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Droit dans le mur… autonettoyant
On n’arrête pas le progrès. Et ce n’est pas toujours une bonne chose. Dans le bâtiment, on invente aujourd’hui des murs autonettoyants imprégnés de nanoparticules de dioxyde de titane. Certes, pour un résultat plus blanc que blanc, mais l’environnement et la santé risquent de faire grise mine.
Paris est Ville Lumière et compte bien le rester. Pour y parvenir, quoi de mieux que d’avoir des bâtiments aux murs d’un blanc perpétuellement immaculé ? Un objectif qui semble impossible à atteindre, tant la pollution, les gaz d’échappement et les moisissures envahissent la capitale… Sauf qu’aujourd’hui, la nanotechnologie redistribue les cartes en inventant des murs révolutionnaires bourrés de nanoparticules de dioxyde de titane aux vertus autonettoyantes. Et il ne s’agit pas que de spéculation : dans le XVIIe arrondissement, 74 logements et commerces vont être construits avec cette nouvelle technologie.
À l’origine de cette innovation, un problème propre à tous les bâtiments : les façades noircissent avec le temps, et les UV du soleil sont trop faibles pour dégrader les micro-organismes qui s’y développent. C’est tout l’intérêt de ce béton : potentialiser l’efficacité des UV en y amalgamant un catalyseur spécifique, l’oxyde de titane, pour faire office d’amplificateur. Et comme cet oxyde est censé ne pas se dégrader, il serait efficace pendant des années. Ce sont les sociétés de ravalement qui vont faire la gueule, pendant que les syndicats de copropriétaires sableront le champagne…
Propriétés inégalées
Pour préciser, le dioxyde de titane a deux propriétés : il est photocatalytique et hydrophile. La photocatalyse est une réaction chimique présente naturellement dans l’environnement, mais sans un accélérateur de processus, elle agit très lentement. Ce processus permet de détruire les composés organiques volatils (COV), les particules et l’ozone, mais également d’éliminer les micro-organismes tels que les bactéries, les virus, les moisissures et autres champignons. Ces caractéristiques sont connues depuis au moins dix ans et ont fait l’objet de nombreux développements industriels.
Les propriétés hydrophiles du dioxyde de titane permettent à l’eau de former un film continu plutôt que des gouttelettes, empêchant notamment la formation de buée. Elle peut donc s’écouler régulièrement. Les salissures, qui se fixent normalement au mur lorsque l’eau s’évapore, sont alors drainées avec le liquide, et les moisissures, décomposées par la photocatalyse, ne peuvent pas se fixer. D’où le caractère autonettoyant des murs traités au dioxyde de titane, qui constitue une aubaine pour toutes les nouvelles constructions. À première vue.
Pollution aquatique
Premier problème, et de taille : les conséquences environnementales, car les murs ne sont pas neutres de ce point de vue. La dégradation des oxydes d’azote, issus des moteurs de véhicules, produit des nitrates. Une bonne partie de ces substances est éliminée avec l’eau de pluie et se retrouve dans les cours d’eau. Si les oxydes d’azote sont des polluants de l’air, les nitrates, eux, polluent l’eau en favorisant la croissance des végétaux aquatiques dans les rivières. On pense au problème des algues vertes en Bretagne dues aux nitrates de l’agriculture. À quand la saturation de la Seine, de la Loire et du Rhône par ces algues nocives ?
Cancérogène possible
L’environnement, mais aussi la santé. Le 10 mars 2006, le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) a classé le dioxyde de titane cancérogène possible pour l’homme (catégorie 2B). Chez le rat exposé à ce composé, un impact toxicologique pulmonaire à long terme a été observé, avec « saturation de la clairance pulmonaire accompagnée d’une inflammation pulmonaire chronique, de la production d’espèces réactives de l’oxygène, d’une diminution des mécanismes de défense (antioxydants), d’une altération des cellules, d’une prolifération cellulaire et d’une fibrose ».
Des tests in vitro montrent une toxicité cellulaire de type inflammatoire (stress oxydant). Autre inconvénient, les réactions chimiques se font à la surface des murs afin d’accroître leur efficacité. Il est donc important que les particules soient les plus élevées possibles.
Pour cette raison, cette substance est utilisée sous forme de particules nanométriques (de diamètre inférieur à 100 nm). Contrairement à la forme cristalline, les nanoparticules du dioxyde de titane présente des risques pour la santé, notamment en raison de leur très petite taille (elles s’infiltrent partout) et de la réactivité des atomes qui se trouvent à leur surface, dont la principale fonction est l’oxydation des organismes vivants. Disons-le carrément : on risque fort de regretter les sociétés de ravalement.
Les Suisses n’en sont pas fondus
En Suisse, un rapport édité conjointement par l’Office fédéral de l’environnement (OFEV) et l’Office fédéral de la santé publique (OFSP) souligne le manque de connaissances concernant les risques potentiels des nanoparticules synthétiques en général. Les deux institutions ont ainsi lancé un plan d’action de recherche et de développement concernant les nanoparticules. Le Grand Conseil de la République et canton de Genève n’a quant à lui pas attendu les résultats des études. Il a tout simplement interdit l’utilisation de ce nouveau matériau autonettoyant pour la construction de tout nouveau bâtiment.
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