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La propolis candidate naturelle à la lutte contre le Covid-19

Les scientifiques poursuivent leur recherche de substances prophylactiques et thérapeutiques contre le Covid-19, y compris parmi les "naturelles". La propolis, antiviral traditionnel issu de la ruche, pourrait cibler très à propos les mécanismes de l’infection, comme le montre une étude clinique sur des patients hospitalisés ainsi qu'une étude observationnelle sur du personnel soignant.

Jean-Pierre Giess

Qu'est ce que la propolis ?

 

Ce produit de la ruche est fabriqué par les abeilles qui, après avoir récolté les résines des sucs résineux, bourgeons et exsudats des plantes, les mélangent avec des enzymes, de la cire d’abeille et du pollen, pour obtenir un produit résineux compact et malléable.

 

Historiquement, l’homme a vite pris conscience des vertus de ce trésor de la nature qui contient notamment de nombreux flavonoïdes (galangine, lutéoline, rhamnétine, quercétine, etc.) et des huiles essentielles. Beaucoup de ses propriétés pharmacologiques sont aujourd’hui connues : immunomodulatrices (stimule ou freine le système immunitaire), antioxydantes, antibactériennes, antivirales, antifongiques, cicatrisantes, analgésiques, antiulcéreuses et anti-inflammatoire.

 

Du fait de la diversité des biotopes dans lesquelles les abeilles butinent, les différentes propolis du monde ont des compositions et profils chimiques différents. Pour simplifier on distingue généralement trois grandes familles de propolis :

 

La propolis brune (couramment appelée propolis de peuplier), la plus répandue en Europe, est un remède naturel très connu et employé pour le traitement des maux de gorge, des maladies respiratoires ou des faiblesses immunitaires notamment.

 

La propolis verte, souvent d'origine brésilienne, venant en particulier des régions du Parana et du Minas Gerais et issue du butinage d'une autre plante : le romarin des champs (Baccharis dracunculifolia). Si la propolis verte partage les propriétés antibactériennes, antivirales, antioxydantes et anti-inflammatoires de sa cousine brune, son profil chimique fait ressortir une plus forte concentration d’artepilline C.

 

La propolis rouge, dont on ne commence à connaître la composition que depuis 2004, est plus rarement commercialisée. Récoltée au Venezuela et au Mexique, elle émanerait des plantes de la famille des clusia (Scrobiculata, minor et major), tandis que celle du Nordeste du Brésil, la plus répandue aujourd’hui dans le commerce, vient du Dalbergia ecastophyllum, un palétuvier des mangroves.

La propolis pourrait contrarier la pénétration du virus

Pour comprendre comment fonctionne l'activité antivirale de la propolis et les critères pour en choisir une bonne, découvrez cet article sur la propolis pour les maux de l'hiver.

Etant donné le caractère très polyvalent de cet antiviral naturel et son large spectre d'action, les spécialistes se sont rapidement interrogé sur son potentiel protecteur contre le Covid-19, en mettant en parallèle le fonctionnement du virus et les modes d'action connus de ce produit de la ruche.

L’épidémie au Sars-Cov-2 repose notamment sur l’aptitude du virus à pénétrer à l’intérieur des cellules hôtes, mécanisme qui implique trois acteurs majeurs : le récepteur cellulaire qu’est l’enzyme de conversion de l’angiotensine 2 (ACE2), la protéase transmembranaire à sérine 2 (TMPRSS2) qui facilite l’intrusion dans la cellule, et la kinase PAK1, une autre enzyme, suractivée par l’infection et qui précipiterait l’inflammation des bronches, la fibrose et l’immunosuppression, caractéristiques des cas aggravés de Covid-19.

Or certains actifs de la propolis (dont l’ester phénéthylique de l'acide caféique, le kaempférol, la quercétine…) avaient déjà montré in vitro et in vivo une activité inhibitrice sur ces trois acteurs (ACE2, TMPRSS2 et PAK1), ce qui laissait espérer une réduction sensible du potentiel infectieux du virus.

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Des études précliniques pleines de promesses

Des essais précliniques ont également révélé que la propolis stimulait l’immunorégulation des cytokines pro-inflammatoires responsables des orages cytokiniques fréquemment observés au printemps dernier, lors de l’aggravation brutale des formes les plus virulentes de Covid-19. D’autre part, selon des modélisations informatiques (in silico), l’ester phénéthylique de l'acide caféique contenu dans la propolis devrait avoir un effet inhibiteur sur la protéase Mpro du Sars-Cov-2, une enzyme essentielle à son cycle de réplication. Non contente de limiter la contamination des cellules, la propolis semblait donc pouvoir entraver la multiplication du virus à l’intérieur de celles-ci, augurant, en pratique, de symptômes moins sévères et d’une guérison plus rapide. C'est sur la base de ce raisonnement que des chercheurs ont lancé une étude clinique parue très récemment.

La propolis en traitement adjuvant montre son efficacité chez des patients Covid hospitalisés.

Les résultats d’une première étude clinique sur des patients Covid ont été publiés le 20 mars 2021. Initiée par l'entreprise brésilienne spécialisée en produits de la ruche Apis Flora (groupe Lehning), elle a été menée par l’hôpital de São Rafael au Brésil et a porté sur 124 patients atteints du Covid et hospitalisés (PCR positive, avec des symptômes dans les 14 jours précédents).

Répartis en trois groupes randomisés, les premiers ont juste reçu des soins médicamenteux courants (corticoïdes, azithromycine, chloroquine, hydroxychloroquine ou oseltamivir selon les cas), les seconds ces soins courants et 400 mg/j de propolis pendant 7 jours, les troisièmes ces soins courants et 800 mg/j de propolis pendant 7 jours. Les participants à l’étude avaient en moyenne 50 ans, pour 70 % d’entre eux étaient des hommes et avaient les profils de comorbidités couramment rencontrés (obésité 52 % ; diabète 21 % ; BPCO 7 % ; hypertension 5 %). Étaient exclus de l’étude les femmes enceintes, les personnes connaissant des déséquilibres immunitaires ou des hypersensibilités aux produits de la ruche.

L’objectif principal de l’étude était de déterminer si la prise d’un extrait de propolis (capsules d'un extrait standardisé breveté appelé EPP-AF et contenant 60 % de propolis verte et 40 % de propolis brune), en accompagnement d’une prise en charge médicale et en début d’hospitalisation, réduisait la durée de celle-ci. Pari tenu pour ce produit de la ruche contenant pas loin de 300 molécules naturelles et principes actifs : en effet, si la durée médiane d’hospitalisation pour le groupe contrôle était de 12 jours, elle a été de 7 jours pour le groupe ayant pris en traitement adjuvant 400 mg de propolis par jour, et de 6 jours pour le groupe prenant 800 mg par jour, soit une durée d’hospitalisation divisée par deux !

D’autres bénéfices secondaires possibles de la prise de propolis en traitement adjuvant ont également été mis en évidence par l’étude, comme notamment une protection de la fonction rénale (24 % d’atteintes rénales pour le groupe contrôle versus 5 % pour le groupe ayant pris 800 mg de propolis par jour). L’absence de différence dans la survenue d’évènements indésirables entre les différents groupes suggère en outre une absence d’interaction notable avec les traitements médicamenteux et une bonne sécurité d’usage pour la propolis. Si l’étude n’a pas pu être faite contre placebo (le « gold standard » des recherches cliniques), elle est néanmoins robuste et très encourageante dans la course actuelle pour trouver des traitements précoces ou adjuvants, sécures et à bas coût. Ces résultats prometteurs devront être confirmés dans une étude de plus grande ampleur d’ores et déjà en préparation.  Elle pourra peut-être, espérons le, mettre en évidence encore d'autres bénéfices à la prise de propolis lors d'une infection au Covid-19.

Des personnels soignants testent la propolis en prévention du Covid-19. Résultat : "98% de protection".

Une étude clinique interventionnelle a été menée durant l'année 2021 auprès des professionnels de santé des services d'urgences (médecins, infirmières, secrétaires médicales) de deux hopitaux universitaires turques différents.

Malgré la nécessité de confirmation par des recherches plus poussées (répondant encore une fois aux canons actuels), cette étude est très encourageante quant à l'usage préventif que pourrait avoir la propolis contre le Covid-19.

204 volontaires, non vaccinés au moment de l'étude, ont été répartis en deux groupes équivalents (nombre, médiane d'âge, d'IMC, etc.). Le premier a pris 40 gouttes de propolis par jour (20 matin, 20 soir) pendant un mois, et le second rien. A la fin du mois, le nombre de tests PCR postifs et diagnostics de Covid-19 des deux groupes ont été comparés.

Il en ressort que dans ces deux groupes très exposés au virus, 14 personnes du groupe contrôle ont reçu un test PCR positif sur la période, contre seulement 2 du groupe prenant de la propolis.

Il en ressort donc que la supplémentation en propolis a montré dans cette étude une protection significative contre l'infection au Covid, de l'ordre de 98%.

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Sources :

« Efficacy of Brazilian Green Propolis (EPP-AF®) as an adjunct treatment for hospitalized COVID-19 patients: a randomized, controlled clinical trial », Biomedicine & Pharmacotherapy, 20 mars 2021

« Propolis and its potential against Sars-Cov-2 infection mecanismes and Covid-19 disease », Biomedicine & Pharmacotherapy, Nov. 2020

« PAK-1blockers : potential therapeutics against Covid-19 », Medicine in Drug Discovery, Juin 2020

"The prophylactic efficacy of Anatolian propolis in individuals at high risk of COVID-19", Eur Rev Med Pharmacol Sci, 2022 Dec.
doi: 10.26355/eurrev_202212_30483


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