormones, autant de produits interdits habituellement dans l’élevage ! Sans oublier le recours massif aux antibiotiques pour garantir qu’elles ne soient pas contaminées par d’indésirables bactéries. Certes, le produit final, « parfaitement rincé », ne devrait plus contenir aucun résidu de ce milieu nutritif, mais comment le vérifier sans connaître la composition dudit milieu nutritif ? Le désormais sacro-saint secret industriel ainsi que le fait que les aliments doivent en être totalement débarrassés avant consommation évitent aux industriels d’avoir à la faire figurer sur l’étiquette !

Un rapport conjoint de l’OMS et de la FAO (1), instances onusiennes chargées respectivement de la santé et de l’alimentation, est entièrement consacré à la sécurité de ces nouveaux aliments cellulaires : paru le 5 avril, il se fonde sur de nombreuses consultations d’experts du monde entier et suggère que du point de vue de la santé « les risques des aliments issus des cultures cellulaires ne sont pas plus élevés que ceux issus de l’élevage intensif ». Cet argument, qui se veut rassurant, l’est-il vraiment ?

Autre question : ces aliments ne seraient-ils pas cancérigènes ? Pour pouvoir croître et se multiplier à l’infini, les cellules doivent être au préalable rendues génétiquement « immortelles » en inhibant le gène qui commande leur sénescence et leur mort. Techniquement parlant, ces cellules sont donc précancéreuses, voire totalement cancéreuses !

Les instances onusiennes balayent toute crainte en avançant des arguments scientifiques consensuels : « Une fois récoltées, les cellules immortalisées, hors de leur milieu de culture, meurent et perdent leur capacité à se reproduire. Sans compter que la cuisson des aliments, puis leur digestion par notre organisme suffisent à anéantir toute signature génétique extérieure susceptible de venir les contaminer . »

Néanmoins, force est de constater qu’il n’y a jamais eu d’études sanitaires prouvant que la viande de synthèse ne présente aucun risque pour la santé ! Et on voit mal comment la viande rouge de synthèse serait moins cancérigène que la viande rouge de boucherie si elle en reproduit fidèlement la composition !

De la viande cellulaire bientôt en France ?

Dans une récente tribune parue dans le journal Le Monde (2), plusieurs scientifiques ont mis en garde contre une autorisation trop rapide de la viande de synthèse. Quelques jours après, les industriels français de la viande de synthèse « ripostaient » dans Le Journal du dimanche (3), plaidant pour un financement public de la recherche sur le sujet. Il s’agissait plus précisément des représentants de deux start-up françaises : l’entreprise Gourmey, installée à Genopole à Évry-Courcouronnes et lauréate 2022 d’un programme financé par la Commission européenne (« Horizon 2020 ») pour son projet de « foie gras cellulaire » (garanti sans gavage d’oie), et l’entreprise Vital Meat, filiale du géant français de l’industrie agroalimentaire Grimaud Frères, qui annonce déjà sur son site Internet (4) cultiver de la viande de poulet « saine, délicieuse, nutritive »...

La viande de synthèse serait-elle donc sur le point d’arriver sur le marché européen ? Oui, à en croire l’agitation des politiques : en début d’année, une mission d’information sénatoriale sur l’alimentation cellulaire a été lancée et elle a auditionné toutes les parties prenantes du secteur – industriels, chercheurs, éleveurs, cuisiniers et politiques. Dans leur rapport paru le 7 avril (5), les sénateurs expriment leur opposition à la viande de synthèse, « une rupture anthropologique complète, menaçant notre culture alimentaire »,mais soulignent en même temps la nécessité d’en financer la recherche, compétitivité française oblige...

Si nombreux sont ceux qui s’offusquent de cet avenir culinaire 2.0, qui tient plus du laboratoire pharmaceutique que de la cuisine traditionnelle, nos instances décisionnaires semblent déjà acquises à sa cause : l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) trouve qu’il s’agit là d’une solution innovante et prometteuse alors que les besoins en protéines animales devraient augmenter de 60 % sur la planète à l’horizon 2050.

On peut déjà anticiper que l’agence européenne ne se montrera pas trop regardante sur les dossiers que présenteront les industriels... Rappelons ici que l’EFSA n’est dotée d’aucun laboratoire et ne fait aucune analyse d’aucune sorte, se contentant d’émettre un avis préalable sur les dossiers qui lui sont présentés, avis qui n’est d’ailleurs que consultatif puisqu’il peut être contourné par la Commission européenne, seule habilitée à délivrer les autorisations de mise sur le marché. La commission est probablement aussi acquise à la cause de la viande cellulaire, puisque tous ces projets innovants s’inscrivent dans, et sont parfois financés par le bien mal nommé programme « De la ferme à l’assiette » (Farm to Fork) du Pacte vert européen pour des « systèmes alimentaires juste, sains et écologiques ».

Dans un contexte de guerre en Ukraine, avec une croissance de l’inquiétude concernant les chaînes d’approvisionnement alimentaire, et de postpandémie – où l’élevage intensif a mauvaise presse en raison du risque de zoonose (grippe aviaire par exemple) –, l’Europe a déjà déclaré vouloir « sécuriser » la production de protéines animales. Sous la pression des lobbys d’industriels de la viande cellulaire comme Cellular Agriculture Europe (Agriculture cellulaire Europe), la viande cellulaire pourrait arriver bien plus vite qu’on ne le pense sur le marché.

Et, même si certains, comme le gouvernement italien, tentent de s’y opposer, rien ne semble pouvoir empêcher ces produits, déjà présents aux USA et en Asie, d’inonder les marchés (6)... Sauf, évidemment, un boycott de principe des consommateurs de tous les produits transformés !

 


 

En aucun cas les informations et conseils proposés sur le site Alternative Santé ne sont susceptibles de se substituer à une consultation ou un diagnostic formulé par un médecin ou un professionnel de santé, seuls en mesure d’évaluer adéquatement votre état de santé


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